Monsieur le ministre, j’ai cru comprendre que Netflix venait de s’offrir les droits de deux films primés au Festival de Cannes. En acquérant les droits de ces longs-métrages, cette plateforme de vidéo à la demande contourne les règles du Festival, qui a pour principe de refuser les projets n’ayant pas vocation à être diffusés en salle.
Ce contexte témoigne de la montée en puissance des plateformes de vidéo à la demande : Netflix, Amazon Prime, Disney Fox et, bientôt, Apple. La directive européenne « services de médias audiovisuels », adoptée en 2018, a établi la possibilité d’imposer à ces plateformes étrangères des obligations d’investissement dans des œuvres européennes et françaises, sur le fondement de leur chiffre d’affaires réalisé en France. Au regard du décret du 12 novembre 2010 relatif aux services de médias audiovisuels à la demande, qu’il conviendrait de réécrire, Netflix, Amazon Prime et Disney Fox devraient consacrer entre 12 % et 15 % de leur chiffre d’affaires annuel réalisé en France à la production d’œuvres cinématographiques et audiovisuelles européennes et françaises.
Pour Netflix, cela représenterait un investissement annuel compris entre 55 millions et 90 millions d’euros dans des œuvres européennes, et entre 40 millions et 75 millions d’euros dans des œuvres françaises. Ces chiffres sont élevés et pleins de promesses pour le secteur.
Compte tenu de la différence de plus en plus ténue entre les chaînes de télévision et les plateformes de vidéo à la demande avec abonnement, il serait judicieux, de mon point de vue, de mettre en place deux réformes. La première consisterait à unifier les taux d’investissement dans les œuvres à partir d’un certain chiffre d’affaires, sans distinction entre services linéaires et non linéaires ; la seconde consisterait à imposer qu’une part significative de cet investissement se fasse en préachat, c’est-à-dire au moment de la constitution du budget de l’œuvre. Ces propositions peuvent-elles retenir votre attention, monsieur le ministre ?
Par ailleurs, entendez-vous mettre fin à la différence existant entre les investissements réalisés dans le cinéma et ceux qui sont faits dans l’audiovisuel ? Aujourd’hui, pour les chaînes historiques, ces investissements sont clairement différenciés. Dans le décret précité, il n’est pas distingué, au titre de l’obligation d’investissement, entre cinéma et audiovisuel, et il est précisé que tout dépend de la fréquence de visionnage des œuvres considérées. Il ne me paraît pas possible que les obligations d’investissement des plateformes et des chaînes historiques demeurent durablement différentes.