Intervention de Alain Milon

Réunion du 6 juin 2019 à 10h45
Organisation et transformation du système de santé — Article 8, amendements 356 311 243

Photo de Alain MilonAlain Milon :

J’ai peur de décevoir mes collègues. La commission est en effet défavorable à l’ensemble de ces amendements, même s’ils soulèvent des questions importantes, dont nous avons déjà parlé : quelles doivent être les missions des hôpitaux de proximité ? Ont-ils vocation à proposer l’ensemble des services hospitaliers ?

J’entends tout à fait l’exigence de proximité dans l’accès aux soins ; ces hôpitaux doivent y répondre. Mais c’est en réalité à une double exigence – l’accessibilité, d’une part, la qualité et la sécurité, d’autre part – qu’il nous faut répondre ; la proximité ne saurait être le seul critère. Or il me semble que la rénovation de notre modèle doit être l’occasion de repenser la structuration de l’offre de soins hospitaliers à l’échelle des territoires selon une logique de complémentarité. Il ne faut pas voir dans cette évolution qu’un risque de déclassement pour certains établissements : nous souhaitons aussi que des établissements de santé qui rendent un service de proximité puissent monter en gamme et soient consolidés dans leurs missions en devenant hôpitaux de proximité.

Les amendements n° 356 rectifié et 311 rectifié vont plus loin que le modèle actuel, puisqu’ils visent à imposer dans ces futurs hôpitaux de proximité la présence de services de chirurgie et de maternité, voire d’un service d’urgences ou de SSR. Ces exigences conduiraient concrètement à ce que les 243 établissements qui relèvent aujourd’hui de ce statut le perdent demain, car nous savons bien que nous ne pouvons maintenir des plateaux techniques poussés, où seraient présents des anesthésistes en nombre suffisant, dans tous les établissements de santé. Il me semble que l’évolution que vous proposez se ferait en définitive au détriment d’un grand nombre d’établissements, qui perdraient un mode de financement plus adapté à leur rôle de service public de proximité.

Les amendements n° 774 rectifié et 775 rectifié sont en partie satisfaits, car les activités de chirurgie seront possibles par dérogation – le texte le prévoit explicitement. Si nous rendons toutes les activités possibles, même de manière optionnelle, le statut dont nous discutons finira par n’avoir plus rien d’un statut particulier, et les établissements concernés ne seront plus légitimes à bénéficier d’un mode de financement dérogatoire.

Quant à l’amendement n° 614 rectifié, qui a été retiré, il était satisfait par le texte.

Concernant l’amendement n° 719 rectifié, la commission considère qu’il appartiendra à la Haute Autorité de santé de déterminer quels sont les actes de chirurgie qui pourront être concernés par cette dérogation. Je ne pense pas que le type d’anesthésie soit le critère de distinction le plus pertinent, même si c’est, me semble-t-il, l’esprit du texte que de viser des actes plus standardisés, les opérations de la cataracte par exemple.

Pour toutes ces raisons, je demande aux auteurs de ces amendements de bien vouloir les retirer ; à défaut, l’avis de la commission sera défavorable.

Je le répète, la médecine et la chirurgie évoluent. Nous avons davantage intérêt, dans les territoires, à faire de la prévention. Je pense au sport – cela fera sans doute plaisir à M. Savin – ou à la nutrition, avec les questions, par exemple, qui ont trait à la consommation de boissons alcoolisées ou sucrées. Ces actions de prévention feront davantage pour la santé de l’ensemble de la population qu’un hôpital de proximité, dont la vocation est plutôt de soigner des gens déjà malades.

Je conclurai en répétant ce que j’avais dit en 2016 devant Mme Touraine, suscitant à l’époque beaucoup de chahut dans l’hémicycle : on ne peut pas mettre de plateau technique à chaque coin de rue ; on ne peut pas mettre des médecins ultraspécialisés à chaque coin de rue.

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