Notre mission d'information sur la gratuité des transports collectifs est réunie aujourd'hui pour poser le débat. En effet, pour établir si la gratuité est une fausse bonne idée ou une révolution écologique et sociale, encore faut-il s'entendre au préalable sur le contenu de la notion de gratuité et comprendre en quoi celle-ci présenterait des avantages propres, en particulier dans le domaine des transports collectifs.
Je suis heureuse de souhaiter la bienvenue à M. Jean-Louis Sagot-Duvauroux, philosophe et dramaturge, M. Maxime Huré, maître de conférences en science politique à l'université de Perpignan et M. Frédéric Héran, économiste urbaniste, maître de conférences à l'université de Lille.
Sans prétendre que la gratuité n'est pas de ce monde - écouter le chant des oiseaux ou le cri des enfants ou regarder passer les nuages est gratuit - il est clair que les services publics ont un coût. Ainsi, on a coutume de dire que la santé n'a pas de prix mais qu'elle a un coût. De nombreux services sont assurés par l'État ou les collectivités territoriales sans autre contribution des citoyens que les impôts. D'autres sont au moins partiellement pris en charge par les usagers, notamment les transports, sauf dans les villes ou agglomérations qui pratiquent la gratuité totale.
Nous avons fait le choix de privilégier l'étude des « expérimentations », pour reprendre le terme employé par M. Huré lors d'une conférence en 2018, c'est-à-dire les collectivités où la gratuité concerne tout le monde, tout le temps et sur tout le réseau. Ceci réduit déjà le champ des possibles ; certaines villes, fréquemment citées en exemple, ne pratiquent pas la gratuité totale. Ainsi à Tallin, il a été décidé, au début, que seuls les habitants ne paieraient pas les transports ; la billettique n'a pas été supprimée pour les non-résidents. Ensuite, la situation peut évoluer.
En tout état de cause, il faut bien que quelqu'un paie ; nous attendons de vous que vous nous expliquiez en quoi supprimer la contribution des usagers serait bénéfique en soi. J'ai lu que la mise en oeuvre de la gratuité dans l'agglomération d'Aubagne avait pu être réalisée « sans aucune augmentation d'impôts pour les habitants ». C'est, me semble-t-il, passer un peu vite sur l'accroissement du versement transport, devenu versement mobilité, payé par les entreprises, et qui reste une forme d'impôt.