Intervention de Julien Denormandie

Réunion du 11 juin 2019 à 21h30
Lutte contre l'habitat insalubre ou dangereux — Adoption d'une proposition de loi dans le texte de la commission modifié

Julien Denormandie :

Cela tombe plutôt bien, donc !

En tout cas, ce sont des éléments nouveaux qui seront apportés, susceptibles d’enrichir le texte en améliorant, confortant, étayant, corrigeant certaines mesures.

Par ailleurs, je porte une attention particulière à certaines dispositions du texte, qui me semblent appeler des précisions.

Ainsi, madame le rapporteur, vous orientez vos travaux dans le sens d’une procédure identique pour l’habitat insalubre ou dangereux – une procédure d’expropriation simplifiée –, mais, comme vous l’avez vous-même indiqué, l’application de l’article 40 de la Constitution ne vous a pas permis d’aller au bout de la démarche de simplification des acteurs. La fusion des polices est donc aujourd’hui partielle dans le texte. Or c’est l’un des éléments clés du rapport de Guillaume Vuilletet, dont la mission, je le rappelle, s’inscrit dans le cadre d’une habilitation à légiférer par ordonnances octroyée au Gouvernement par les parlementaires lors de l’examen de la loi ÉLAN.

De même, concernant la possibilité donnée aux associations d’exercer les droits reconnus à la partie civile en les autorisant à saisir la justice, j’ai pour ma part une interrogation de fond : ces associations peuvent-elles agir sans l’accord des personnes vivant dans les habitations concernées ? Cet accord me paraît souhaitable, même si je comprends les raisons pour lesquelles vous avez retenu l’autre option. Effectivement, les personnes vivant sous l’emprise des marchands de sommeil sont vraiment à leur merci et, parfois, il faut pouvoir les accompagner.

L’amélioration apportée à la procédure du permis de louer, en dispensant le bailleur de demander un permis lorsqu’il a déjà obtenu une autorisation moins d’un an auparavant, facilitera véritablement la tâche des collectivités et fluidifiera le marché. C’est une très bonne mesure. Nous aurons des motifs de débats – des amendements ont été déposés sur la question de la durée –, mais cela va vraiment dans le bon sens.

Le rétablissement du principe de gratuité, censuré dans la loi ÉLAN, est également une bonne mesure. Toutefois, je n’étais pas favorable à la transformation de la procédure actuelle d’accord tacite de la collectivité au bout d’un mois de silence en un refus tacite au bout de deux mois de silence ; je suis donc défavorable à l’expérimentation proposée. Vous reconnaîtrez là, mesdames, messieurs les sénateurs, une certaine cohérence dans ma position et il est important d’avoir de la cohérence en politique.

S’agissant de l’obligation de diagnostic pour les copropriétés de plus de quinze ans, si je souscris à l’objectif de prévention, je pense que ce sujet doit être traité dans le cadre de la réforme de la copropriété. Dans la loi ÉLAN, une habilitation à légiférer par ordonnance a été adoptée pour créer un code de la copropriété ; c’est plutôt dans ce texte que la mesure devrait figurer, car nous voulons avoir une approche globale de tous les éléments devant être demandés dans le cadre d’une gestion de copropriété : plans pluriannuels de prévention, d’amélioration, d’investissement, etc.

Enfin, le caractère opérationnel de la réduction de la durée maximale d’habitation d’un immeuble déclaré irrémédiablement insalubre et du délai imparti pour qu’un agent se rende sur place et établisse son rapport, une fois l’administration saisie d’une demande tendant à prescrire des mesures pour faire cesser des situations de danger ou d’insalubrité, n’est pas forcément évident à mes yeux. La mesure est tout à fait louable ; elle va parfaitement dans le bon sens… Mais est-elle applicable sur le terrain ? Ne va-t-on pas aggraver la thrombose du système ?

Ainsi, mesdames, messieurs les sénateurs, j’interviendrai avec beaucoup de conviction sur les différents amendements exposés ce soir. Ce débat, me semble-t-il, dépasse tous les clivages politiques, car il est question de lutter contre ce fléau de l’habitat indigne, qui, ne l’oublions jamais, – et je pense en particulier à l’activité des marchands de sommeil – est en augmentation dans notre pays.

Nous avons, collégialement, la responsabilité de prendre toutes les mesures fortes pour lutter contre ce fléau. Les événements tragiques de Marseille, rappelés à plusieurs reprises, montrent à quel point c’est nécessaire !

Je voudrais donc, une nouvelle fois, vous remercier, souligner que de nombreuses mesures vont dans le bon sens et réitérer mon avis de sagesse. Au-delà de certaines divergences dans nos positions, que j’ai résumées, ce texte peut être renforcé via le travail que j’ai confié à d’autres parlementaires à la suite de l’adoption de la loi ÉLAN.

C’est dans cet état d’esprit que j’aborde la présente discussion. Je suis certain que nos débats seront extrêmement riches et passionnants, et qu’ils serviront à nos concitoyens, notamment aux plus précaires d’entre eux, qui subissent le fléau de l’habitat indigne – une situation aujourd’hui inacceptable dans notre pays !

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