Intervention de Alain Schmitz

Commission mixte paritaire — Réunion du 4 juin 2019 à 17h00
Commission mixte paritaire sur le projet de loi pour la conservation et la restauration de la cathédrale notre-dame de paris et instituant une souscription nationale à cet effet

Photo de Alain SchmitzAlain Schmitz, sénateur, rapporteur pour le Sénat :

Dans le temps qui nous était imparti, nous avons réalisé une quinzaine d'auditions pour comprendre les enjeux associés à la restauration de Notre-Dame et identifier les besoins de ce chantier exceptionnel. Outre le ministre de la culture, nous avons notamment entendu de nombreux acteurs concernés, tels que les trois fondations habilitées par le projet de loi à participer à la collecte, le Centre des monuments nationaux, en tant qu'organisme collecteur, les maîtres d'ouvrage, maîtres d'oeuvre, les parties prenantes au projet, en particulier le Diocèse de Paris et la Ville de Paris, l'UNESCO - la cathédrale est inscrite sur la liste du patrimoine mondial - ainsi que des experts en matière de conservation du patrimoine, sans oublier les associations de sauvegarde du patrimoine siégeant au sein de la Commission nationale du patrimoine et de l'architecture.

J'ajoute que certains de nos collègues, membres de l'Office parlementaire de l'évaluation des choix scientifiques et technologiques, ont également assisté à la table ronde organisée sur l'apport des sciences et des technologies à la restauration de la cathédrale.

Ces auditions nous ont conduits à apporter des modifications significatives au texte que vous nous aviez transmis.

Nous avons d'abord souhaité sécuriser le cadre légal offert aux donateurs, afin que l'élan de générosité puisse se poursuivre. Nous avons ainsi adopté plusieurs amendements tendant à faire démarrer la souscription à la date même du sinistre, à garantir la prise en compte de la volonté des donateurs et à étaler le reversement du produit de la souscription en fonction de l'avancée des travaux.

Nous avons surtout cherché à garantir la protection de notre patrimoine matériel et la place du ministère de la culture sur ce chantier, deux conditions sine qua non pour assurer l'exemplarité du chantier de Notre-Dame.

Ce souci nous a conduits, en particulier, à supprimer l'article 9 du projet de loi compte tenu du manque de précision sur la nature exacte et l'ampleur des dérogations envisagées. Nous avons estimé que ces dérogations étaient inutiles si elles avaient pour objectif de gagner du temps sur les démarches administratives. Les demandes d'autorisation peuvent en effet être traitées en priorité moyennant des instructions administratives. Ces dérogations pourraient en outre se révéler dangereuses si elles avaient pour objectif de permettre à l'État de s'affranchir de règles que tous les autres propriétaires doivent mettre en oeuvre lorsqu'ils conduisent des projets de restauration. À nos yeux, l'adoption de cet article met à mal l'exemplarité du chantier de Notre-Dame, défavorise nos petites entreprises de restauration du patrimoine, jette le discrédit sur l'ensemble de notre législation et constitue un précédent désastreux pour l'avenir.

En revanche, nous ne sommes pas opposés à la création d'un établissement public pour assurer la maîtrise d'ouvrage du chantier. Dans un souci d'améliorer l'intelligibilité de la loi, nous avons même décidé de mettre fin à l'ambiguïté entretenue par les dispositions du texte en confiant clairement cette responsabilité au futur établissement public. Nous avons néanmoins pris le soin d'en encadrer davantage le fonctionnement en précisant qu'il s'agirait d'un établissement public à caractère administratif placé sous la tutelle du ministère de la culture et qu'il serait dissous dès l'achèvement des travaux. Nous avons enfin précisé que la maîtrise d'oeuvre du chantier resterait conduite sous l'autorité de l'architecte en chef des monuments historiques responsable de la cathédrale.

Nous avons également modifié le texte pour introduire une référence aux engagements internationaux souscrits par la France dans le domaine du patrimoine. Nous considérons que les travaux doivent préserver l'authenticité et l'intégrité du bien si nous ne voulons pas prendre le risque de porter atteinte à sa valeur universelle exceptionnelle et de perdre le bénéfice du classement au titre de l'UNESCO, qui ne manquerait pas d'avoir des effets sur l'attractivité de Paris et la crédibilité de la France en matière de protection du patrimoine. C'est également ce qui nous a conduits à demander que la restauration de Notre-Dame permette de restituer ce monument dans son dernier état visuel connu avant le sinistre.

Malgré nos désaccords politiques, la défense du patrimoine devrait pouvoir nous rassembler. C'est bien le patrimoine, en tout cas, que le Sénat a eu à coeur de défendre à l'occasion de ses travaux.

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