Intervention de Laurent Alexandre

Délégation sénatoriale à la prospective — Réunion du 21 mars 2019 à 8h30
Audition de M. Laurent Alexandre chirurgien essayiste et entrepreneur

Laurent Alexandre :

Les « chatbots » (ou agents conversationnels) ne marchent pas : ils ne réussissent pas le test de Turing. On préfère donc encore recourir à un téléopérateur au Maroc plutôt qu'à un robot pour nombre de processus. Les emplois de backoffice, de services de base comme le nettoyage ou le service de restauration ou d'hôtellerie ne sont probablement pas robotisables avant 2035. Par ailleurs, les chatbots restent insupportables pour l'utilisateur et, comme Bill Gates, on peut penser que ça ne se perfectionnera pas avant les années 2030. Mais d'autres applications de l'IA sont redoutables : il n'y a ainsi aucune chance que le radiologue soit meilleur que l'IA pour repérer une tumeur précoce.

Je vous fais part d'une inquiétude : l'Europe est en train de s'effondrer en matière d'IA. Elle n'a aucune entreprise majeure d'IA, lorsqu'Amazon consacre 24 milliards de dollars en recherche et développement (R&D). Si on n'investit pas, on va perdre notre souveraineté. On est proche du point de non-retour. La classe politique doit aussi se former pour comprendre l'IA. Il est urgent de mettre un coup d'arrêt à notre déclin technologique.

Il existe des biais dans le déploiement de l'IA car celui-ci a des implications désagréables, pas très « politiquement correct » : l'IA ne fait que reproduire les réalités, et de ce fait, peut parfois être accusée de racisme dans les processus de recrutement.

Une autre remarque : on ne doit pas penser qu'on pourra auditer l'IA. Ce n'est pas possible.

Certains spécialistes disent qu'avec l'IA, il faudra changer de métier tous les cinq ans : cela crée beaucoup d'angoisse chez nos concitoyens qui ont déjà du mal à se former, et cette angoisse génère au final un souci d'acceptabilité de l'IA, que l'on ne règlera pas forcément par la formation continue : une étude américaine récente n'est pas très optimiste sur les capacités d'apprentissage de l'ensemble des travailleurs tout au long de leur cycle de vie professionnelle.

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