Intervention de Marija Pejcinovic-Buric

Commission des affaires européennes — Réunion du 23 mai 2019 à 8:5
Institutions européennes — Audition de Mme Marija Pejcinovic-buric vice-première ministre de la république de croatie ministre des affaires étrangères et européennes

Marija Pejcinovic-Buric, vice-Première ministre de la République de Croatie :

C'est un grand honneur d'être parmi vous aujourd'hui. La Croatie, plus jeune membre de l'Union européenne, aura un grand rôle à jouer dans quelques mois. Merci d'avoir évoqué plusieurs éléments importants pour la Croatie, notamment notre appartenance à l'OTAN, dont nous célébrons le dixième anniversaire. Elle offre une stabilité très importante à un pays qui a récemment connu la guerre. Il faut imaginer la défense européenne, non pas en concurrence, mais en complémentarité avec l'OTAN.

Nos deux pays entretiennent des relations bilatérales de très haute qualité depuis toujours. Merci d'avoir mentionné l'Institut français de Zagreb, dont nous sommes très fiers. Nous avions adopté, en 2010, un cadre stratégique pour notre coopération ; nous en sommes au troisième plan d'action. Cet après-midi, j'en dresserai un bilan avec M. Le Drian ; nous examinerons aussi comment faire progresser encore ces relations.

Nos rapports commerciaux sont, eux aussi, en hausse, notamment grâce à l'adhésion de la Croatie à l'Union européenne. Il y a encore à faire. Vous avez mentionné les rapports avec la Chine et les « nouvelles routes de la soie », mais nous sommes aussi ouverts aux investissements français !

Notre dialogue politique est lui aussi très développé. Notre Premier ministre et le Président Macron se sont rencontrés l'an dernier ; un projet de visite de ce dernier en Croatie est à l'étude, si possible avant le début de la présidence croate de l'Union.

Nous nous préparons à cette première présidence ; nous la voyons comme une occasion de développer notre intégration, qui n'est pas encore achevée. Deux volets étaient très importants au cours des négociations d'adhésion : l'espace Schengen et la zone euro. Nous nous sommes engagés à les rejoindre, mais il nous faut remplir tous les critères.

Concernant l'espace Schengen, nous sommes presque à la fin de ce grand exercice. La Croatie a la plus longue frontière externe continentale de l'Union européenne ; la frontière avec la Bosnie-Herzégovine fait à elle seule plus de 1 000 kilomètres. Si on ajoute celle avec la Serbie, cela représente une frontière plus longue que celle entre la Finlande et la Russie. La garde de notre frontière est assurée par 6 500 policiers ; l'agence Frontex est déjà présente à Zadar pour sa surveillance aérienne. Les flux migratoires provenant de l'est de la Méditerranée passent par la Croatie. Notre frontière avec la Bosnie-Herzégovine est la plus fragile. Il est dans l'intérêt de tous que nous adhérions le plus vite possible à l'espace Schengen.

Quant à l'euro, nous avons commencé notre travail. Nous enverrons dans les prochains jours une lettre à la Banque centrale européenne pour signaler notre volonté d'adhérer au second mécanisme de taux de change européen (MCE II), où il faut rester quelques années avant d'adopter l'euro. Nous ne nous imposons pas de délais, mais notre ambition serait de rejoindre la zone euro dans quatre ans, même si déjà plus de 70 % de nos échanges se font avec la zone euro. Nous voulons donc remplir au plus vite tous les critères. C'est déjà le cas pour le taux d'inflation, mais nous devons encore baisser notre dette publique ; nous nous y appliquons chaque année.

Le cadre financier pluriannuel sera à coup sûr l'un des grands thèmes de notre présidence de l'Union. Il faudra voir comment l'appréhendera le nouveau Parlement européen, mais il nous reviendra très probablement d'achever les négociations. Le Brexit sera sans doute encore un sujet important pendant notre présidence.

Nous souhaitons également accomplir quelques pas en avant dans le domaine de la politique européenne de sécurité, très importante pour les citoyens. Il faut également travailler sur la politique d'asile. Nous voulons aussi agir pour la croissance et la numérisation de l'économie.

Enfin, nous estimons qu'il faut en faire plus dans le domaine de l'action extérieure de l'Union européenne. La Croatie est dans une région encore instable, comprenant plusieurs États qui, quoiqu'entourés de pays membres de l'Union, ne doivent pas être exclus du projet européen. Il faut être très prudent et encourager ces pays à continuer sur la voie des transformations. Les outils que nous avons utilisés pour notre adhésion sont les mêmes dont ils ont besoin pour leur transition. Si l'on ne fait rien, on laissera le champ libre à d'autres acteurs puissants. L'élargissement n'est pas un thème populaire en ce moment, mais il faut persévérer dans cette direction. Il ne faut pas perdre l'espoir !

Nous organiserons un sommet avec les pays des Balkans occidentaux durant notre présidence. Cela revêt aussi une importance symbolique. Vingt ans auparavant, en 2000, le Président Chirac a participé en Croatie au premier sommet européen en dehors de l'Union européenne ; c'est à cette occasion que la Croatie a entamé son chemin vers l'intégration européenne. Un nouveau sommet de Zagreb verra la Croatie, devenue membre de l'Union, offrir des moyens d'avancer aux pays qui sont encore en dehors. Il faut une approche politique de haut niveau pour leur montrer qu'ils ne sont pas oubliés, même s'il reste beaucoup à faire.

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