Le travail que nous menons nous montre la grande fragilité de l'agriculture face au changement climatique à court terme. L'élevage du Limousin, sous sa forme actuelle, est à trois sècheresses de l'effondrement. Nos sociétés sont en retard sur l'anticipation. On en est au stade où on commence à échafauder des scénarios, mais on n'a pas encore de stratégie.
On manque notamment de données fiables. Concernant l'irrigation par exemple, l'audition de la Compagnie nationale du Rhône, dont je souligne au passage qu'elle est un opérateur de l'eau intégré dont le modèle devrait être généralisé à tous les grands bassins, nous a appris qu'elle n'était pas en mesure de mesurer les prélèvements opérés sur le fleuve à des fins d'irrigation. Il est clair pourtant qu'on va vers des conflits d'usages. Compte tenu des baisses de débits attendues, si on prélève davantage d'eau pour irriguer, il faudra réduire d'autres usages et notamment fermer certaines centrales nucléaires, car on ne pourra plus les refroidir. Nous devons donc décider où est la valeur : est-elle dans l'agriculture, dans l'énergie ? Il faut chercher à éviter un affrontement « lobby agricole contre lobby énergétique », avec les écologistes qui comptent les points et les gens qui se disent « je ne peux plus remplir ma piscine ». Mais quelle est la capacité de l'État, de manière transversale, à proposer des scénarios pour éviter ces situations ?