Intervention de Jean-Pierre Sueur

Réunion du 23 janvier 2009 à 10h00
Accélération des programmes de construction et d'investissement — Article 3 bis

Photo de Jean-Pierre SueurJean-Pierre Sueur :

J’ai l’impression que, avec l’article 3 bis, les rédacteurs du projet de loi cherchent à faire encore plus fort.

Il ne vous aura pas échappé, mes chers collègues, que cet article vise à permettre à un candidat à un contrat de partenariat de présenter des offres finales qui ne seront pas accompagnées du bouclage financier définitif. Cette disposition est exorbitante. La conclusion d’un contrat de partenariat ne va pas sans difficulté : il faut prouver qu’il est plus avantageux pour la collectivité, il faut choisir « en bloc », en une seule fois, l’architecte, toutes les entreprises qui assureront les travaux publics, la banque ou les banques qui financeront le projet, l’exploitant, les entreprises qui assureront l’entretien, la maintenance.

La complexité tient aussi au fait qu’il faut présupposer que l’agrégat présenté par l’entreprise A est de meilleure qualité que celui de l’entreprise B.

Il en va tout autrement lorsque l’on procède par choix successifs. On commence par choisir un architecte – la profession est d’ailleurs inquiète –, puis on choisit les entreprises les mieux-disantes pour réaliser les travaux, les banques qui apporteront les financements, éventuellement après les avoir mises en concurrence, les entreprises qui assureront l’exploitation, la maintenance, l’entretien.

Ces règles sont claires. Ce sont les règles des marchés publics et des délégations de service public.

Mes chers collègues, les PPP offrent bien sûr une facilité. Aujourd’hui, pour les prisons, par exemple, c’est magnifique : vous construisez et vous ne payez rien ! On dit au maire : vous allez construire cet équipement, et cela ne va rien coûter pour le moment !

On parle souvent du développement durable dans cette enceinte, comme dans beaucoup d’autres, mais à qui laissera-t-on la facture ? Qui va payer dans dix ans, dans vingt ans, dans trente ans, voire dans quarante ans ? C’est comme le crédit revolving : cher client, on vous accorde un prêt, mais rassurez-vous, pour le moment, cela ne vous coûtera rien !

Il y a déjà un pari, en raison d’un certain nombre d’aléas inévitables ; or, pour relancer l’activité dans notre pays, vous proposez de surcroît, monsieur le ministre – j’en suis d’ailleurs très étonné –, un dispositif sans précédent dans notre droit, qui n’existe dans aucune procédure relative aux marchés publics : les candidats pourraient présenter leur candidature et être éventuellement choisis, sans fournir le bouclage financier définitif avant six mois !

Vous vous êtes émus tout à l’heure du délit de favoritisme, mes chers collègues. J’estime que ce type de dispositif où l’on est candidat sans annoncer son financement et où l’on peut réajuster ce dernier après présente un grand risque eu égard au délit de favoritisme.

Si vous voulez encombrer les tribunaux administratifs, les cours administratives d’appel, le Conseil d’État, sans parler des instances pénales, il faut voter ce type de disposition qui est, je le répète, tout à fait exorbitante !

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