Au risque de me répéter, je veux dire que je ne vois pas en quoi l’apposition d’une photo sur le bulletin de vote en compromettrait la sobriété. Qu’elle soit récente, certes, chacun peut ajouter les détails qu’il veut, sous réserve de respecter la couleur du bulletin de vote et de faire en sorte qu’elle s’y intègre pleinement. D’ailleurs, la pratique existe depuis un certain nombre d’élections, elle s’est reproduite, et je ne pense pas qu’elle ait nui à la sincérité de quelque scrutin que ce soit.
Je veux le redire, refuser cette disposition reviendrait à nier le rapport actuel de nos concitoyennes et concitoyens à la vie politique. On peut le regretter et être dans l’incantation, comme vous l’avez fait, monsieur Masson. Vous en avez appelé à l’intelligence de tous les électeurs et électrices qui, au vu d’une profession de foi, vont se déterminer, auront tout intégré et sauront, le jour du vote, dans l’isoloir, choisir le bon bulletin. Mais telle n’est pas la vie des électrices et des électeurs d’aujourd’hui !
Pour un scrutin de liste, par exemple, on admet que le nom de la tête de liste soit écrit en un peu plus gros que celui de ses colistiers. Ça veut bien dire qu’on fait ainsi ressortir la personnalité de tel ou tel. Ce n’est pas grave d’accepter cette pratique. D’ailleurs, si cette liste l’emporte, il est envisageable, par transparence démocratique et sans pour autant éviter les tractations, que la personne tête de liste devienne demain responsable de l’exécutif, ce qui justifie que son nom soit écrit en plus gros.
Pourquoi empêcherait-on demain d’imprimer sa photographie sur le bulletin de vote ? Serait-il intelligent et noble de retenir le nom, le symbole politique ou le sigle politique de tel ou tel, alors qu’il serait bassement populaire et antidémocratique de retenir la photographie ou le visage de telle personne qu’on a rencontrée au cours d’une campagne électorale ?
Eh bien, excusez-moi, mais je trouve tout ce débat finalement assez prétentieux, ce qui n’est pas compatible avec l’exercice de la démocratie. Oui, nous vivons dans un monde de l’image permanente, de la rencontre entre un programme, des idées et des individus, ce à quoi je suis, à titre personnel, fortement attachée, parce que la politique est incarnée, qu’on le veuille ou non, par des femmes et des hommes. Eh bien, oui, je le redis, dans ce monde, la présence d’une photographie définie ne me semble pas être un handicap à l’exercice du suffrage, en tout cas, à la sincérité de celui-ci, et je voterai cet amendement !