Intervention de Florence Parly

Commission d'enquête Souveraineté numérique — Réunion du 3 septembre 2019 à 11h00
Audition de Mme Florence Parly ministre des armées

Florence Parly, ministre :

On ne peut pas garantir que certains pays n'utilisent pas à des fins militaires des données individuelles. Je ne citerai aucun nom dans le cadre de cette audition publique, mais vous aurez sans doute deviné... Le risque existe, incontestablement.

Je relèverai aussi le rôle très important joué par le groupe Thales pour notre souveraineté numérique, l'acquisition stratégique majeure qu'il a récemment réalisée le confirmant. Les investissements réalisés par le groupe Orange y contribuent également.

Le combat militaire de demain sera de plus en plus connecté. D'ores et déjà, nos équipements militaires sont constitués de nombreux capteurs et logiciels, mais cette réalité sera multipliée par un facteur 50 ou 100 à l'avenir. Ainsi, les caractéristiques principales du programme d'équipements terrestres de nouvelle génération Scorpion ne résident pas tant dans le blindage et la maniabilité physique des véhicules que dans leur capacité à transmettre des flux de données en temps réel aux équipements avec lesquels ils interagiront. Nous pouvons mentionner également le système de combat aérien du futur, qui fait actuellement l'objet d'études.

Intégrer dans les équipements cette capacité d'échange de données avec des partenaires externes, c'est vraiment le défi technologique de demain pour nos armées. Il nous faudra non seulement concevoir des matériels furtifs et rapides qui volent, naviguent et roulent, mais aussi être capables d'aménager cette connectivité en toute sécurité, c'est-à-dire en la protégeant des interactions extérieures.

Je ne réponds pas directement à votre question sur le dimensionnement de nos capacités industrielles, monsieur le rapporteur, mais je peux en revanche vous dire que nous mobilisons tous les moyens dont nous disposons, dans mon ministère ou en dehors - Bruno Le Maire vous parlera plus doctement que moi du plan Nano.

S'agissant des moyens propres au ministère des armées, la loi de programmation militaire a fait du renseignement et du cyber ses deux axes prioritaires. On peut naturellement discuter de l'ampleur de l'effort consenti et de sa pertinence, mais il n'y a aucune naïveté de notre part, nous sommes parfaitement conscients de l'importance de l'enjeu.

Quant au défi des ressources humaines, nous sommes conscients qu'après avoir été attirés vers la finance, nos meilleurs cerveaux sont fortement attirés par toutes ces entreprises qui, pour beaucoup d'entre elles, se situent à l'ouest du continent américain.

Pour réagir, ne sous-estimons pas les potentialités de la loi de transformation de la fonction publique, qui assouplit considérablement les possibilités de recrutement de contractuels et leur offre une nouvelle grille de rémunération, plus en phase avec le marché de l'emploi. Le ciblage féminin n'est pas non plus un gadget, car, dans ce domaine-là également, nous ne pouvons pas nous priver de la moitié du vivier de talents.

Enfin, la réserve cyber comprend presque une centaine d'hyper-spécialistes et d'experts de leur domaine. Il s'agit de salariés d'entreprises du secteur privé qui mettent quotidiennement leurs compétences au service de nos armées.

Nous devons développer l'ensemble de ces politiques. La prise de conscience est réelle. Il nous reste maintenant à faire le meilleur usage possible des nouveaux outils à notre disposition. Avant de dire que nous ne faisons pas assez, nous devons d'abord apporter la démonstration que nous avons poussé jusqu'au bout l'utilisation des outils existants.

Israël constitue en effet un exemple d'un petit pays extrêmement actif et performant ; l'Estonie également a développé des filières de formation très performantes et produit un grand nombre d'ingénieurs cyber en proportion de l'importance de sa population.

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