Intervention de Pierre-Yves Collombat

Réunion du 7 mai 2019 à 14h30
Contrôle de l'application et de l'évaluation des lois — Adoption d'une proposition de résolution dans le texte de la commission

Photo de Pierre-Yves CollombatPierre-Yves Collombat :

Monsieur le président, mes chers collègues, quel parlementaire n’est pas révulsé par les délais, d’apparence incompressibles, entre le vote des lois et leur application ? Ce constat n’empêche d’ailleurs pas l’exécutif de se plaindre du temps perdu par les assemblées en débats et discussions d’amendements inutiles !

Faut-il, pour autant, en rendre responsables les sénateurs ou les députés, et leur donner une mission de « suivi » – de surveillance – de l’exécution des lois ? Je ne le pense pas. C’est une tâche qui incombe au Gouvernement et à son secrétariat général, que je croyais tout spécialement chargé de cette responsabilité. C’est lui qu’il convient de « responsabiliser », pour reprendre les termes du rapport, et non les parlementaires, dont la mission, n’en déplaise aux amateurs de procédures expéditives, est d’abord et toujours de faire la loi.

Je crains en effet que, sur fond de réduction des effectifs et des moyens d’action des parlementaires, leur donner officiellement la responsabilité de contrôler la mise en œuvre des lois qu’ils votent, loin de renforcer leurs pouvoirs, n’occulte encore un peu plus leur mission première : faire la loi.

Le contrôle de l’action du Gouvernement, dont ils ont effectivement la charge, n’est pas le service juridique après-vente de la loi, mais l’évaluation de la manière dont celle-ci est exécutée sur le terrain. Le contrôle annuel, par la commission des lois, de l’état d’avancement de la production par l’exécutif des textes d’application des lois relevant de sa compétence me semble suffisant et correctement exécuté. Cela suffit à l’édification des citoyens, sans créer de surcharge pour la commission.

J’ai une autre réticence, tenant au risque de spécialisation de quelques sénateurs de la majorité et de la minorité qui pensent comme elle. Par construction, un parlementaire est un généraliste ; la première vertu du Parlement, ce qui en fait autre chose qu’une assemblée d’experts, même juridiques, est qu’en théorie du moins la loi est le produit du débat collectif, et non d’échanges entre spécialistes. Le fait que les non-spécialistes, ceux qui ne trouvent pas évidentes les certitudes d’habitude, ont voix au chapitre est la première garantie de la vitalité du parlementarisme et de sa compréhension par nos concitoyens. C’est en tout cas ma conviction.

Le groupe CRCE ayant la faiblesse de tenir à cette vision du parlementarisme, nous nous abstiendrons sur ce texte.

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