Intervention de Antoine Lefèvre

Réunion du 4 avril 2019 à 15h00
Actionnariat des sociétés publiques locales et des sociétés d'économie mixte — Suite de la discussion et adoption d'une proposition de loi dans le texte de la commission modifié

Photo de Antoine LefèvreAntoine Lefèvre :

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, j’aimerais tout d’abord saluer la convergence de vues qui se manifeste sur les différentes travées de cet hémicycle, puisque la présente proposition de loi a été cosignée par des membres de six des sept groupes que compte notre assemblée, dont votre serviteur. Ce fait est suffisamment original pour être souligné, et je veux parier que nos collègues du groupe CRCE nous rejoindront pour un vote positif.

Ce qui explique notamment ce consensus, c’est l’expérience des parlementaires qui, jadis, ont souvent été maires ou présidents de collectivité, n’en déplaise à certains, et qui, dans le cadre de la gestion quotidienne de leur collectivité, ont pu mesurer combien il était nécessaire de moderniser régulièrement le statut des SEM.

Nous remercions notre rapporteur pour les précisions apportées lors de l’examen du texte en commission des lois, qui ont permis de sécuriser encore davantage cet acteur incontournable en matière d’action publique locale.

Pour ce qui est des amendements proposés soit par nos collègues, soit par le Gouvernement, j’invite à une grande prudence, car il ne faudrait pas rendre instable cette proposition de loi en élargissant trop son périmètre ou par l’ajout de définitions juridiques peu claires.

Je souhaite par ailleurs rappeler le principe majeur qui est au fondement de la décentralisation, principe que le Conseil constitutionnel s’efforce, vaille que vaille, texte après texte, de faire respecter : celui de la liberté laissée à toute collectivité territoriale, petite ou grande, commune, département, région ou nouvelle communauté, pour réaliser ses interventions.

Les chamboulements des dernières années en matière de regroupements ont durablement transformé le paysage de la France.

Les 1 300 sociétés d’économie mixte sont, dans notre paysage institutionnel et dans la pratique de la gestion des collectivités locales, une réalité qui a pris beaucoup d’importance, même si, leur origine étant lointaine – les décrets-lois Poincaré datent de 1926 –, la progression en a été étalée dans le temps.

L’histoire des entreprises publiques locales s’est toujours faite par les élus, et le Parlement s’est régulièrement saisi de textes les instaurant, les remaniant, les aménageant, les actualisant, du fait des nouvelles responsabilités que les collectivités locales doivent, et devront, assumer.

Les EPL sont des outils créés par les élus pour leur territoire, et dont ils ont la maîtrise politique et financière. Le montant de leur capitalisation s’élève à 4, 3 milliards d’euros, détenus à 65 % par les collectivités locales ; autrement dit, elles représentent une opportunité de développement inouïe.

Le rôle des parlementaires est donc important dans leur histoire récente, et nous sommes très sensibles à la question de leur sécurité juridique. Chaque texte de loi relatif aux entreprises publiques locales, ou presque, a été voté à l’unanimité – cela a été rappelé.

L’arrêt du Conseil d’État du 14 novembre 2018 Syndicat mixte pour l ’ aménagement et le développement des Combrailles interdit qu’une collectivité n’exerçant pas l’ensemble des compétences sur lesquelles porte l’objet de la SPL en soit actionnaire. Jusqu’alors, plusieurs décisions divergentes avaient retenu l’attention sur ce lien entre compétences et missions. La position du Conseil d’État était donc attendue. Et c’est peu de dire qu’il nous fait, en optant pour la position la plus stricte, un mauvais coup.

La portée de cet arrêt met en péril la quasi-totalité des SPL existantes ou en cours de création. À nouveau, donc, il nous faut nous pencher sur leur berceau et apporter, par cette proposition de loi, la clarification législative qui s’impose.

Le présent texte précise ainsi l’intention qui avait été celle du législateur lors de l’élaboration de la loi de 2010 pour le développement des SPL, que j’avais, à l’époque, cosignée.

Il convient de combler le vide juridique et de préserver cet outil.

Cette proposition de loi, dont le contenu a été largement évoqué par notre collègue Hervé Marseille, que je remercie de nouveau, et par notre rapporteur, vise donc à sécuriser les SEM et les SPL, si indispensables à nos territoires, en permettant aux collectivités locales de différents niveaux d’en être actionnaires. En deux mots, chacun a bien compris qu’il s’agissait à la fois de liberté et de responsabilité, de mutualisation, d’économies de gestion – il s’agit, par là même, de faire bénéficier les collectivités et leurs habitants de marges de manœuvre financières supplémentaires.

Je note que le quatrième des cinq objectifs figurant dans la contribution de Territoires unis, qui regroupe les trois associations nationales d’élus, l’AMF, l’ADF et Régions de France, au grand débat national consiste « à renforcer le rôle des collectivités dans les politiques publiques assurant la cohésion sociale et territoriale de la Nation ». Il est à cette occasion fait expressément référence aux réseaux d’offres des opérateurs locaux, à savoir les SEM, les EPL, etc.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion