Intervention de Dany Wattebled

Réunion du 9 mai 2019 à 14h30
Synergies entre les conseils municipaux et communautaires — Adoption d'une proposition de loi dans le texte de la commission modifié

Photo de Dany WattebledDany Wattebled :

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la proposition de loi que nous sommes appelés à examiner aujourd’hui porte la marque de l’esprit du Sénat.

C’est un texte inspiré par l’expérience de terrain, celle des élus locaux que nous sommes ou que nous avons été.

C’est le fruit d’un travail d’évaluation patient et méthodique de la législation. Nous savons en effet, au Sénat, qu’il ne suffit pas de voter des textes, mais qu’il faut se soucier de leur mise en œuvre et des effets qu’ils produisent. La fonction de contrôle et d’évaluation fait partie intégrante des missions constitutionnelles du Parlement.

C’est, enfin, un texte mesuré, dont les auteurs cherchent non pas à renverser la table ou à revenir sur les réformes votées au cours des années précédentes, mais à procéder aux ajustements qui apparaissent indispensables au vu de l’expérience acquise.

Chacun le sait dans cet hémicycle : le bon fonctionnement des établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre nécessite une parfaite coordination entre les conseils municipaux et communautaires. Non seulement les communes doivent pouvoir faire entendre leur point de vue au sein des assemblées délibérantes des communautés qui les réunissent, mais il est indispensable que les maires et les conseils municipaux soient pleinement associés aux décisions prises à l’échelon intercommunal.

C’est, d’une part, une condition de la légitimité de l’action communautaire, car un EPCI n’est que l’émanation de ses communes membres ; c’est à l’échelle de la commune que le lien démocratique entre les citoyens et les élus reste le plus fort.

C’est, d’autre part, un gage de bonne administration locale, tant les compétences communales et intercommunales sont étroitement imbriquées.

Pendant plus d’un siècle, les délégués des communes au sein des assemblées délibérantes des établissements publics de coopération intercommunale ont été désignés par leur conseil municipal.

La situation a changé depuis la loi du 17 mai 2013 et les élections de mars 2014. Il faut désormais distinguer entre les syndicats de communes, d’un côté, qui sont administrés par un comité syndical dont les membres sont élus par les conseils municipaux, et les EPCI à fiscalité propre, et de l’autre, qui sont administrés par un conseil communautaire dont les membres sont désignés selon des modalités qui diffèrent en fonction de la population de la commune.

En effet, dans les communes de 1 000 habitants ou plus, dont les conseils municipaux sont élus au scrutin de liste, les conseillers communautaires sont désormais élus au suffrage universel direct, en même temps que les conseillers municipaux et selon un système dit de fléchage qui établit une corrélation étroite entre les candidatures et les résultats aux deux élections.

En revanche, dans les communes de moins de 1 000 habitants, dont les conseils municipaux sont élus au scrutin uninominal, les conseillers communautaires sont des membres du conseil municipal, désignés dans l’ordre du tableau.

La réforme de 2013 est parvenue, dans l’ensemble, à un équilibre satisfaisant. Grâce aux apports du Sénat, le législateur a réussi à opérer une juste conciliation entre le principe, fixé en 2010, de l’élection des conseillers communautaires au suffrage universel direct dans la plupart des communes et la nécessité de maintenir un lien étroit entre les conseils municipaux et communautaires.

Certaines difficultés n’en demeurent pas moins.

En effet, en même temps que la prérogative consistant à élire leurs délégués au conseil communautaire, les conseils municipaux ont perdu la faculté de remplacer ceux-ci en cours de mandat. Cela peut provoquer des dysfonctionnements en cas de dissensions entre le conseil municipal et les représentants de la commune au sein du conseil communautaire, par exemple à la suite d’un changement de majorité municipale.

Il peut également arriver que le maire, même s’il le souhaite, ne siège pas au conseil communautaire. C’est le cas, en particulier, lorsqu’un nouveau maire est élu en cours de mandature.

La proposition de loi présentée par notre collègue Alain Marc et les membres du groupe Les Indépendants – République et Territoires a pour ambition de résoudre ces difficultés.

La commission des lois a souscrit aux objectifs recherchés, mais elle a estimé que certaines dispositions proposées se heurtaient à des problèmes de droit ou d’opportunité et méritaient donc d’être affinées.

En ce qui concerne les communes de 1 000 habitants et plus, la proposition de loi prévoyait initialement que leur représentation au sein des conseils communautaires serait désormais assurée, d’abord, par le maire, sauf si, à la demande de celui-ci, le conseil municipal décidait de désigner un autre de ses membres et, ensuite, par des conseillers communautaires élus en même temps que les conseillers municipaux au suffrage universel direct, selon le système de fléchage en vigueur aujourd’hui.

En outre, le conseil municipal aurait pu, à tout moment, procéder au remplacement d’un conseiller communautaire par un autre conseiller municipal du même sexe ayant figuré sur la même liste de candidats, à condition que l’un de ses colistiers le demande.

Nous avons constaté que ce dispositif aboutissait à faire coexister quatre catégories de représentants des communes de 1 000 habitants et plus dans les conseils communautaires, les uns désignés ès qualités, les autres élus au suffrage universel direct ou indirect. Il ne nous a pas paru souhaitable que les conseillers communautaires d’une même commune puisent ainsi leur légitimité à des sources différentes.

Par ailleurs, la commission a estimé qu’il était juridiquement impossible d’accorder au conseil municipal la faculté de mettre fin, à tout moment et pour tout motif, au mandat d’un conseiller communautaire élu au suffrage universel direct. Une telle disposition aurait mis à mal l’effectivité du droit de suffrage garanti par l’article 3 de la Constitution. C’est pourquoi la commission a jugé préférable de s’en tenir sur ce point au statu quo.

En revanche, pour faciliter les remplacements en cours de mandat, elle a accepté l’allongement des listes de candidats, qui pourraient ainsi comporter entre deux et quatre candidats supplémentaires en fonction du nombre de sièges à pourvoir.

Dans les communes de moins de 1 000 habitants, dont les conseillers communautaires sont désignés dans l’ordre du tableau, aucun principe constitutionnel n’interdit qu’il soit mis fin par anticipation au mandat de ces conseillers.

Là encore, la proposition de loi prévoyait que le conseil municipal puisse remplacer à tout moment un conseiller communautaire par un autre conseiller municipal de son choix.

La commission a estimé préférable de ne pas faire coexister deux catégories de délégués de ces communes, les uns désignés dans l’ordre du tableau, les autres élus par le conseil municipal.

C’est pourquoi elle a prévu qu’en cas d’élection d’un nouveau maire, pour quelque cause que ce soit, il sera procédé à une nouvelle désignation des conseillers communautaires de la commune dans l’ordre du tableau. De cette façon, le nouveau maire pourra siéger au conseil communautaire s’il le souhaite, ce qui n’est pas toujours le cas aujourd’hui.

Au-delà de la composition des conseils, la commission des lois s’est attachée à trouver d’autres moyens pour renforcer les synergies entre les communes et l’intercommunalité.

Suivant une proposition faite par notre collègue Mathieu Darnaud au nom de la mission de contrôle et de suivi de la mise en œuvre des dernières lois de réforme territoriale, la commission des lois a souhaité qu’une conférence des maires soit instituée dans l’ensemble des EPCI à fiscalité propre, dès lors que 30 % des maires en feraient la demande au cours des six mois suivant le renouvellement des conseils. Cette instance de concertation et de coordination entre les exécutifs locaux, qui n’est aujourd’hui obligatoire que dans les métropoles, a fait la preuve de son utilité.

Le cas de la métropole de Lyon mérite un examen particulier. En effet, comme vous le savez, cette métropole est non pas un EPCI, mais une collectivité territoriale à statut particulier. À compter de 2020, son conseil sera élu au suffrage universel direct lors d’une élection distincte des élections municipales. Les communes ne seront donc plus représentées en tant que telles au conseil métropolitain et certaines communes n’y enverront même aucun de leurs habitants.

Cette situation est paradoxale, car la métropole de Lyon exerce un grand nombre de compétences en lieu et place des communes et l’exercice de ces compétences exige une coordination étroite avec celles-ci.

C’est pourquoi, sur proposition de notre collègue François-Noël Buffet, la commission a prévu que seraient désormais soumis pour avis à la conférence métropolitaine des maires les actes les plus importants de la métropole et ceux qui se rapportent le plus étroitement aux compétences communales.

Enfin, la commission a adopté plusieurs amendements visant à clarifier le droit électoral ou à abroger des dispositions obsolètes, parmi lesquelles l’article 54 de la loi Maptam, que vous connaissez bien, ainsi qu’un amendement de notre collègue Jean-Pierre Grand tendant à supprimer l’incompatibilité entre l’exercice d’un mandat de conseiller communautaire et celui d’un emploi salarié auprès d’une commune membre, incompatibilité qui n’a pas de justification évidente.

Pour finir, je tiens à remercier Alain Marc d’avoir pris l’initiative de cette proposition de loi très bienvenue, que la commission des lois vous invite à adopter, mes chers collègues, dans la rédaction issue de ses travaux.

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