Intervention de Nathalie Melin

Mission d'information Gratuité des transports collectifs — Réunion du 23 mai 2019 à 11:5
Audition de mmes claire spitzmuller chargée d'études économiques transport nathalie melin chargée d'études développement et M. John-David Nahon chargé des affaires parlementaires et institutionnelles de la ratp

Nathalie Melin, chargée d'études développement :

Les éléments que nous vous présentons sont issus de la dernière enquête globale Transport de la région Île-de-France de 2010 - la nouvelle est en cours d'actualisation, sous le pilotage d'Île-de-France Mobilités. Cette enquête nous permet de connaître la structure des déplacements à l'échelle de l'Île-de-France. Dans le cadre de cet objectif de gratuité, il importe de savoir où se situent les gisements de trafic routier.

À l'échelle de la région d'Île-de-France, en 2010, on comptait environ 41 millions de déplacements quotidiens : 40 % d'entre eux étaient effectués à pied, 40 % en voiture et 20 % en transports en commun. Depuis lors, le recours aux transports en commun a continué à progresser et la part de la voiture a plutôt stagné. La situation est différenciée selon les territoires : dans Paris, la part de marche à pied atteint 60 %, contre 53 % à l'échelle du coeur d'agglomération et moins dans la grande couronne. La part des déplacements en voiture particulière dans Paris intra-muros est aujourd'hui de l'ordre de 17 %. Si je puis m'exprimer ainsi, les transports en commun ont déjà fait le plein à Paris et il va être difficile de conquérir cette part résiduelle des déplacements effectués en voiture.

En revanche, 70 % des déplacements au sein de la région Île-de-France se font de banlieue à banlieue et, en la matière, les transports en commun ont une part modale beaucoup plus faible, puisqu'elle est inférieure à 20 %. Cette situation s'explique par la structure du réseau : un maillage très important du métro dans Paris, complété par le bus ; la grande force des radiales ferroviaires, les RER et les trains offrant des liaisons très efficaces entre Paris et la banlieue.

Envisager la gratuité pour diminuer la part de la voiture de banlieue à banlieue pose la question de la structure de notre réseau. Aujourd'hui, les déplacements en transport en commun imposent un passage par Paris, ce qui augmente les temps de trajet, une solution qui n'est pas très attractive. Qui plus est, les réseaux de Paris intra-muros sont déjà saturés.

Selon nous, il conviendra d'envisager la question de la gratuité lorsque le réseau aura été complété ; c'est tout le sens du projet du Grand Paris Express, avec, notamment la rocade de grand gabarit de la ligne 15. Cette rocade, maillée à l'ensemble des radiales, permettra vraiment de démultiplier les itinéraires possibles et aura un effet de décharge sur les réseaux intra-muros.

En termes de méthodologie, nous avons procédé à une estimation quantitative. Toutefois, la gratuité est une rupture par rapport aux pratiques actuelles. Il est donc compliqué de faire l'estimation d'une rupture, au regard notamment des incertitudes très fortes quant aux reports d'opportunités - alors que je marche dans la rue, je prends le bus qui passe ; aujourd'hui, je prends le bus parce qu'il pleut. Lever la contrainte de l'achat du titre de transport sera de nature à modifier les reports d'opportunités. Il est donc difficile d'appréhender l'ampleur de tous les reports sur les déplacements courts ou d'opportunité.

Aussi, il nous a paru intéressant de croiser les approches pour identifier les effets de la gratuité. Dans le cadre du groupe d'experts présidé par Jacques Rapoport, nous avons fourni une approche à partir d'outils de modélisation alors que l'approche d'Île-de-France Mobilités se fonde sur une analyse très fine de l'enquête globale Transport et du potentiel de déplacements reportables. Nos deux approches diffèrent surtout sur le segment des déplacements. L'ensemble des déplacements qui se font aujourd'hui à pied et pourraient l'être en transport en commun pour gagner du temps sont reportables. Dans les outils de modélisation à l'échelle régionale, ces déplacements très courts ne sont pas forcément bien pris en compte. En revanche, les deux estimations se rejoignent sur les effets portant sur les modes plus structurants.

Gardons à l'esprit que les déplacements courts impacteront très fortement le réseau de bus.

Pour procéder à notre analyse, nous avons eu recours à deux outils de prévision de trafic.

Premièrement, l'outil Global vise à évaluer les projets d'extension des réseaux, donc la création de nouvelles lignes de tramway, les prolongements des lignes de métro. Il vise l'heure de pointe du matin d'un jour ouvrable, l'enjeu étant le dimensionnement des réseaux. On peut se projeter aux horizons 2024 et 2030 en incluant les nouvelles lignes de transport, les évolutions urbaines.

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