Intervention de Viviane Artigalas

Réunion du 26 juin 2019 à 14h30
Exploitation des réseaux radioélectriques mobiles — Adoption en procédure accélérée d'une proposition de loi dans le texte de la commission modifié

Photo de Viviane ArtigalasViviane Artigalas :

Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, le déploiement commercial de la 5G est prévu en France pour le début de l’année 2020.

Dans un premier temps, il s’agira d’un élargissement de la capacité de la 4G avant la mise en œuvre des réseaux 5G spécifiques à l’horizon de 2022-2023.

Or ce système va entraîner une véritable rupture technologique, avec la mise en place de réseaux virtuels, déconcentrés, gérés par des logiciels et qui entraînent une multitude de flux. Cette virtualisation des réseaux nécessitera moins d’équipements physiques, jusqu’à présent plus facilement contrôlables. En revanche, avec plus d’équipements virtuels, des vulnérabilités nouvelles liées à l’architecture de ces réseaux 5G vont apparaître.

C’est un changement de paradigme, un changement d’échelle par la rapidité et le débit de la 5G, qui aura pour conséquence de multiples usages nouveaux.

Comme avec l’apparition d’internet, il est impossible d’anticiper les applications qui en découleront ainsi que l’ensemble des conséquences de ce nouveau modèle économique. La 5G sera donc le terrain de nombreuses innovations technologiques, et il faudra un grand nombre d’expérimentations et de corrections avant que ce système et ce modèle économique ne se stabilisent. Ce facteur d’imprévisibilité se traduira par un accroissement des risques liés.

L’objet de cette proposition de loi est bien d’adapter le cadre juridique pour garantir la sécurité du développement et de l’exploitation des réseaux de communications électroniques.

Je tiens à féliciter Mme le rapporteur et la commission du travail de clarification du champ d’application de la loi qui a été effectué. On passe en effet d’un dispositif de certification pour assurer une sécurité géographique d’équipements à une sécurisation d’un système par un contrôle de son déploiement et de son exploitation pour des motifs de défense et de sécurité nationale.

La commission a bien précisé que les réseaux indépendants n’étaient pas inclus dans le champ d’application de la proposition de loi. On comprend alors que ne sont concernés par cette mesure que les seuls opérateurs de télécommunications déployant des réseaux ouverts au public, ceux qui sont d’importance vitale, et uniquement pour des motifs sérieux de sécurité nationale.

De plus, la commission a fort justement limité ce champ d’application aux équipements 5G et à ceux des générations ultérieures.

Cependant, tout en étant d’accord sur le fait que l’État ne puisse pas imposer aux opérateurs une répartition et une pluralité d’équipements sur le territoire national, ni s’immiscer dans leurs politiques d’achat, nous regrettons que la notion de périmètre géographique d’exploitation ait été exclue du dossier de demande d’autorisation par la commission sénatoriale.

En effet, il nous paraît important, madame la secrétaire d’État, que l’État puisse connaître le lieu de déploiement et d’exploitation des réseaux 5G. En outre, l’absence d’information pourrait avoir un effet contreproductif et conduire au rejet d’une autorisation qui aurait vocation à s’appliquer sur l’ensemble du territoire, ce que nous ne voulons pas.

Nous le voyons bien, ce sujet extrêmement complexe méritait mieux qu’un amendement au détour de la loi Pacte.

Si l’intention du Gouvernement d’adapter le cadre juridique qui doit garantir la sécurité des réseaux de communications électroniques, en raison des nouveaux usages stratégiques inhérents à la 5G, mérite d’être soutenue, force est de constater que, en recourant à l’initiative parlementaire pour adopter cette loi, il prive le Parlement d’une étude d’impact, qui aurait été éminemment utile pour légiférer sur le sujet.

Il aurait été, par exemple, nécessaire d’avoir une évaluation précise des conséquences de ce nouveau dispositif pour les opérateurs et constructeurs réseau. L’avis du Conseil d’État aurait également été important, afin d’anticiper les conséquences en termes de contentieux et de jurisprudence.

À l’occasion de l’examen de ce texte, en tant que parlementaires, nous sommes face à une forme d’injonction paradoxale : il faut assurer la sécurité et la fiabilité d’un système, sans pour autant pénaliser l’innovation, le développement de nos entreprises et l’aménagement de tous nos territoires. Dans leur travail, notre groupe et la commission se sont attachés à trouver cet équilibre.

Compte tenu de la rapidité des évolutions technologiques attendues et de l’importance de ce texte, il est également essentiel de disposer d’un cadre juridique évolutif pour garantir dans le temps la sécurité du système.

Malgré la qualité des auditions menées, il est difficile de mesurer l’impact du texte sur l’activité de l’ensemble des secteurs concernés ou le déploiement d’une évolution technologique que l’on ne maîtrise pas encore. Une évaluation annuelle du dispositif d’autorisation préalable paraît donc nécessaire.

En dépit de ces réserves et en prenant en compte les évolutions du texte en séance, le groupe socialiste et républicain, dans une démarche constructive, votera cette proposition de loi.

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