Intervention de Claude Kern

Commission des affaires européennes — Réunion du 16 mai 2019 à 8h35
Politique de voisinage — Observation des élections en moldavie : communication de m. claude kern

Photo de Claude KernClaude Kern :

J'ai présidé la commission de l'APCE chargée de l'observation des élections législatives en Moldavie, qui se sont déroulées le 24 février dernier. Notre collègue Maryvonne Blondin, co-rapporteure en charge de ce pays au titre de la commission de suivi de l'APCE, faisait aussi partie de cette commission. J'avais également effectué une mission préélectorale en Moldavie, du 28 au 31 janvier, avec l'objectif d'évaluer l'organisation de la campagne électorale et le climat politique avant l'élection.

À titre liminaire, je rappelle que la Moldavie relève de la politique européenne de voisinage (PEV) de l'Union européenne et, pour le voisinage Est, du Partenariat oriental. Elle est d'ailleurs le premier partenaire oriental à avoir bénéficié, depuis le 28 avril 2014, d'une libéralisation des visas de court séjour, assortie d'une clause de sauvegarde renforcée. Le 27 juin suivant, la Moldavie et l'Union européenne ont signé un accord d'association, assorti d'un accord de libre-échange complet et approfondi, entré en vigueur le 1er juillet 2016. La mise en oeuvre de cet accord repose sur un programme d'association couvrant les années 2017 à 2020 et comportant des dispositions relatives à différents sujets tels que la justice, la lutte contre la corruption, la criminalité organisée, la traite des êtres humains, le terrorisme, les migrations irrégulières ou encore le blanchiment de capitaux.

L'Union européenne est le premier partenaire commercial, investisseur étranger et donateur d'aide de la Moldavie. Parmi les partenaires de la PEV, ce pays est le premier bénéficiaire per capita de l'aide européenne. Celle-ci vise en particulier à soutenir les réformes de l'administration publique, de l'agriculture, du développement durable, de la gestion des frontières, ainsi que le soutien à la société civile.

En ce qui concerne le contexte politique et le cadre juridique, il faut noter que la Moldavie coopère de façon satisfaisante avec le Conseil de l'Europe depuis son adhésion, le 13 juillet 1995. L'APCE a observé l'ensemble des élections organisées dans ce pays.

Les précédentes élections législatives avaient eu lieu le 30 novembre 2014. Elles avaient permis aux citoyens moldaves de faire leur choix librement, mais la composition politique du parlement monocaméral avait évolué tout au long de la législature. Ainsi, 40 % des députés élus cette année-là avaient changé d'affiliation politique, avec des conséquences sur la majorité parlementaire, mais aussi sur la confiance des citoyens dans leurs dirigeants et leurs institutions. En effet, les élections moldaves se déroulent dans un contexte marqué par un niveau élevé de corruption ; le pays occupe la 122e position sur 180 dans le classement de l'indice de perception de la corruption établi par Transparency International, alors qu'il est le plus pauvre d'Europe.

Ainsi, les élections législatives se sont déroulées dans un climat de grande méfiance, alors que des enquêtes étaient en cours pour faits de corruption et que la Cour constitutionnelle avait, à plusieurs reprises, suspendu de façon temporaire les pouvoirs du président de la République.

En novembre 2018, le parlement moldave avait décidé, d'une part, de reporter les élections législatives au 24 février suivant et, d'autre part, d'organiser le même jour un référendum consultatif sur la réduction du nombre de députés de 101 à 61 et la possibilité de les révoquer. L'APCE n'a observé que les élections législatives, et non le référendum.

La Commission de Venise du Conseil de l'Europe ainsi que l'OSCE ont rendu des avis sur les nombreuses modifications apportées au code électoral moldave. Celles-ci ont établi un système électoral mixte, qui prévoit l'élection de 50 députés sur 101 dans une circonscription nationale à la représentation proportionnelle et des 51 autres au scrutin majoritaire dans des circonscriptions uninominales. La Commission de Venise a exprimé des préoccupations à l'égard de ce système électoral, en considérant que les candidats indépendants se présentant dans les circonscriptions à scrutin majoritaire pourraient, dans un contexte de corruption élevée, être particulièrement perméables aux sollicitations d'hommes d'affaires. En outre, les règles relatives aux seuils minimum de représentation sont particulièrement complexes.

Pour la première fois, 47 bureaux de vote ont été spécifiquement désignés pour les électeurs résidant en Transnistrie, ce territoire moldave situé sur la rive gauche du Dniestr, où la Russie maintient des troupes, notamment la 14e armée, depuis 25 ans. La commission électorale centrale y a mené une campagne d'information encourageant les électeurs à s'inscrire dans les bureaux de vote pour favoriser leur participation.

Par ailleurs, les critères d'établissement des bureaux de vote à l'étranger ont été très critiqués, car ces bureaux auraient été installés sans lien avec le nombre des électeurs inscrits en dehors du pays, lesquels seraient bien plus nombreux que les chiffres officiels. Un manque de transparence sur ce point est donc à déplorer. Par exemple, 42 bureaux de vote étaient prévus en Italie pour 3 000 électeurs, contre 2 bureaux en Espagne pour 12 000 électeurs...

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