Intervention de Gérald Darmanin

Réunion du 29 mai 2019 à 14h30
La lutte contre la fraude à la tva transfrontalière — Débat interactif

Gérald Darmanin :

Monsieur le sénateur, je partage vos constats, mais pas votre proposition de moyens supplémentaires pour la justice.

Nous en avons débattu lors de la suppression du verrou de Bercy : nous constatons parfois – nous pouvons le regretter – que les magistrats, qui sont indépendants et dont il ne m’appartient pas de juger les décisions, infligent peu de condamnations, notamment à des peines de prison ferme, aux auteurs de délits proprement fiscaux, sans lien avec le crime organisé, la délinquance de droit commun ou les trafics.

Cela tient-il aux services instructeurs, en particulier au fait que la brigade nationale de répression de la délinquance fiscale, la BNRDF, ou les polices judiciaires ne sont pas strictement expertes en fiscalité ? Il s’agit en effet d’une matière très compliquée, qui est l’apanage de spécialistes. C’est la raison pour laquelle nous avons créé la police fiscale, une action dont nous tirerons les conséquences. Le service d’enquêtes douanières a d’ailleurs obtenu de très beaux résultats dans des affaires qui ont débouché sur des condamnations par la justice, parce que, entre douaniers et agents du fisc, des spécialistes y avaient travaillé.

Je ne suis donc pas certain que la discussion que nous avons au sujet de la justice se résume à un manque de moyens, en tout cas humains.

En revanche, nous devons nous poser la question des moyens juridiques : nous proposerons peut-être dans le cadre du prochain projet de loi de finances que les agents du fisc puissent faire des coups d’achat sous pseudonyme, afin d’identifier ceux qui ne payent pas la TVA, comme le font les douaniers lorsqu’ils luttent, par exemple, contre le tabac illicite. On peut ajouter trois cents agents du fisc dans les services judiciaires, si vous le souhaitez, mais s’ils n’ont pas cette faculté, ils rencontreront des difficultés.

L’un de nos grands problèmes était l’impossibilité dans laquelle nous nous trouvions de sanctionner les plateformes complices de ceux qui ne payaient pas la TVA. Vous avez rendu cette sanction possible en adoptant la loi relative à la lutte contre la fraude, acceptant l’idée que nous puissions sanctionner les intermédiaires, comme les conseils véreux. Nous le ferons pour les plateformes qui ne jouent pas le jeu. Là encore, on peut ajouter des moyens humains, mais sans les moyens juridiques de condamner, cela ne servirait pas à grand-chose.

Enfin, il est très important, pour lutter contre la fraude à la TVA, de repérer tout de suite les faux numéros d’entreprises, afin de bloquer très vite les montants de fraude. Ce n’est pas simplement une question de moyens physiques, il nous faut les moyens matériels et informatiques pour détecter et bloquer très rapidement ces numéros délictueux.

Le sujet nécessite donc, bien sûr, un peu de moyens humains, mais aussi beaucoup de moyens juridiques, que nous proposons de mettre en place dans le prochain projet de loi de finances, lequel aura une dimension de lutte contre la fraude.

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