Sur l'île de Ré, le PPRL est extrêmement poussé. Toutes les initiatives amenant des architectures nouvelles ont été refusées. L'État réagit fort logiquement en raisonnant en termes de responsabilité et de sécurité. Cela peut se comprendre. C'est une question de modélisation. Parfois, le fait de prévoir des brèches dans la digue tous les 300 mètres amène plus d'eau en cas de submersion que si la digue n'existait pas ! On a parfois des surprises. Allez expliquer cela à la population !
Avec Dominique Bussereau, il y a une dizaine d'années, nous avions rencontré un ministre de l'environnement qui nous avait conseillé de pratiquer le repli stratégique sur l'île de Ré. Je lui ai expliqué que sur une île, ce n'était pas simple. C'est toujours un peu la même histoire, toutes politiques confondues !
Le problème financier est évident. Nous sommes quelque peu spécialistes dans le domaine des digues et avons lancé un programme de 300 millions d'euros. Les experts néerlandais estiment que c'est trop peu, que nous n'allons pas au bout de nos responsabilités, que nous n'avons toujours pas choisi face au risque et que nous ne cherchons qu'à établir des responsabilités.
Le problème de confiance est tout aussi fondamental. Quand nous voulons ajouter un étage à un immeuble désaffecté, les services de l'État nous soupçonnent de vouloir faire de l'immobilier et de construire derrière la digue. Nous avons démontré que nous voulions nous sécuriser, mais on nous a rétorqué que nous étions des élus et que nous avions des arrière-pensées immobilières !
La décentralisation du risque ne se fait donc pas en matière d'aménagement du territoire. Tout ceci fait qu'on n'arrive pas à accéder à la modernité. Les Anciens le savaient bien : on pouvait prendre l'eau, mais l'eau venait, passait et repartait. On ne l'admet plus. On ne peut parvenir à la résilience. Sur qui la tempête ou les inondations vont-elles tomber ? Pour un élu, c'est extrêmement compliqué.
Quant aux Architectes des bâtiments de France, je ne parle même pas de modernité, de nouveaux volumes, de nouvelles maisons, de nouveaux pilotis. C'est très complexe. On est un peu conservateur en matière de risque.