L’examen de votre proposition de loi, monsieur le sénateur Alain Marc, nous offre l’occasion d’ouvrir un nouveau cycle important sur les suites à donner au grand débat national pour les élus locaux.
Je souhaite répondre à un certain nombre d’interpellations faites par l’opposition sénatoriale comme par la majorité sénatoriale sur la manière de procéder. Même si nous ne sommes pas nombreux cet après-midi, il est utile de clarifier le cadre dans lequel nous allons désormais travailler ensemble, dans les semaines à venir.
Tout d’abord – je l’avais déjà nettement discerné lors de la discussion de la proposition de loi du groupe socialiste sur les funérailles républicaines –, les interventions, quelles qu’elles soient, ont toutes un point commun, celui de poser la question de la manière de concilier deux grands principes qui se font concurrence, mais qui sont fondamentalement républicains : le principe de liberté – vous nous dites que vous voulez plus de liberté locale et qu’il faut faire confiance aux élus locaux et les laisser s’organiser comme ils l’entendent – et le principe d’égalité sur le territoire, notamment au travers d’une pratique démocratique locale.
Il est encore plus compliqué de concilier ces principes dans cette enceinte, alors que nous n’avons pas la même sensibilité politique – c’est le moins que l’on puisse dire. Il est très difficile d’élaborer un cadre suffisamment souple pour garantir le respect du principe d’égalité, et pas trop rigide non plus pour favoriser une certaine liberté : c’est un travail de Normand en quelque sorte ! §Fondamentalement, ce n’est pas évident.
Jusqu’où faire confiance aux élus locaux ? C’est le premier point sur lequel je veux m’attarder, car il permettra de comprendre un certain nombre des avis que le Gouvernement émettra sur les amendements examinés tout à l’heure, y compris sur un certain nombre de chantiers, comme celui des irritants de la loi NOTRe.
Pour ma part, je suis plutôt un libéral tocquevillien : j’ai donc plutôt envie d’encourager les libertés locales, mais, en même temps, je suis très attaché à l’égalité. Pour dire la vérité, sur la centaine d’heures de débats que le Président de la République a eus avec les maires, il y a autant d’interlocuteurs qui nous ont demandé de leur faire confiance, de faire en sorte que l’État soit désormais un État qui accompagne et qui laisse tranquille les élus locaux, que d’intervenants demandant pourquoi ils avaient moins de droits dans leur département que dans telle ou telle métropole, ou tel ou tel territoire.
La pulsion, l’envie, le goût de la liberté est aussi fort que le goût de l’égalité : il faudra bien que l’on ait ce débat entre nous à un moment donné. Il s’agit, à mon avis, d’un débat qui dépasse le clivage gauche-droite, et qui tient aussi à la géographie du pays puisque, selon les régions dont nous sommes originaires, notre rapport à l’État est fondamentalement différent.
Par ailleurs, et je vais parler de ce sujet avant tout comme élu local, et non comme ministre, puisque j’ai été maire, élu communautaire et élu départemental, les EPCI ont, à un moment donné, cherché à singer les communes et se sont comportés comme des collectivités territoriales. Or, juridiquement, puisque nous parlons de droit dans cet hémicycle – je mets le cas de Lyon à part –, les établissements publics de coopération intercommunale, comme leur nom l’indique, sont des établissements publics et pas des collectivités territoriales.
Monsieur le sénateur Collombat, ce n’est donc pas que vos collègues et moi-même ne vous écoutions pas tout à l’heure lorsque vous vous exprimiez, c’est que l’on disait du bien de vous !