Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, je remercie tout d’abord le groupe CRCE d’être à l’origine de ce débat posant la question du cannabis, comme enjeu majeur de santé publique. Cette démarche, utile, opportune, mérite d’être soutenue.
Tandis que nous parlons de l’usage thérapeutique du cannabis avec moult précautions et garde-fous, je veux partager avec vous mon regard d’élu des Français de l’étranger.
Voilà quelques jours, j’étais au Luxembourg, qui va devenir le premier pays européen à légaliser la culture, le commerce et la consommation du cannabis.
Précisons que l’achat de 30 grammes sera permis aux résidents majeurs, ce qui exclut les frontaliers – dommage pour certains – et, donc, le tourisme de la drogue. La consommation devra se faire en privé, c’est-à-dire ni dans la rue ni au travail. Une dépénalisation de la consommation est même envisagée pour les mineurs.
La réforme est portée par le ministre de la santé, Étienne Schneider, et celui de la justice, Félix Braz.
Rappelons qu’en octobre 2018 le Canada autorisait la vente et la consommation de cette drogue douce à des fins récréatives, emboîtant le pas à l’Uruguay et à la moitié, déjà, des États américains. Tous ont compris que poursuivre une politique de répression, c’était courir après une chimère, coûteuse et inutile, comme nous le faisons ici.
La consommation de cannabis en France est au plus haut niveau depuis vingt-cinq ans ! Plus d’un jeune sur quatre déclare avoir fumé du cannabis, comme le révélait, en novembre dernier, l’Observatoire français des drogues et des toxicomanies.
Cela pourrait étonner, mais les pays ayant légalisé ont placé l’enjeu de santé publique sur la qualité des produits. Oui, mes chers collègues, la qualité ! Au marché noir, il se vend effectivement n’importe quoi, et c’est sans compter les dangers psychiques et physiques qu’il y a à pousser les consommateurs vers ces réseaux criminels.
Interdire le cannabis n’empêche pas les gens de fumer ; cela les empêche juste de respecter la loi !
Tant que le cannabis sera interdit, il fera la fortune des narcotrafiquants, qui s’incarnent parfois jusque dans des États, à l’image de ce que l’on observe au Venezuela.
Je veux saluer le président Christian Cambon pour avoir invité ce matin M. Lorent Saleh, co-récipiendaire du prix Sakharov 2017 pour la liberté de l’esprit, à s’exprimer devant la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées. Emprisonné et torturé pendant plus de quatre ans au Venezuela, M. Saleh a témoigné avec force des atteintes quotidiennes aux droits de l’homme dans son pays.
Les témoignages, les ouvrages se multiplient pour mettre en lumière les agissements d’un régime criminel, organisant et exécutant le trafic de drogue à grande échelle, à l’aide des officiers de son armée. Je veux rendre hommage à Juan Guaido, Président de la République par intérim du Venezuela, et à tous ceux qui combattent avec courage à ses côtés pour libérer leur pays d’un système oppresseur.
Une fois encore, mes chers collègues, mon intention est de partager avec vous le regard extérieur que peut avoir un élu comme moi. D’un côté, nous avons sous les yeux un régime qui vit du trafic de stupéfiants et dont les proches viennent parfois se mettre à l’abri dans nos pays, avec le produit de leurs crimes. De l’autre, j’observe que nous poursuivons une personne qui, pour soulager sa douleur, fumera un peu de cannabis. Cherchez l’erreur !