Intervention de Pascal Prunet

Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques — Réunion du 23 mai 2019 à 9h40
Sciences et technologies en appui de la restauration de notre-dame de paris — Tables rondes

Pascal Prunet, architecte en chef des monuments historiques, membre de l :

En ce qui me concerne, j'ai été appelé très peu de temps après l'incendie pour participer à la constitution de l'équipe de maîtrise d'oeuvre, qui a été mise en place par Philippe Villeneuve et la direction générale du patrimoine du ministère de la culture.

Dans le cadre de l'urgence « impérieuse », dont je parlais tout à l'heure, nous sommes dans des modalités de fonctionnement spécifiques qui s'extraient en partie des procédures habituelles de consultation et de mise en concurrence, lorsque nous avons besoin de solliciter certaines compétences.

Notre équipe comprend par exemple deux ingénieurs complémentaires : l'un, jeune polytechnicien, vient de soutenir une thèse sur la stabilité des voûtes, l'autre, qui est italien, a une compétence reconnue sur les sujets complexes qui nous occupent. Nous avons aussi fait appel à l'entreprise de géomètres qui a réalisé une grande partie des relevés de la cathédrale ; cette entreprise travaille avec l'un de nos architectes, qui en 2014 a procédé à un relevé extrêmement précis de la charpente de la cathédrale, ses pièces de bois, le mode d'assemblage, etc. Le scan qui avait été réalisé avant l'incendie par ces géomètres avait une précision d'environ 40 points par centimètre carré, soit des milliards de points au total ; nous avons donc une connaissance quasi parfaite de la charpente et, en regardant le film qui a été réalisé à partir de ce travail, on a parfois l'impression de voir le fil du bois... Cette connaissance très fine, et récente, s'ajoute aux dessins de Viollet-le-Duc qui documentent bien cette zone du monument. Parmi les quatre architectes en chef de notre équipe, l'une est particulièrement chargée des liens et de la communication avec les acteurs extérieurs.

Nous travaillons aussi avec l'ensemble des intervenants extérieurs qui peuvent nous apporter des compétences spécialisées, notamment en ce qui concerne le comportement des différents matériaux. Je pense naturellement au laboratoire de recherche des monuments historiques - Aline Magnien, sa directrice, vous en parlera tout à l'heure. Nous procédons déjà ainsi pour le tri de l'ensemble des décombres, dont le recueil permet de comprendre l'altération globale des structures, que celle-ci soit due au temps, au feu ou à l'eau utilisée pour éteindre l'incendie. Des pierres datent de 1170, de 1220 ou du XVIIIe siècle, la voûte ayant été reconstruite par l'architecte Boffrand, puis de nouveau par Viollet-le-Duc, lorsqu'il a fait monter la flèche depuis le sol de la cathédrale.

L'histoire de ce bâtiment est très riche et l'urgence ne doit pas nous empêcher de poser les diagnostics qui seront nécessaires pour la reconstruction. Nous devons notamment connaître les différentes altérations de la structure et évaluer les conséquences de l'incendie, et de l'exposition, d'une part, aux températures extrêmes auxquelles les pierres ont été soumises, d'autre part, à l'eau déversée par les pompiers - il faut par exemple prendre en compte la porosité des pierres. Il nous faut aussi évaluer la capacité portante de la structure et la manière dont les charges sont supportées. Au-delà de la structure, nous devons travailler sur la conservation des épidermes.

Par la suite, il faudra chercher des pierres de substitution et nous ferons certainement appel au BRGM, le bureau de recherches géologiques et minières.

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