Comme chaque année à la même période, nous examinons aujourd'hui le bilan de la mise en application des lois relevant de notre commission. Il porte sur les lois promulguées au cours de la dernière session, soit entre le 1er octobre 2017 et le 30 septembre 2018, ainsi que sur les lois antérieures qui ont fait l'objet de mesures réglementaires d'application jusqu'au 31 mars 2019. Je n'aborderai donc pas la loi relative à la lutte contre la manipulation de l'information dont l'adoption est postérieure à octobre 2018.
Au cours de la session 2017-2018, trois lois ont été promulguées dans les secteurs de compétence de la commission, et plus précisément dans les domaines de l'enseignement supérieur et de l'enseignement scolaire. Deux d'entre elles étaient d'origine parlementaire : la loi visant à simplifier et mieux encadrer le régime d'ouverture et de contrôle des établissements privés hors contrat dont notre collègue Françoise Gatel fut à l'initiative et la loi relative à l'encadrement de l'utilisation du téléphone portable dans les établissements d'enseignement scolaire, certes voulue et soutenue par le Gouvernement, mais proposée par nos collègues députés. Le troisième texte était d'origine gouvernementale : il s'agit de la loi d'orientation et de réussite des étudiants, dite loi ORE.
Sur ces trois textes, seules la loi sur l'encadrement des établissements hors contrat et la loi ORE nécessitaient des mesures réglementaires d'application.
Parmi les dispositions adoptées dans le cadre de la loi Gatel, plusieurs nécessitaient un décret d'application. Le Gouvernement a choisi de rassembler les mesures d'application dans un décret unique qui est paru quarante-cinq jours après la promulgation de la loi. Exhaustif sur la mise en oeuvre du nouveau régime applicable aux établissements d'enseignement scolaire privés hors contrat, il a été par ailleurs complété par une circulaire très détaillée, parue en août 2018 et destinée aux préfets, aux recteurs, aux inspecteurs d'académie et aux directeurs académiques des services de l'éducation nationale (Dasen). Il convient de saluer ce travail de mise en application à la fois complet et rapide.
S'agissant de la loi ORE, il faut rappeler le contexte particulier de son examen. La nouvelle procédure d'inscription dans les formations d'enseignement supérieur, Parcoursup, a été lancée avant l'adoption définitive de la loi ORE par le Parlement. La promulgation de la loi est ainsi intervenue peu avant la date limite fixée aux lycéens pour formuler leurs voeux sur Parcoursup. C'est donc un calendrier tendu qui a caractérisé l'examen de cette loi. Le délai de parution des premiers décrets et arrêtés d'application de la loi en témoigne : ils sont parus le 9 mars soit le jour de publication au Journal officiel de la loi elle-même.
La loi ORE a constitué le morceau de choix de notre activité législative lors de la session 2017-2018. Ce travail s'est d'ailleurs poursuivi après l'entrée en vigueur de la loi, en 2018 et 2019, dans le cadre de notre mission de contrôle, à travers l'organisation de plusieurs auditions de la ministre et d'autres parties prenantes.
D'un point de vue statistique, le taux de mise en application de la loi s'établit à 81 %. Les principales mesures réglementaires ont été prises dans un délai inférieur à six mois. Deux dispositions adoptées sur l'initiative du Sénat sont toutefois toujours en attente d'une mesure d'application : le fonctionnement et l'organisation de l'observatoire national de l'insertion professionnelle créé à l'article 7 ne sont toujours pas précisés ; de même, le cadre national fixant les conditions de scolarité et d'assiduité applicables aux étudiants n'a pas fait l'objet d'un arrêté.
Une nouvelle série de décrets et d'arrêtés est parue fin mars 2019 pour modifier et compléter les règles de fonctionnement de Parcoursup en vue de la nouvelle campagne d'inscription pour l'année universitaire 2019-2020. Les obligations des établissements en matière de publication des critères généraux d'examen des voeux y sont renforcées, le calendrier d'inscription est également resserré (fin de la procédure en juillet 2019) et de nouvelles formations sont intégrées à Parcoursup. Enfin, il est mis fin à la sectorisation en Île-de-France. Cette décision fait suite au rapport que notre collègue Laurent Lafon a remis au Gouvernement dans le cadre de la mission qui lui avait été confiée.
D'une manière générale, ce bilan confirme que l'application des lois est, depuis plusieurs années, plus rapide qu'autrefois. La transmission, dès la promulgation de la loi, d'un calendrier de parution des textes d'application traduit la volonté des gouvernements successifs de mettre véritablement en oeuvre rapidement les dispositions votées par le législateur, et l'on ne peut que s'en réjouir.
En revanche, le bilan est moins favorable pour ce qui est des rapports demandés par la loi. Parmi les lois adoptées lors de la XIVe législature, le nombre de rapports en attente de parution s'élève ainsi à dix-neuf, treize ayant été remis. Au cours de la session 2017-2018, seul le rapport du Gouvernement sur la situation des arts visuels nous a été transmis, conformément à l'article 45 de la loi de juillet 2016 relative à la liberté de création, à l'architecture et au patrimoine (LCAP). Ce rapport nous est parvenu avec dix-huit mois de retard. Cette situation nous conforte dans notre volonté d'exclure autant que possible l'insertion de ce type de demande non normative dans la loi. Je constate, à cet égard, que depuis le début de la XVe législature notre commission ne dénombre que trois demandes de rapports.
J'en viens à présent aux lois plus anciennes. Dans le domaine de la culture, aucune loi n'a été adoptée au cours de la session 2017-2018. La dernière en date est la loi relative à la liberté de la création, à l'architecture et au patrimoine (LCAP). Sa mise en application a peu évolué depuis l'an dernier, celle-ci étant quasi complète.
Deux mesures demeurent en attente de textes d'application. La première concerne les modalités d'agrément des sites de référencement d'images sur Internet afin de leur ouvrir un droit de reproduction et de représentation d'une oeuvre visuelle. L'absence de texte réglementaire rend impossible en l'état la rémunération des artistes visuels dont les oeuvres sont reproduites jusqu'à présent sans autorisation. La seconde a pour objet la définition des conditions dans lesquelles les enseignants des établissements d'enseignement supérieur de la création artistique dans les domaines du spectacle vivant et des arts plastiques peuvent être chargés d'une mission de recherche.
Par ailleurs, le Gouvernement n'a pas remis au Parlement le rapport sur la situation du dialogue social et de la représentativité des négociateurs professionnels du secteur du spectacle vivant, prévu à l'article 41 de la loi.
Dans le secteur de la communication, nous pouvons nous féliciter de ce que la loi du 14 octobre 2015 relative au deuxième dividende numérique et à la poursuite de la modernisation de la télévision numérique terrestre, adoptée à l'unanimité, soit devenue entièrement applicable. Le dernier décret fixant les modalités de suspension par l'Agence nationale des fréquences de l'accord d'implantation d'une station radioélectrique, lorsqu'elle constate qu'elle est à l'origine d'un brouillage de fréquences, est paru le 21 juin 2018.
Je conclurai ce bilan en évoquant la mise en application de la dernière loi en date adoptée dans le domaine du sport, à savoir la loi visant à préserver l'éthique du sport, à renforcer la régulation et la transparence du sport professionnel et à améliorer la compétitivité des clubs, que nous devons à notre ancien collègue Dominique Bailly.
Une des dispositions majeures de la loi relative à l'exploitation commerciale de l'image des sportifs est enfin applicable. Je m'en félicite, car je me souviens que nous avons été nombreux à nous inquiéter de la publication du décret auprès de l'ancienne ministre des sports, Laura Flessel. Le gouvernement d'Édouard Philippe a hérité de l'application de cette disposition adoptée lors du précédent quinquennat et a souhaité prendre le temps, compte tenu des enjeux économiques et sociaux de la mesure. Il a mis en place un groupe de travail associant les représentants des ministères concernés (directions des sports, du budget, de la sécurité sociale et direction générale du travail) avant de mener une concertation avec les acteurs concernés.
Le nouveau dispositif permet aux clubs sportifs professionnels de conclure avec un joueur ou un entraîneur un contrat relatif à l'exploitation commerciale de son image, distinct du contrat de travail, donnant lieu au versement d'une redevance complémentaire du salaire, avec un niveau réduit de cotisations. Cette mesure a pour objectif de restaurer la compétitivité des clubs français dans le contexte d'une concurrence internationale très vive. Les contrats de redevance devraient également rendre plus transparents les flux financiers qui lient les sportifs professionnels et les clubs.
Ces dispositions ne seront toutefois totalement opérationnelles que lorsque les conditions de versement de la redevance auront été définies dans le cadre d'une convention ou d'un accord collectif au sein de chaque discipline sportive.