Permettez-moi de revenir sur une question précédente à laquelle je n'ai pas répondu. Seront pris en compte pour le bonus-malus tous les retours à Pôle emploi à l'exception des contrats d'insertion, des contrats d'apprentissage, mais également des démissions, parce que l'on ne peut pas imputer une démission à un employeur. En revanche, un licenciement ou une rupture conventionnelle seront pris en compte. Les secteurs concernés sont figés pour deux ans.
La taxe sur les CDD d'usage concerne très largement des secteurs où le recours aux contrats de très courte durée est très fréquent. Ce que l'on met en cause n'est pas le recours à ce type de contrat, mais le caractère excessif de celui-ci.
Nous mettons en place un bonus, car toutes les entreprises, qu'elles bénéficient d'un bonus ou subissent un malus, respectent la loi. La loi n'interdit pas le recours aux contrats courts et nous ne proposons pas cette interdiction. Il faut laisser au marché une respiration. Une entreprise doit néanmoins accepter les conséquences d'un recours excessif à ces derniers. En effet, leur coût est actuellement porté à la fois par la société et par les salariés qui se retrouvent dans une situation très précaire : ils ne peuvent pas se loger, faire de projets car ils sont suspendus à un appel pour un contrat le lendemain. Les contrats courts génèrent 9 milliards d'euros de déficit à l'assurance chômage. Il est donc normal que ceux qui en abusent - pas au sens législatif ou réglementaire du terme, mais au sens sociétal - payent plus de cotisations d'assurance chômage. Au contraire, ceux qui font des efforts de gestion des ressources humaines, en anticipant les besoins, par l'annualisation du temps de travail, le recours à des groupements d'employeurs ou encore avec des CDI intérimaires, doivent être encouragés : le marché du travail s'en sortira mieux ; les comptes de l'assurance chômage et les salariés précaires aussi.
Il faut savoir que, pour les intermittents du spectacle, il y a une sorte de malus collectif. En effet, la cotisation employeur est de 8 % et non de 4,05 %. En outre, les règles relatives à l'intermittence du spectacle étant spécifiques, il n'est pas possible de changer un critère sans une refonte générale du système. Dès lors, à chaque fois que les partenaires sociaux négocient, ils se demandent s'ils doivent saisir leurs homologues intermittents du spectacle. Les organisations confédérales interprofessionnelles ne déterminent pas les règles de ce système d'assurance chômage. Il y a une sorte de sous-ensemble spécialisé.
Notre priorité est le retour à l'emploi. Vous évoquez la situation des traiteurs. Nous avons procédé à de nombreuses simulations, afin de voir les conséquences pour ceux-ci. Or, nous avons constaté que le recours à de l'emploi précaire dans ce secteur varie de 1 à 40. Des traiteurs se sont organisés à plusieurs en recourant à un groupement d'employeurs, ou via des CDI intérimaires afin de trouver des solutions. Certes, le recours aux contrats courts demeurera plus élevé dans le secteur de l'hôtellerie-restauration que dans le secteur industriel ; le métier est ainsi fait. Mais des solutions existent. Si certaines entreprises y arrivent, il n'y a pas de raison que d'autres n'y parviennent pas.
Je me rends fréquemment sur le terrain à la rencontre des agents de Pôle emploi. Depuis le début de mes fonctions, j'ai été dans plus d'une vingtaine d'agences. Deux points me frappent : tout d'abord le niveau d'engagement de ces personnels est remarquable. Dans toutes les agences que j'ai visitées, je qualifierai le niveau d'engagement d'exceptionnel et j'ai constaté une véritable motivation pour réussir leurs missions - qui n'est pas facile. Par ailleurs, Pôle emploi a beaucoup évolué ces dernières années, et la population n'en a pas toujours consciente. Tous les ans, le même organisme de sondage réalise pour nous deux enquêtes, l'une auprès des demandeurs d'emploi et des entreprises utilisatrices de Pôle emploi et l'autre auprès de la population en général, afin de savoir ce qu'ils pensent de Pôle emploi. 73 % des entreprises utilisatrices et 71 % des demandeurs d'emplois sont satisfaits ou très satisfaits du service de Pôle emploi. Mais, lorsque l'on interroge la population française, 70 % de celle-ci pensent que le service est mauvais. Un peu moins de quatre millions d'offres d'emploi sont déposées tous les ans, et 80 % d'entre elles trouvent preneur. La difficulté d'un métier comme Pôle emploi est que l'on peut toujours faire mieux et que l'on vise 100 %. C'est la raison pour laquelle nous allons proposer aux entreprises ce service au bout de 30 jours sans réponse à la suite du dépôt d'une offre. Nous sommes actuellement dans une dynamique très importante du marché de l'emploi. Aujourd'hui, 726 222 offres sont proposées sur le site de Pôle emploi. Le chiffre aura évolué demain. Il y a également énormément de recrutement dans tout le pays.
Nous avions envisagé une diminution des moyens de Pôle emploi. Mais celle-ci n'aura pas lieu. Au contraire, nous allons recruter 1 000 agents supplémentaires.
Le directeur général de Pôle emploi, Jean Bassères, que vous avez auditionné, et que j'ai renouvelé à son poste, souhaite une déconcentration renforcée, afin d'être au plus près des besoins des territoires. En effet, dans certains bassins d'emplois, de nombreux emplois sont créés, le marché est tendu et il manque de la main d'oeuvre. Dans d'autres bassins d'emploi, la situation est inverse. Entre ces deux cas de figure se situe la zone rurale où en apparence le chômage est faible, mais c'est parce que la population active est partie. La différenciation territoriale fait partie pour moi des voies d'amélioration.
Faire de l'accompagnement précoce et intensif n'a jamais été testé en France jusqu'à présent. Nous avons lancé depuis peu cette opération à Nice et les premiers résultats sont très encourageants. L'accompagnement sera réalisé par les agents de Pôle emploi, à l'exception de formations ou d'accompagnements spécifiques - j'évoquais le soir ou le week-end - où il sera procédé à des appels d'offres. Mais, même ces formations se feront sous la responsabilité de Pôle emploi.
Nous devons également convaincre les entreprises de nous faire confiance. J'étais il y a peu à Villeurbanne dans une agence de Pôle emploi, où étaient présentes une trentaine d'entreprises. L'un des employeurs nous a indiqué qu'il n'avait pas fait appel à Pôle emploi jusqu'au jour où il s'était rendu compte que cet organisme disposait de millions de profils. Personne d'autre en France ne dispose de cette richesse. En quelques semaines, il a trouvé la compétence qu'il recherchait.
Nous allons renforcer notre action en matière d'aides à la mobilité. Vous avez raison, il s'agit d'un enjeu majeur. C'est la raison pour laquelle j'évoquais la mobilisation territoriale. Les territoires ne sont pas égaux en matière de mobilité. La loi d'orientation des mobilités va permettre un certain nombre de progrès. Mais il faut également trouver des solutions locales. Ce vendredi, nous rencontrons avec le Premier ministre l'ensemble des préfets. Quasiment tous les présidents de région ont également accepté de travailler sur ce sujet. Mais évidemment, les solutions seront surtout infra-territoriales. Tant les préfets que les présidents de région auront plutôt un rôle de chef d'orchestre, mais cette thématique doit être traitée au niveau du bassin d'emploi ou de l'intercommunalité.
Certains d'entre vous reprochent au Gouvernement d'avoir eu une démarche contraire au paritarisme. Je me permets de préciser qu'elle est totalement conforme à la loi. La loi a en effet prévu que les partenaires sociaux sont prioritaires pour définir les règles applicables mais à défaut, que le gouvernement puisse intervenir.
Je souhaite revenir rapidement sur les chiffres. L'Unédic a évoqué le chiffre 1,2 million de personnes concernées. Mais il faut comprendre que tous les demandeurs d'emploi, à l'exception de ceux ayant les plus hauts revenus, conserveront l'intégralité de leurs droits. Ces droits seront simplement répartis différemment dans le temps, pour éviter par exemple que l'on puisse gagner plus au chômage qu'en travaillant.
L'objet de cette réforme est de changer les comportements afin qu'un plus grand nombre de personnes trouve un emploi stable. Cela va permettre de désendetter le système d'assurance chômage : en effet, à chaque fois que quelqu'un retrouve un emploi, c'est plus de cotisations et moins de dépenses. Et plus l'emploi est stable, plus les cotisations s'inscrivent dans le temps.
Les témoins de 2008 - je ne travaillais pas dans ce domaine à l'époque - nous indiquent que les réflexions sur l'abaissement du seuil à 4 mois pendant 28 mois pour bénéficier de l'assurance chômage ont émergé entre décembre et février 2008. La décision définitive a été prise en février 2009 au coeur de la crise. Il fallait avant tout protéger à court terme, plutôt qu'investir dans le futur.
Les assistantes maternelles conserveront le système de « l'activité conservée ». Ce terme technique désigne pour une personne qui a plusieurs employeurs - une assistante maternelle gardant plusieurs enfants de parents différents par exemple-, la compensation par l'allocation chômage de la période entre la fin d'un contrat et la signature d'un nouveau contrat. Ce sujet est particulièrement sensible dans des zones en baisse démographique. En outre, les assistantes maternelles sont en très grande majorité des femmes, en général mères de famille. Souvent, il s'agit de femmes seules. Beaucoup de ces femmes sont dans des situations assez précaires et ont des faibles revenus. Aussi, nous avons décidé de ne pas toucher à « l'activité conservée ». Je le dis ici publiquement. Cela sera confirmé par le décret. Nous avons ajouté un cas, puisque les assistantes maternelles n'ont plus le droit aujourd'hui d'accepter des enfants qui ne sont pas vaccinés. On peut comprendre cette interdiction en lien avec la politique affichée en matière de vaccination. Mais par conséquent, elles perdent un contrat et se retrouvent pénalisées. Les parents doivent prendre leurs responsabilités, mais il ne faut pas que l'assistante maternelle en fasse les frais.
Il va y avoir de nombreuses modifications en matière d'accompagnement avec l'application « Mon compte formation » du CPF. Les salariés vont pouvoir découvrir leurs droits et les exercer directement. Nous avançons bien sur ce sujet avec la Caisse des dépôts. Toutes les formations qualifiantes et certifiées seront intégrées dans cette application. Nous sommes le premier pays au monde à le faire. Singapour envisage également de le faire, dans une proportion moindre. Je peux vous dire que tous les pays de l'OCDE et du G7 sont extrêmement intéressés par l'expérience française. Si c'est un succès, je pense que nous ferons des émules.
Les nouvelles modalités du conseil en évolution professionnelle, seront opérationnelles sur tout le territoire au 1er janvier 2020. Tout demandeur d'emploi ou salarié pourra bénéficier d'un conseil en évolution professionnelle gratuit. J'ai également évoqué le droit à une formation sur-mesure à un emploi donné en préparation à la prise de cet emploi qui sera désormais systématique grâce au plan d'investissement dans les compétences. Les moyens que nous mettons en faveur de l'accompagnement sont sans précédent, et sont nécessaires pour que cette réforme soit une réussite.