Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, la réunion de la commission mixte paritaire n’aura pas permis de trouver une vision commune entre les positions exprimées par le Sénat et l’Assemblée sur le projet de loi pour la conservation et la restauration de la cathédrale Notre-Dame de Paris et instituant une souscription nationale à cet effet.
Ce sujet pourtant mobilise et réunit très largement les Français. Tous ont voulu témoigner de leur attachement à ce patrimoine commun remarquable qui assure, et continuera de le faire, le rayonnement et l’attractivité de notre pays.
À plusieurs reprises, l’exécutif a exhorté chacun d’entre nous à la communion nationale. Le groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen nourrissait donc l’espoir que ce rassemblement serait aussi le fait de la représentation nationale. Au sein de la chambre haute, nous avons été soucieux de défendre une position commune. Dans le cadre de nos travaux en première lecture, nous avons exprimé des préoccupations susceptibles de nous réunir.
Tout d’abord, nous avons refusé que ce projet de loi, qui a vocation à permettre la restauration de Notre-Dame après le sinistre du 15 avril dernier, soit un catalogue de mesures d’exception. Rien ne le justifie ! Monsieur le ministre, s’il existe un impératif réel qui motive vos intentions, et qui ne soit pas la seule parole présidentielle, nous vous invitons de nouveau à le porter à notre connaissance.
Le monde du patrimoine, dans sa plus grande diversité, a fait part de son inquiétude devant votre empressement et devant la volonté de l’exécutif de déroger aux règles qui régissent la restauration de nos monuments historiques. La cathédrale de Paris n’a pas été édifiée pour servir le culte de l’immédiateté qui caractérise notre époque.
Le Sénat a, en outre, estimé qu’il était absurde de s’employer à fixer des règles pour vouloir ensuite s’en affranchir sans motif impérieux. La restauration de cet édifice doit se faire dans le cadre commun, celui-là même que nous demandons à tous les élus et à tous les propriétaires de France de respecter lorsqu’ils entreprennent des projets de restauration.
Même si Notre-Dame de Paris représente un des édifices les plus remarquables de notre patrimoine architectural, elle en demeure un élément. Si les réglementations et les normes existent, c’est qu’elles sont fondées ; sinon, proposons leur suppression ! Tant qu’elles s’appliquent, sauf motif le justifiant expressément, elles s’appliquent à tous.
En première lecture, les élus du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen, à l’instar de la grande majorité des membres de cette assemblée, ont défendu la suppression de l’article 9 du projet de loi, qui contenait l’essentiel des mesures d’exception.
En nouvelle lecture, nous souhaitons accompagner la position de notre rapporteur, qui demeure soucieux d’œuvrer à l’établissement d’un texte de compromis. Aussi, nous ne nous déposerons pas en séance un amendement similaire.
Le Gouvernement a revu la rédaction de l’article 9 du projet de loi. Les modifications qui y ont été apportées par notre commission, sur proposition de notre collège Alain Schmitz, ont conduit à la suppression des principales mesures dérogatoires.
Il s’agit là d’une nouvelle position de sagesse du Sénat et d’une main tendue à nos collègues députés, pour que nous ne donnions pas aux Français l’image d’une représentation nationale divisée sur un sujet qui devrait, au contraire, nous rassembler.
Une mesure demeure toutefois dans ce texte à laquelle les élus du groupe du RDSE ne peuvent toujours pas souscrire : la majoration de la déduction fiscale à 75 % consentie aux donateurs jusqu’à 1 000 euros, dont nous continuerons à demander la suppression.
Cette disposition fait également débat au sein de la chambre basse, puisqu’elle avait été supprimée par la commission des finances de l’Assemblée nationale avant son rétablissement en séance publique.
Tout d’abord, cette majoration ne paraît pas se justifier, au vu de la mobilisation financière aussi spontanée que massive qui a suivi le sinistre, alors que les deniers publics font aujourd’hui très largement défaut ailleurs.
Monsieur le ministre, nous avons entendu vos avertissements quant à la relative lenteur avec laquelle se concrétisent les promesses. Il n’aura cependant échappé à personne que plusieurs personnalités et de grandes entreprises ont formulé, publiquement, des promesses de dons particulièrement généreuses, dont on imagine difficilement qu’elles ne se concrétisent pas.
Monsieur le ministre, il est dans ce pays des défis qui suscitent beaucoup plus d’inquiétudes quant à notre capacité à réunir les fonds nécessaires pour les relever que celui de la restauration de la cathédrale de Paris !
En outre, même si Notre-Dame était le monument le plus visité de France et d’Europe il y a encore trois mois, il n’en demeure pas moins que nos routes et nos communes abritent des merveilles architecturales qui participent également de notre richesse nationale.