Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, il existe des habitats dangereux, l’actualité de cet automne nous l’a tragiquement rappelé.
Ainsi, quelques mois après la loi ÉLAN, il nous faut déjà aller encore plus loin dans la réflexion sur la qualité de notre parc immobilier national et la prévention de sa dégradation.
L’objet de ce texte est d’élargir l’éventail des dispositifs en matière de prévention. Je remercie son auteur de cette initiative, ainsi que Mme la rapporteur et la commission pour avoir renforcé le texte.
Lors de son premier examen, j’avais, avec mon expérience de maire d’un village de 1 500 habitants, proposé des amendements destinés à traiter de l’habitat individuel, abandonné et dangereux, que les communes de petite taille ne peuvent assumer, faute d’expertise et de budget spécifique.
Il existe en effet dans nos territoires des « verrues », dégradées, abandonnées, dangereuses, qui sont pour les élus des casse-têtes insolubles.
Le maire doit écrire et formaliser des mises en demeure à destination des propriétaires. Mais que faire dans le cas des successions avec plusieurs héritiers qui ne s’accordent pas, des propriétaires qui se séparent en abandonnant les lieux, chacun des protagonistes renvoyant ensuite vers l’autre ? Que faire dans le cas de propriétaires partis pour l’étranger, introuvables, insolvables ou simplement indélicats ?
Les démarches et injonctions restent lettre morte. On ne sait parfois même plus à qui s’adresser. Les mois, les années passent, et le risque existe, car, même si le bien n’est pas habité – et il peut arriver qu’il le soit, les squats n’existant pas qu’en ville –, qui peut empêcher les enfants ou les rôdeurs d’accéder à des bâtisses abandonnées ? Et je ne parle pas du cas où le bâtiment menace la voie publique ou la propriété voisine.
Alors arrive le jour où, la solution étant définitivement enlisée et le risque aggravé, il faut engager une procédure de péril imminent. Voici ce que dit la loi : le maire qui a connaissance de tels faits peut, de sa propre initiative, engager une procédure de péril. Il doit saisir le tribunal administratif afin qu’il désigne un expert chargé, dans les vingt-quatre heures, de constater ou non le péril imminent.
Mais qui paie l’expert ? Ces dépenses, par définition non prévues, sont rédhibitoires pour beaucoup de petites collectivités au budget très contraint.
Si, grâce à l’adoption de l’amendement de ma collègue Sylvie Vermeillet, la DETR doit pouvoir venir en aide aux collectivités pour les travaux, rien n’est prévu pour les frais d’expertise.
J’avais donc proposé, voilà quelques mois, des amendements pour que le conseil d’architecture, d’urbanisme et d’environnement, le CAUE, puisse être l’expert constatant le péril, ou bien que l’ANAH puisse aider financièrement les communes dans la réalisation de ces expertises.
L’article 40 de la Constitution m’a été opposé, bien que, à mon sens, une mission entrant dans le champ de compétences du CAUE ne soit pas une dépense supplémentaire.
Je vous alerte donc, monsieur le ministre, sur le frein technique et financier que constituent les indispensables expertises.
Si mes propositions ne sont pas les bonnes, alors il faut en trouver d’autres. Il serait inadmissible que la lutte contre l’habitat dangereux et la prévention du risque se fasse à deux vitesses : d’une part, dans les zones d’habitat urbain tendu, où les procédures de prévention seront heureusement renforcées, et, d’autre part, en zone rurale, où les procédures de mise en sécurité resteraient définitivement inaccessibles.