Intervention de Jacques Bigot

Commission mixte paritaire — Réunion du 11 juillet 2019 à 14h05
Commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi relatif aux compétences de la collectivité européenne d'alsace

Photo de Jacques BigotJacques Bigot, sénateur :

Je veux, à titre liminaire, saluer moi aussi le travail des rapporteurs, particulièrement celui du rapporteur du Sénat. Mais si j'en juge par ce qui nous est proposé, le texte qui sortira de cette commission mixte paritaire est très proche de celui adopté par l'Assemblée nationale.

Dans un esprit consensuel, il n'appartenait pas au Sénat, représentant des collectivités territoriales, de s'opposer à la volonté qui s'était exprimée localement. Il n'en reste pas moins que nous devons la transparence et la clarté aux Alsaciens sur le contenu de ce projet de loi.

Ce texte est présenté, dans son intitulé même, comme un projet de loi « relatif aux compétences de la Collectivité européenne d'Alsace ». Son article 1er A, introduit par l'Assemblée nationale et maintenu dans la proposition de compromis qui nous est faite, dispose que « les départements du Bas-Rhin et du Haut-Rhin sont regroupés sous le nom de Collectivité européenne d'Alsace ». Mais c'est déjà juridiquement le cas, en vertu d'un décret ! Le législateur se borne ici à affirmer le nom de cette collectivité.

Il aurait fallu préciser que ces départements vont exercer les mêmes compétences que celles des autres départements, et davantage creuser les compétences nouvelles octroyées. Nous avons eu d'importants débats au Sénat sur leur périmètre et leur définition.

Il y a, dans la Déclaration de Matignon, des développements détaillés sur la compétence transfrontalière, qui font écho à une revendication notamment formulée par la présidente du conseil départemental du Haut-Rhin. Force est de constater que le dispositif proposé est extrêmement léger, ne rejoint pas les volontés exprimées préalablement et n'est pas conforme à l'esprit du traité d'Aix-la-Chapelle, dans la mesure où les compétences laissées à l'État demeurent fortes... L'évolution permise par le projet de loi est extrêmement faible.

Sur d'autres sujets, comme les routes, la nouvelle collectivité devra assumer une charge non négligeable - nous parlons ici de 300 kilomètres de routes - mais relativement cohérente dans la vallée du Rhin supérieur. La revendication importante de pouvoir instituer une écotaxe ne sera toutefois pas satisfaite alors même que le Sénat avait formulé une proposition très élaborée. Le compromis proposé renvoie à une ordonnance prise dans un délai de dix-huit mois. Ce choix conduira à ajouter, à la complexité technique du sujet, la complexité politique dont chacun a pu prendre conscience lors des débats au Sénat, des élus estimant qu'une telle taxe reportera une part du trafic sur les routes de la Moselle et des Vosges.

Nous avions trouvé, sur ce sujet comme sur d'autres, des consensus possibles. Mais les avancées adoptées par le Sénat n'ont malheureusement pas été retenues, faute de volonté de la part du Gouvernement et de la majorité de l'Assemblée nationale. En définitive, le consensus dégagé s'avère extrêmement mou. Il ne faudrait pas qu'il suscite de nouvelles revendications en Alsace.

Notre désir d'Alsace, souligné par le préfet de région, a-t-il été entendu et satisfait ? Peut-être le sera-t-il par la fusion des départements, qui permettra à l'Alsace de s'exprimer différemment au sein de la région et sans doute de retrouver sa propre identité.

Nous avons mesuré combien la question de la différenciation territoriale était complexe et difficile à appréhender, face à un jacobinisme encore prégnant. Encore faudrait-il, un jour, que les girondins se mettent d'accord sur leur conception de l'organisation territoriale pour avancer ensemble. Ce n'est pas ce texte qui nous le permettra.

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