Intervention de Bernard Doroszczuk

Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques — Réunion du 16 mai 2019 à 10h15
Présentation ouverte à la presse du rapport annuel pour l'année 2018 de l'autorité de sûreté nucléaire asn sur l'état de la sûreté nucléaire et de la radioprotection en france par m. bernard doroszczuk président de l'asn

Bernard Doroszczuk, président de l'ASN :

Je reviens sur la question concernant la mise en demeure sur la traçabilité des essais de qualification pour l'EPR. Ce qui nous a poussés à aller vers cette mise en demeure, ce sont les insuffisances des réponses fournies par EDF sur le résultat de ces essais de qualification. Ces essais sont à réaliser bien en amont de la mise en service. Pour l'EPR de Flamanville, EDF a choisi de les confier en grande partie à des prestataires. Aujourd'hui, nous n'avons pas une vision globale des résultats de ces essais de qualification, qui nécessitent parfois des récolements de résultats. Parce que nous n'arrivions pas à obtenir de vision suffisamment claire, nous avons procédé par la voie de la mise en demeure, afin de pouvoir fixer une échéance de remise de ces résultats d'essais.

En ce qui concerne Fessenheim, son arrêt a été confirmé pour 2020, apparemment en deux étapes : l'arrêt d'une première tranche au printemps, et d'une deuxième tranche à l'été. Nous avons adapté les prescriptions réglementaires à cet arrêt, notamment parce que cette date aurait dû être celle du réexamen normal de sûreté de Fessenheim. Nous n'avons donc pas prescrit ce réexamen. Une autre prescription concernait la mise en place de diesels d'ultime secours post Fukushima, qui constituait aussi un sujet pour Fessenheim. Elle était initialement prévue pour fin 2018 pour l'ensemble des réacteurs du parc, mais compte tenu des difficultés industrielles rencontrées, nous avons repoussé cette date à la fin 2020. Cela couvre de facto le cas de Fessenheim qui n'aura pas besoin de mettre en place ces diesels, étant entendu que Fessenheim disposait déjà d'un dispositif renforcé d'alimentation électrique, qui devra être opérant jusqu'au retrait du combustible après l'arrêt définitif de la centrale. Nous avons aussi pris une disposition réglementaire spécifique liée à la dernière recharge avant arrêt, pour adapter les conditions de charge en vigueur à cet arrêt prévisible.

En ce qui concerne les séismes, sujet important et récurrent, j'ai signalé que la non-tenue aux séismes fait partie des défauts génériques les plus fréquemment détectés sur le parc nucléaire. Dans le cadre du réexamen de sûreté de l'ensemble des réacteurs, l'examen de conformité devra particulièrement prendre en compte la tenue aux séismes.

La tenue aux séismes, notamment aux séismes majeurs, est l'un des éléments essentiels des mesures « post-Fukushima ». Toutes les exigences qui découlent de Fukushima visent à renforcer la tenue aux séismes de toutes les installations nucléaires de base en France. Un certain nombre d'étapes ont été franchies dans ces mesures, notamment la mise en place de moyens mobiles pour faire face à une situation de perte d'alimentation électrique ou de perte de capacité de refroidissement en eau. Ces dispositions doivent encore être consolidées, notamment avec les diesels d'ultime secours. La préoccupation vis-à-vis des séismes porte à la fois sur la conformité de l'installation et sur un renforcement intrinsèque des installations, à travers les mesures post-Fukushima.

Enfin, en ce qui concerne les questions soulevées par la publication récente de l'avis de l'IRSN, à la fois sur l'entreposage à sec et sur les alternatives éventuelles au stockage Cigéo, celui-ci a été rendu à la CNDP. L'ASN n'en était ni le destinataire, ni le commanditaire.

Sur l'entreposage, deux options existent : l'entreposage à sec et l'entreposage en piscine. Elles sont d'ailleurs mises en oeuvre par Orano dans différents pays. Elles ne posent pas de problèmes de sûreté particuliers, c'est un choix industriel. L'entreposage en piscine présente aujourd'hui en France une cohérence avec l'approche de retraitement, puisqu'il faut refroidir les combustibles avant de les retraiter. Le fait d'entreposer des combustibles usés dans des piscines accélère ce refroidissement.

Pour autant, on ne peut pas entreposer à sec les combustibles, notamment les combustibles MOX (mixed oxides), avant un certain temps. Il faut les laisser refroidir. Par conséquent, l'option d'entreposage à sec ne supprime pas l'entreposage en piscine pendant plusieurs années, voire pendant plusieurs dizaines d'années. Mais c'est un choix industriel et politique. Pour l'ASN, les deux sont possibles, et la sûreté sera bien évidemment contrôlée au même niveau.

En ce qui concerne les alternatives au stockage géologique profond, un examen rapide du document de l'IRSN montre qu'il s'agit de réexaminer les différentes voies expertisées dans le cadre de la loi française, avant la prise de décision du stockage géologique profond avec les trois options : l'entreposage, la transmutation et le stockage géologique profond.

Il n'y a là rien de nouveau. L'entreposage n'est pas une solution du même niveau que le stockage. Ce n'est pas une solution pérenne, qui permette de décharger les générations futures d'avoir à chercher des solutions. Quant à la transmutation, elle reste un sujet de recherche dans l'actualité. D'une certaine manière, si la voie de la transmutation après recherche s'avérait industriellement favorable, elle s'inscrirait dans l'option de réversibilité, prévue pour le stockage géologique profond.

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