Intervention de Michel Forissier

Réunion du 29 mai 2019 à 14h30
Le cannabis un enjeu majeur de santé publique — Débat organisé à la demande du groupe communiste républicain citoyen et écologiste

Photo de Michel ForissierMichel Forissier :

Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, l’usage thérapeutique du cannabis refait débat depuis l’annonce du 13 décembre 2018 du comité d’experts de l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé, qui reconnaît pertinent de l’autoriser dans certaines situations cliniques, pour certains patients, selon des modalités précises à définir.

Il s’agit là d’un premier avis d’un premier groupement d’experts. Il reste plusieurs mois de travail de la part des professionnels de la santé avant une prise de décision politique, puisqu’il s’agit d’un enjeu majeur de santé publique.

La question du cannabis médical suscite beaucoup de passions, en France et partout dans le monde. Le sujet est évidemment sérieux : donner un cadre légal à la prescription médicale d’une drogue, pour pouvoir l’utiliser comme médicament antidouleur.

Les 4 février et 2 avril 2015, l’occasion nous a été donnée d’examiner une proposition de loi autorisant l’usage contrôlé du cannabis, présentée par Mme Esther Benbassa. Les trois articles de ce texte ayant été successivement supprimés par notre assemblée, nous n’avons même pas eu à procéder à un vote sur l’ensemble.

Mais, aujourd’hui, nous débattons d’un autre sujet : l’usage thérapeutique du cannabis dans un cadre strictement clinique, excluant naturellement les motivations auto-thérapeutiques ou récréatives.

Ce recours est encore controversé en raison des effets indésirables induits par cette substance.

Effectivement, l’analyse de l’intérêt thérapeutique du cannabis, dont l’usage n’est pas sans risque sur la santé du patient, doit être rattachée à une information scientifique exhaustive et faire l’unanimité des professionnels de santé. Ce travail d’expertise permettra de tirer des conclusions communes, lesquelles conduiront, dans un deuxième temps, à une phase d’expérimentation puis, dans un troisième temps, à une décision politique finale. Une nouvelle réunion du comité d’experts aura lieu le 26 juin.

Tout reste donc encore à préciser, me semble-t-il, avant d’ouvrir le recours à l’usage thérapeutique du cannabis.

Autrement dit, l’avenir du cannabis en France est encore incertain, même dans le circuit médical. De nombreux points sont à l’étude, comme la posologie adaptée à chaque patient, la formule pharmaceutique, le lieu de délivrance – pharmacie, hôpital, etc. Les experts poursuivent le travail, avant que n’intervienne la phase d’expérimentation.

Pour le moment, une trentaine de pays dans le monde et de nombreux États américains autorisent le cannabis thérapeutique. Parmi eux figurent le Canada, certains États de l’Union européenne, ainsi que la Suisse, la Norvège, Israël et la Turquie.

Le législateur est le garant de l’intérêt général, rappelons-le. Il ne remplirait pas sa mission en repoussant les limites d’une société dont le besoin fondamental est celui du repère.

Il ne nous appartient pas de minimiser ou de nier les incidences sur la santé de l’usage de la drogue. Le cannabis, soyons clairs, constitue un vrai enjeu de santé publique, car il n’y a pas de consommation de drogue sans effets nocifs sur la santé et le psychisme.

Vous l’aurez compris, monsieur le secrétaire d’État, je tiens à attirer l’attention sur la nécessaire vigilance des responsables politiques. Ces derniers doivent demander un bilan éclairé de l’usage thérapeutique du cannabis.

Les avancées scientifiques sont remarquables ; il y a une volonté forte de prendre en charge la douleur des patients, de soulager certains symptômes ou certains effets secondaires des traitements. À ce stade, les études sont encore lacunaires, mais les experts de la santé en France œuvrent pour examiner l’ensemble des modalités.

Ce qui compte à mes yeux, monsieur le secrétaire d’État, c’est le bénéfice pour le patient, en prenant bien entendu en considération les effets indésirables à court, moyen et long termes. J’entends par là que la situation d’une personne en fin de vie n’est pas la même que celle d’un jeune enfant ou d’un adolescent en construction.

Telles sont les réflexions que je tenais à apporter au débat.

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