Monsieur le ministre de l’économie et des finances, « le monde a besoin d’une devise numérique mondiale qui combine les attributs des meilleures devises du monde : elle doit être stable, soumise à une inflation faible, acceptée partout dans le monde et fongible » : c’est ainsi que Facebook présente une nouvelle monnaie destinée à payer des services en ligne, mais aussi son loyer ou son café.
Croire à une démarche philanthropique serait oublier bien vite que toutes nos données sont conservées et utilisées par les géants du numérique pour, aujourd’hui, nous envoyer des publicités ciblées, et peut-être, demain, les utiliser à des fins moins louables.
Ce projet de cryptomonnaie, dont le lancement est prévu pour 2020, doit nous conduire à nous interroger fortement. Dix ans après le pionnier bitcoin, les vingt-sept membres fondateurs espèrent séduire les masses en garantissant la stabilité de cette monnaie électronique et en confiant la supervision du système à une association basée en Suisse, Calibra.
Comment croire que les données financières seront bien séparées des données sociales, alors même que les fuites et les mauvais usages de données sont déjà récurrents ? Libra n’est-elle pas l’arbre qui cache la forêt ? En effet, les Gafam – Google, Apple, Facebook, Amazon et Microsoft – s’intéressent de près à d’autres secteurs : la banque, bien sûr, mais aussi les assurances, les transports, l’énergie et la santé.
Comment être convaincu des bonnes intentions de ces grandes sociétés ? Les Gafam cachent à peine leurs ambitions : Google gérera bientôt une ville dans la métropole de Toronto et se propose de régler la crise du logement à San Francisco.
Monsieur le ministre, cette nouvelle monnaie suscite de nombreuses inquiétudes, et vous avez déjà fait à son propos des déclarations qui se veulent rassurantes. Devant un risque de remise en cause de l’État, que comptez-vous faire pour anticiper au mieux ces évolutions et protéger les Français ? Ce combat sera-t-il mené au niveau européen ?