Je vous remercie de me donner l'occasion de pouvoir présenter les résultats et les préconisations tirés des travaux que nous conduisons dans le laboratoire Economix, une unité du CNRS à l'Université de Paris Nanterre. Ces travaux, qui ont commencé il y a environ sept ans, nous ont permis d'explorer différentes dimensions des relations entre les territoires.
Je souhaite insister aujourd'hui sur les liens entre les territoires, en partant du ferment que les métropoles sont supposées constituer. En effet, les différents dispositifs législatifs et les politiques publiques ont mis en exergue la capacité des métropoles à rayonner ou ruisseler sur les territoires avoisinants.
Présentées comme le moteur de l'économie française, ces métropoles étaient au départ au nombre de treize, auxquelles s'ajoutait le Grand Paris. Elles sont vingt-deux aujourd'hui. Nous voyons une hétérogénéité de cette catégorie métropolitaine qui contraste avec l'hypothèse sous-jacente d'une surperformance des métropoles par rapport au reste du territoire.
Lorsque nous avons commencé à travailler pour France Stratégie, le Commissariat Général à l'Égalité des Territoires et l'Institut CDC pour la recherche, l'idée était de montrer dans quelle mesure et avec quelle intensité les métropoles rayonnaient sur les territoires avoisinants. La commande consistait à tester cette hypothèse.
Les résultats ont montré que toutes les métropoles n'étaient pas également performantes et qu'elles n'avaient pas toutes un effet d'entraînement sur leur voisinage. Ces résultats ont été difficiles à accepter tant ils contrastaient avec l'hypothèse qui présidait et qui dominait à l'époque.
Je conduis une équipe qui travaille sur des recherches empiriques, nous n'avions donc pas d'idée préalable. Nous essayons, avec différents outils techniques fondés sur l'économétrie spatiale, de mettre en évidence des effets de débordement d'un territoire sur un autre.
Au lieu de confirmer l'hypothèse de l'effet d'entraînement général des métropoles qui se diffuserait selon une logique aréolaire, nous avons mis en évidence des métropoles qui avaient des logiques différentes. Certaines, exerçant des effets d'entraînement sur les territoires alentour, correspondaient au schéma idéal. D'autres n'avaient pas cette caractéristique.
Nous engageons aujourd'hui la deuxième saison de cette recherche. Nous travaillons sur les 22 métropoles que sont les 13 métropoles concernées par la première étude, le Grand Paris et les 8 métropoles nouvellement créées. L'hétérogénéité est encore plus grande. À l'exception de Clermont-Ferrand, et de Toulon dans une moindre mesure, toutes connaissent un recul de l'emploi. Les effets sur les territoires ne sont pas avérés. Les effets métropolitains bénéfiques qui devraient s'exercer à l'intérieur des métropoles ne sont pas non plus observés.
Plusieurs raisons expliquent cette situation. D'une part, elle est la cause d'un effet structurel. Les métropoles sont plus performantes que les autres territoires péri-métropolitains ou ruraux. En effet, elles possèdent un portefeuille d'activités essentiellement constitué de secteurs dynamiques tels que les services métropolitains à forte intensité en connaissances : services supérieurs de conseil en entreprise, de comptabilité, de consultance... Ils sont localisés au coeur des métropoles et sont des secteurs en croissance. Ils engendrent un effet d'entraînement par le biais des relations intersectorielles ou interentreprises.
Une autre raison mise en évidence est l'effet local : un résidu entre la croissance de l'emploi observée et celle qui serait due simplement au portefeuille d'activités. De manière générale, les métropoles ont un avantage : l'effet d'agglomération. La densité en emploi ou en activités à forte dynamique de croissance crée des effets d'entraînement qui tractent d'autres services d'activités tels que les services à la personne.
La typologie des 22 métropoles au regard des relations qu'elles entretiennent avec les territoires alentour comprend quatre types. Le premier correspond au schéma théorique de la métropole rayonnante : la métropole à dynamique partagée. La croissance de la métropole s'observe dans les territoires alentour. Les agglomérations de Rennes, Lyon et Nantes en sont des exemples. À l'opposé, il existe des territoires globalement en repli. La métropole et les territoires avoisinants ne connaissent pas de dynamique favorable de l'emploi. Les villes de Dijon, Nice, Metz et Nancy correspondent à ce type. D'autres situations sont moins typées : des métropoles sont autocentrées et se développent quand ce n'est pas le cas des territoires alentour. Lille, Montpellier et Toulouse relèvent de cette logique.