Intervention de Dominique Vérien

Mission commune d'information Répression infractions sexuelles sur mineurs — Réunion du 28 mai 2019 à 14h45
Examen et adoption du rapport de la mission commune d'information

Photo de Dominique VérienDominique Vérien, rapporteure :

En fait, l'arsenal législatif existe mais il n'est pas utilisé. Trop souvent, aucune plainte n'est déposée, ou bien on aboutit à un non-lieu, ou à un classement sans suite. Le vrai problème est la prise en compte de la parole des victimes - qu'il s'agisse de femmes ou d'enfants. Résultat : ces faits sont banalisés, alors qu'ils détruisent totalement des personnes, ce qui a un coût terrible, qui se répercute dans la santé publique. Les cours criminelles départementales devraient permettre un traitement plus rapide des affaires de crimes sexuels. La police et la gendarmerie doivent aussi être mieux formées à la détection et à l'écoute des victimes, afin que davantage de coupables soient poursuivis. Aujourd'hui, moins de 1 % des auteurs de viols sont condamnés !

Comment s'assurer que l'arsenal législatif existant soit mobilisé sinon en communiquant, en libérant la parole ? L'objectif doit être de faire changer la peur de camp et de préserver non pas l'institution, mais l'enfant. Le problème se pose vraiment en termes de changement de perception : il faut faire évoluer le regard, sur ce sujet, en communiquant, en formant, en informant.

Le cas de l'Église est-il spécifique ? Avant de commencer les auditions, j'avais tendance à penser qu'un enfant violé est un enfant violé : qu'il soit violé par un instituteur, un professeur d'éducation physique ou un prêtre, c'est la même chose. Mais non ! C'est tout à fait différent : les modes d'emprise et les caractéristiques du violeur ne sont pas les mêmes. Les psychiatres que nous avons entendus nous ont dit que tous ceux qui agressent des enfants ne sont pas forcément des pédophiles, et que, inversement, un pédophile ne cherche pas forcément à dominer les enfants.

Que nous a dit l'évêque de Strasbourg ? Qu'il y a un problème systémique dans l'Église. Les criminels n'y sont pas les mêmes, et les victimes pas totalement les mêmes non plus, qu'au sein des autres institutions - l'interdit de la sexualité y est probablement pour quelque chose. Autrement dit, il existe plusieurs types de violences, et plusieurs types d'agresseurs, sachant, par ailleurs, que 85 % des enfants sont violés dans un cadre de confiance, et en particulier dans le cadre familial. Pour apprendre aux enfants à dire non, il faut leur apprendre à se méfier aussi, à la fête de Pâques, de tonton Jean, qui est statistiquement beaucoup plus dangereux que l'inconnu croisé dans la rue.

Il faut protéger tous les enfants, donc, mais les réponses à apporter ne sont pas les mêmes selon qu'on veut les apporter dans l'Église ou ailleurs. Et le vrai sujet, pour l'Église, est celui du recrutement et du profil psychologique des recrutés.

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