Je suis du même avis que M. le rapporteur, mais je souhaite repréciser les choses et vous donner des informations qui nous permettront de raisonner sur les mêmes bases.
Certains de ces amendements visent à rendre obligatoire le maintien d’un service d’urgences dans ces hôpitaux. Aujourd’hui, pour maintenir une liste de garde 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7, que ce soit dans un service d’urgences ou dans une maternité, il faut fonctionner avec huit professionnels à temps plein. Autrement dit, huit urgentistes sont nécessaires pour ouvrir un service d’urgences, sans parler, évidemment, de tous les personnels paramédicaux qui travaillent avec eux. De la même façon, pour maintenir une maternité ouverte, il faut huit obstétriciens, huit anesthésistes, huit infirmiers de bloc opératoire diplômés d’État, ou Ibode, etc. Rendez-vous compte des implications de telles obligations en termes de ressources ! Or ces ressources n’existent tout simplement pas sur le territoire.
Je rappelle que 20 % environ des services d’urgences, en France, fonctionnent avec moins de 15 000 passages par an, c’est-à-dire l’équivalent de deux patients par heure à peu près, soit assez peu d’activité. Pour maintenir ces services, nous avons besoin d’énormément de professionnels ; or un tel besoin ne pourrait être satisfait, loin de là, partout sur le territoire.
Nous avons parlé hier et avant-hier toute la journée de démographie médicale. Ce que nous vivons dans la médecine de ville avec les généralistes, nous le vivons dans la médecine hospitalière : nous n’avons plus d’anesthésistes ; nous n’avons plus assez d’obstétriciens ; nous n’avons plus ou plus assez d’urgentistes – nous attendons qu’ils soient formés. Nous sommes dans une situation de déficit en matière de moyens médicaux.
Voilà pourquoi il faut orienter ces ressources humaines capitales au sein d’un système structuré qui permette d’adresser les patients au bon endroit et de graduer les soins et, donc, d’assurer la qualité partout, sachant que l’on fonctionne parfois, dans certains services d’urgences, avec des listes de garde incomplètement pourvues. Des malades risquent d’arriver en pleine nuit sans personne pour les accueillir, parce que le médecin prévu est tombé malade et qu’il n’y a personne pour le remplacer.
Nous faisons face à un défi. Ce que je vous propose, c’est d’y répondre par une organisation pensée et structurée. Elle n’a pas été pensée par moi seule, mais par des groupes de travail de toutes les parties prenantes – syndicats, fédérations hospitalières, associations de malades –, avec le Haut Conseil pour l’avenir de l’assurance maladie. Le projet de loi que je vous propose est issu de cette concertation.
Les auteurs de ces amendements proposent d’instaurer diverses obligations. Ce que nous vous proposons, nous, c’est un schéma type garantissant que la médecine de proximité soit aussi une médecine de qualité, avec un plateau technique de biologie et de radiologie, ainsi que, de façon optionnelle, un service d’urgences ou un SMUR, en tenant compte des distances et de la géographie.
Veillons à ne pas inscrire dans la loi des engagements que ces hôpitaux ne pourront absolument pas tenir, faute de ressources humaines. S’il s’agissait uniquement d’un problème de moyens financiers, je pense que nous aurions trouvé la solution depuis longtemps.