L'objectif pour le « Pass export » est d'avoir une approche différente d'une approche classique où l'on garantit contrat d'exportation par contrat d'exportation. Il s'agit d'avoir un contrat pluriannuel entre l'État via Bpifrance et une entreprise, avec une visibilité sur 2 ou 3 ans. L'entreprise a une obligation de fabriquer un certain pourcentage de ses produits sur le territoire français. Cette part est évaluée en moyenne et non pas projet par projet. Cela donne un peu plus de flexibilité à l'entreprise. En contrepartie, elle doit respecter des engagements socio-environnementaux. L'État n'est pas contre-garanti. C'est la raison pour laquelle cet outil présente un risque. Si l'entreprise perd de l'argent et fait jouer la garantie, c'est l'État qui la rembourse via l'assurance export de Bpifrance. Cela a un effet budgétaire. Depuis plusieurs années, nous sommes excédentaires sur le risque de l'assurance-crédit. Nous n'avons pas eu de sinistres majeurs. Cette assurance est de nature différente de la garantie pour les lycées français. Le dispositif a d'ailleurs été débloqué pour les projets en cours des lycées. Nous nous sommes rendu compte que le dispositif existant était très fragile sur le plan juridique : les lycées disposaient de peu de capitaux propres et bénéficiaient d'un important effet de levier entraînant un niveau de risque considérable porté par une petite structure. Un groupe de travail est en cours avec la DG Trésor, la DG Budget et le ministère de l'Europe et des affaires étrangères, afin de remettre sur pied un dispositif pérenne plus solide. Toutefois, afin d'éviter que les projets en cours ne soient bloqués, nous les garantissons.
L'objectif est de déployer la plateforme numérique dans toutes les régions et de couvrir l'ensemble des questions que se posent les entreprises intéressées par l'exportation. Il s'agit d'intégrer des approches différentes entre les outils de financement, d'accompagnement, du coaching... Tous les acteurs régionaux, nationaux vont poster sur cette plateforme les éléments d'information utiles aux entreprises. Ces outils sont évolutifs afin de répondre à de nouveaux besoins ou traiter des questions qui ne le seraient pas. C'est à mon avis un outil extrêmement puissant pour les acteurs économiques.
Nous sommes dans la phase de mise en oeuvre de cette réforme. L'ensemble des acteurs a été largement consulté. Il y a eu dans le volet international de la loi PACTE un travail de consultation réalisé par le binôme Jung - Kaiser. Il faudra un peu de recul afin d'analyser la mise en place de la réforme.
Caroline Malausséna. - Les plateformes des solutions sont déjà en place. Le Premier ministre les a lancées à Rouen l'année dernière. Je vous invite à consulter les sites. Cela vous donnera une idée du type d'accompagnement que la PME peut trouver. Il s'agit d'un parcours. Plusieurs questions lui sont posées : avez-vous déjà exporté ? Si oui, dans quels pays ? Avez-vous dans votre équipe quelqu'un susceptible de s'occuper de l'international ? ... Les régions pilotent ces plateformes et vont travailler en partenariat avec les 235 conseillers internationaux évoqués précédemment.
Nous sommes au tout début de la réforme. Deux exemples concrets montrent qu'elle prend sur le territoire : lors d'un déplacement à Nice de M. Jean-Baptiste Lemoyne, nous avons constaté de la part de la région et des CCI une appropriation de celle-ci. Par ailleurs, hier se tenait l'assemblée générale des chambres de commerce CCI France international. Lors du dîner étaient réunis les CCI France, mais aussi le MEDEF et toutes les entreprises concernées, ainsi que des présidents de régions. Il y avait une vraie unanimité pour dire que cette réforme allait dans le bon sens. Cependant, nous sommes conscients que tout n'est pas parfait. J'ai proposé aux régions qui le souhaiteraient de me rendre ponctuellement à un comité régional, au moment de l'analyse de ses effets sur les territoires.
Le ministère de l'Europe et des affaires étrangères organise chaque année un « speed-dating » dédié aux PME à l'occasion de la conférence des ambassadeurs et ambassadrices fin août. Les entreprises s'inscrivent sur une plateforme et peuvent dialoguer avec les ambassadeurs des pays qui les intéressent. Cette année, nous demandons à nos ambassadrices et nos ambassadeurs, à la fin de la conférence de se rendre dans les régions et d'organiser par groupe des rencontres avec les PME. Nos ambassadeurs doivent être pleinement en contact avec les PME.
Dans son contrat avec l'État, Business France est soumis à des indicateurs très précis d'activité : nombre d'entreprises suivies, nombre d'entreprises accompagnées, chiffre d'affaires généré... Cela va nous donner des outils fins d'évaluation. Nous évaluerons les outils financiers notamment via l'analyse du recours à l'assurance export de Bpifrance. En outre, il sera important de consulter les clients de la réforme. Dans le cadre de la réforme de l'État, nous devrions disposer de capacités d'accompagnement afin de réaliser des sondages auprès des entreprises pour évaluer l'impact de la réforme de leur point de vue. Nous interagissons également régulièrement avec les entreprises, notamment celles qui font appel à la garantie. Nous organisons des réunions « cercle de l'export » nous permettant d'obtenir un retour des entreprises et des opérateurs sur l'adéquation des instruments financiers.
Aujourd'hui, les services économiques sont complétement intégrés dans les ambassades, sous l'autorité de l'ambassadeur. Ils donnent un appui à l'ambassadeur sur l'ensemble des sujets économiques et financiers, et sont à la disposition des entreprises. Ils n'interviennent pas dans l'accompagnement opérationnel afin de chercher des marchés, mais ils peuvent régler des contentieux lorsque les entreprises ont du mal à se faire payer, ils ouvrent l'accès aux décideurs de projets, ils animent les filières à l'étranger et valorisent les savoir-faire français. Souvent, ils ont une très bonne connaissance des acteurs français implantés dans un pays, ainsi que des besoins et perspectives de développement. Ils travaillent en lien avec le bureau de Business France ou la chambre du commerce. Enfin, ils apportent un éclairage sur le risque macroéconomique. Ils peuvent ainsi donner un certain nombre d'informations clés pour les entreprises souhaitant exporter.
Le secteur agricole représente un enjeu particulier. Il y a eu une prise de conscience récente. Vous nous accusez de dresser un constat trop optimiste. Notre constat est réaliste. Il est important pour pouvoir exporter de disposer d'éléments de compétitivité et d'entreprises capables de se projeter à l'export. Les mesures prises en matière d'allégements du coût du travail apportent une première réponse, mais qui ne doivent pas être uniques. Nous avons globalement stabilisé nos parts de marché, et dans certains domaines, nous voyons un regain d'activité. Il reste beaucoup de choses à faire. La France dispose de nombreux atouts, mais elle s'est fait doubler ces dernières années dans un certain nombre de domaines. Le problème agricole reflète la dégradation générale de la compétitivité française. Des éléments plus sectoriels doivent être pris en compte. Il faut faire des distinctions entre filières. Dans la filière des vins et spiritueux, de nouveaux acteurs émergent. La France n'est plus en position dominante comme elle a pu l'être. Mais nous restons une puissance exportatrice compétitive avec un effet de marque extrêmement important. Il en est de même pour les produits laitiers, les céréales et les produits transformés. En revanche, c'est plus difficile pour les produits de l'élevage, notamment le boeuf, avec la concurrence intra-européenne : Espagne, Pologne et depuis peu émergence de l'Allemagne.
Nous devons également adapter l'offre à la demande. Nous constatons dans certains cas un décalage. Les problèmes de la France à l'exportation ne se limitent donc pas à la compétitivité coût. La filière agriculture est un pilier du pacte productif. Dans le dernier comité de filière, présidé par le ministre de l'économie et des finances, il a été demandé aux professionnels de la filière de définir un plan d'action afin de progresser sur ces sujets.
Dans les négociations internationales, nous essayons d'ouvrir des marchés agricoles à l'exportation. En effet, il y a eu de nombreuses restrictions phytosanitaires. En outre, ce sont souvent des marchés protégés. Nous portons une attention particulière à ces questions dans chaque discussion bilatérale et chaque accord multilatéral, afin de faire lever les embargos ou les restrictions d'accès aux marchés. Le secteur agricole était un élément important dans les accords de libre-échange avec le Japon et le traité CETA. L'accord avec le Japon ouvre des opportunités pour des exportations de viande de boeuf, de fromages, de vins et spiritueux. Pour le CETA, nous avons obtenu un quota pour les fromages français. Enfin, le gouvernement français agit pour que les appellations d'origine contrôlée soient prises en compte dans les négociations internationales. Nous sommes assez entendus sur ce point par la Commission européenne : dans l'accord avec le Japon et le Canada, les indications géographiques sont protégées.
L'accord de libre-échange avec le Vietnam représente un potentiel d'exportation pour nos produits agricoles. Enfin, s'agissant de la Chine, nous avons des négociations difficiles mais permanentes. Dans chaque discussion bilatérale, qu'il s'agisse de la négociation mixte avec le ministre de l'Europe et des affaires étrangères, des négociations portées par le ministre des finances dans le dialogue économique et financier, nous demandons la levée des restrictions. Nous avons obtenu des évolutions favorables sur la viande bovine. Toutefois, cela reste un sujet à suivre de manière très précise. Ce sont des marchés importants sur lesquels notre accès est de facto limité.
Vous avez raison de souligner qu'il faut une prise de conscience. La France s'est endormie sur ses lauriers. Une mobilisation générale est nécessaire.