Intervention de Benoît Tabaka

Commission d'enquête Souveraineté numérique — Réunion du 17 juillet 2019 à 16h00
Audition de M. Benoît Tabaka secrétaire général adjoint de google france

Benoît Tabaka, secrétaire général adjoint de Google France :

La souveraineté numérique est un sujet qui a émergé depuis ces cinq dernières années. Google est une entreprise créée il y a vingt-et-un ans par deux ingénieurs qui s'étaient fixé comme mission de garantir l'accès à l'information à tous. Ceci a conduit à la mise en service d'un moteur de recherche et d'un outil de messagerie pour rechercher, émettre l'information et publier des contenus, via notamment des plateformes de blog ou de vidéo, comme Youtube. Google est progressivement devenu l'un des principaux acteurs du web, qui a fait disparaître un certain nombre de barrières, en permettant notamment à de nombreuses PME d'accéder à une audience internationale et de décloisonner leurs réseaux de contacts. Du reste, toute personne, grâce au web, peut à la fois émettre et être le destinataire de l'information.

La souveraineté se définit autour de différents concepts. Le premier est économique : elle définit la capacité de développer des acteurs stratégiques sur son territoire. Dans notre société issue de la révolution numérique, la question de la place des acteurs stratégiques se pose. La France est ainsi en retard en matière de numérisation de son tissu industriel et économique : un commerçant français sera moins prompt que son homologue allemand à faire la démarche d'entrer dans un circuit de transformation numérique. La transformation numérique concerne également les acteurs industriels de plus grande ampleur, comme Airbus et Atos avec lesquels nous travaillons.

Notre objectif, chez Google, est d'accompagner tant les TPE-PME que les grands groupes industriels, grâce à des partenariats stratégiques, et non de nous substituer à eux. À titre d'exemple, nous collaborons avec Orange à la construction de son nouveau câble sous-marin entre la France et les États-Unis, ainsi qu'avec Alcatel pour celle du câble reliant l'Europe et l'Afrique. Nous travaillons également avec Air France sur les technologies d'intelligence artificielle afin d'améliorer sa flotte de fret, ainsi qu'avec Total, pour l'identification de puits de forage, et Carrefour, pour la transformation numérique de ses métiers.

En outre, Google, dont les centres d'intelligence artificielle se trouvent en France, travaille aux côtés des centres de recherche français, comme ceux de l'ENS (École normale supérieure) et de Polytechnique. Notre modèle de recherche est ouvert : avec plus 5 200 publications, nos résultats et un grand nombre de nos bases de données demeurent en libre accès.

En matière de sécurité, qui est l'une des autres composantes de la souveraineté, on a pu entendre, notamment durant vos auditions, que Google refuserait de se soumettre aux lois françaises et de coopérer avec la justice. Je vais être clair avec vous sur ce point : Google applique le droit français et coopère avec la justice française. Pour preuve, nous avons rejoint, au lendemain des attentats terroristes de 2015, le groupe de contact créé sous l'égide du Ministère de l'intérieur et destiné à favoriser l'échange d'informations et de bonnes pratiques entre les acteurs du numérique. Nous travaillons ainsi, en partenariat avec les Pouvoirs publics, tant au niveau national qu'européen, à la détection des contenus terroristes et haineux, ainsi qu'à la transmission, en cas d'urgence, de certaines données. Suite à la promulgation de la loi sur les fausses nouvelles, nous collaborons avec le Conseil supérieur de l'audiovisuel, devenu régulateur des activités numériques. En outre, l'année dernière, Google a répondu favorablement à plus de 11 000 demandes émanant des autorités françaises et nous concernant.

En ce qui concerne l'accès aux données, le Cloud Act, adopté par les États-Unis, visait à redéfinir l'ensemble des régimes spécifiques à l'accès aux données, suite à différentes décisions de jurisprudence. Il s'agit de mettre en place une relation bilatérale qui organise l'accès aux différentes données à la fois des autorités américaines et étrangères. Or, ces dispositions ne sont pas entrées en vigueur, en l'absence de conclusion des accords bilatéraux prévus, notamment entre l'Union européenne et les États-Unis. Le Cloud Act permet d'accéder à un certain nombre de données, à l'instar de ce que permet le droit français en autorisant l'accès aux informations sur nos serveurs. Ainsi, Google ne serait pas uniquement tributaire des seules demandes du gouvernement américain, mais aussi de l'ensemble des gouvernements signataires.

Par défaut, lorsque nous recevons une demande concernant l'un de nos clients, nous renvoyons cette demande à ce dernier. Google n'est qu'un hébergeur de données. Nos services permettent en outre aux entreprises clientes d'appliquer leur propre clef de chiffrement. Ainsi, quand bien même le Cloud Act entrerait en vigueur et obligerait Google à communiquer les données de ses clients, les informations chiffrées ne seraient pas transmises en clair aux autorités qui devraient alors les solliciter directement.

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