Chaque année d'ici 2022, le montant de la redevance versé à Radio France va baisser de 5 millions d'euros quand nos charges vont augmenter de 5 millions d'euros par an. Pour pouvoir faire face à la baisse structurelle de la redevance, des économies ont été engagées afin que Radio France fonctionne structurellement avec un budget amputé de 20 millions d'euros. Nos ressources doivent être dynamiques, comme celles de toute entreprise. Afin d'éviter l'enchaînement de plans d'économies dans la durée, j'ai mis l'accent, dans notre projet, sur le développement de ressources propres au même niveau que celui des charges, sans amputer l'offre éditoriale proposée aux Français. 60 millions d'euros d'efforts impliquent des redéploiements, en tirant les conséquences de la mutation technologique particulièrement rapide, comme le font de nombreuses entreprises en automatisant certaines fonctions ou en investissant dans des outils. Notre plan d'investissement de 25 millions d'euros devrait ainsi permettre à la radio d'intégrer l'ensemble des nouveaux usages. Alors que durant ces dernières années, certains de nos personnels ont dû, entre leurs heures de travail dédiées à la production de la radio, consacrer du temps pour produire du texte ou des images pour assurer la diffusion numérique de nos contenus, la mise en oeuvre d'instruments dédiés permettra d'intégrer ces activités dans leur temps de travail.
Ces dernières années, notre gestion financière nous a permis de réaliser les économies prévues par le précédent contrat d'objectifs et de moyens en réorganisant notre politique d'achat et en conduisant des économies sur l'ensemble des fonctions support. Nous sommes ainsi parvenus au bout de ces efforts en ce domaine. De nombreux départs à la retraite ont, quant à eux, conduit au rajeunissement de notre pyramide des âges. C'est la raison pour laquelle les estimations des départs volontaires - qui devraient concerner a minima 270 personnes - s'avèrent équivalentes aux chiffres mentionnés dans le COM 2015-2019. La réduction nette d'effectifs ne concerne en fait que 99 départs qui n'ont pas été remplacés ; les autres étant remplacés par de nouveaux profils qui ont permis d'engager une dynamique d'offre numérique performante. Si de nombreux collaborateurs ont été remplacés, les directions dans lesquelles les départs n'ont pas donné lieu à de nouvelles embauches sont aujourd'hui désorganisées. De ce fait, il nous faut réorganiser l'ensemble des directions de Radio France pour que les conditions soient plus soutenables dans la durée et que l'entreprise soit suffisamment forte pour relever les grands défis stratégiques, au premier rang desquels la confrontation avec des acteurs numériques extrêmement puissants qui disposent d'une part d'audience grandissante, en termes de consommation média. En effet, la part prise par les réseaux sociaux dans l'information est de plus en plus importante. Comment allons-nous nous organiser pour proposer des offres alternatives, conformément à nos principes de déontologie journalistique, qui puissent efficacement contrecarrer notamment les théories complotistes ? L'offre proposée par Radio France doit ainsi être diverse : les artistes et les labels indépendants que nous promouvons permettent de faire vivre la création française. Tel est l'objectif ultime du projet que je vous présente aujourd'hui. Toutes les fonctions qui assurent et accompagnent la production radiophonique doivent être modernisées.
Les départs volontaires estimés pour les trois années à venir ne peuvent être imputés à une restructuration, mais à une réallocation des effectifs, direction par direction, en fonction des besoins de l'entreprise.
Sur les ressources propres, la dynamique doit être positive et couvrir l'ensemble de nos charges. Nous visons un objectif de 20 millions d'euros d'augmentation. Ainsi, sur les 60 millions d'euros d'efforts, 25 millions d'euros porteront sur la masse salariale et 20 millions d'euros représentent nos prévisions de recettes supplémentaires. S'agissant de la publicité, les antennes de Radio France ne doivent pas accorder aux annonceurs des volumes de temps trop importants. Or, la double limitation, qu'évoquait M. André Gattolin, ne nous permet pas de répercuter les niveaux d'audiences sur les tarifs publicitaires, comme le font les autres médias, autant publics que privés. La publicité sur nos antennes est aujourd'hui au rabais et ne reflète pas les niveaux d'audience atteints par nos antennes, grâce à nos équipes qui demeurent globalement stables dans la durée.
Si notre ambition de développement sur le numérique devrait induire de nouvelles recettes publicitaires, la diversification de nos activités sur l'ensemble de nos chaînes - comme les « papiers de France culture » qui concourent à sa visibilité ou l'enregistrement, par France inter, de conférences en vue de leur diffusion dans plus d'une centaine de salles de cinéma - fournissent à la fois des recettes et accroissent la visibilité des programmes. L'enregistrement de musiques de films y contribuent également : en 2017, à l'occasion de l'enregistrement de la musique du film Valérian, plus grosse production de ces dernières années, les formations et les conditions d'enregistrement de Radio France ont démontré un niveau d'exigence et de qualité comparable à ceux des structures londoniennes, où l'ensemble de l'industrie cinématographique de Hollywood enregistre, d'ordinaire, ses musiques de films. Il n'y a aucune raison pour que nos compositeurs de films à la renommée internationale, comme Alexandre Desplat, enregistrent ailleurs qu'en France leurs musiques ! La France, forte de ses formations musicales de renommée internationale, dispose d'une carte à jouer en la matière. De telles réalisations démontrent que nos investissements vont nous permettre, dans la durée, de développer des activités, de valoriser nos savoir-faire, de rapporter des ressources et, éventuellement, de contribuer à l'ensemble de l'industrie culturelle. En effet, tout enregistrement d'une musique de cinéma bénéficie, en retour, à l'ensemble de l'industrie du cinéma. Le développement du label « Studio Radio France » va nous permettre de valoriser notre savoir-faire.
FIP, qui diffuse, à l'inverse des autres plateformes de streaming musical, quelque 22 000 titres distincts chaque année et n'a pas d'équivalent dans le monde, va devenir une chaîne nationale. 80 % des titres qu'elle diffuse sont soutenus par des labels indépendants. FIP est ainsi un acteur de la diversité musicale. Cette chaîne, diffusée pour le moment en modulation de fréquences dans dix villes, le sera partout en France. La création d'une seule antenne permettra d'éviter le chevauchement du flux national avec les autres flux locaux, et de valoriser la diversité de la création musicale française. Telle est notre ambition pour FIP.
Sur la place des femmes, une antenne comme France inter, avec ses 6,5 millions d'auditeurs, a su conquérir l'intérêt des Français en accordant une place aux jeunes femmes : Léa Salamé, Florence Paracuellos, qui présente le journal de huit heures, Mathilde Munoz et Sonia Devillers. Autant de voix féminines jeunes qui contribuent à l'extension de l'audience à de nouveaux publics. Nous travaillons ainsi au renouvellement des voix afin d'être beaucoup plus proches de la société française et de mieux la refléter.
Mon ambition est également de maintenir la production en interne à Radio France. Nous investissons donc sur la formation, les outils et la production, pour accompagner ces personnes qui produisent en interne nos programmes dans l'avenir et valoriser ceux et celles qui font le succès de nos chaînes. Nos succès sont le fruit de plusieurs dizaines d'années d'expérience du métier de la radio, des goûts des auditeurs et de l'ensemble des acteurs culturels. Ces personnes doivent s'inscrire pleinement dans les évolutions que nous sommes en train de vivre, en comprenant l'évolution du contexte de Radio France, marquée par l'émergence de nouveaux acteurs. Aujourd'hui, les plateformes de streaming musical qui concurrençaient auparavant le média radio sur la musique le concurrence sur les contenus audios. Ainsi, Spotify a investi près de 100 millions de dollars pour racheter des producteurs de podcasts et mettre sur sa plateforme des contenus parlés et musicaux. C'est là une opportunité considérable pour que le son garde de la valeur et puisse être valorisé de la même manière que l'a été l'image dans le développement du numérique. C'est également une invitation à nous interroger sur le format et le contenu audio, et surtout à demeurer innovants comme on a su l'être dans l'histoire de Radio France. Même premiers, on ne saurait rester immobile, sous peine d'être très rapidement déclassés ! Il faut ainsi que l'ensemble des collaborateurs de Radio France partagent cette dynamique. L'ampleur des réductions d'effectifs prévues sont sans commune mesure avec ce qui se passe dans d'autres médias ; regardons ce qui se passe dans la presse écrite dans notre pays !
Enfin, s'agissant de la création musicale, comme beaucoup de médias et par respect pour nos auditeurs, nos grilles évoluent chaque année. Ce qui disparaît est annoncé plus rapidement que les nouvelles émissions ; nous attendons d'ordinaire la présentation des grilles de rentrée pour détailler nos prochaines émissions. Mais pour rassurer ceux qui assurent la création musicale en France, notre ambition est de continuer à exposer les émissions qui la retrace sur une tranche horaire beaucoup plus valorisante, afin de reconquérir une audience qu'elles ont perdue durant ces dernières années.