Intervention de Cyril Pellevat

Commission de l'aménagement du territoire et du développement durable — Réunion du 17 septembre 2019 à 15h30
Projet de loi relatif à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire — Examen du rapport et du texte de la commission

Photo de Cyril PellevatCyril Pellevat, au nom de la commission des affaires européennes :

Pierre Médevielle, qui regrette de ne pas pouvoir être des nôtres cet après-midi, m'a chargé de vous présenter ses observations.

Dans le cadre de sa mission de veille sur les surtranspositions inscrite dans notre règlement, la commission des affaires européennes a formulé plusieurs observations à la fin du mois de juillet sur les dispositions du projet de loi qui transpose les directives adoptées en mai 2018 dans le cadre du paquet « économie circulaire », complété en juin dernier par la directive concernant certains produits en plastique.

Le paquet « économie circulaire » fixe les objectifs chiffrés de recycler a minima à l'horizon de 2025 et 2030. Les objectifs globaux sont déclinés par matière, avec une attention particulière sur le plastique, et par secteur. Il précise et renforce le cadre européen, notamment pour la collecte séparée des déchets municipaux et des biodéchets ou encore la responsabilité élargie des producteurs.

Fondées sur le principe du pollueur-payeur, de nouvelles filières de traitement devront en outre être mises en place pour les filtres de cigarette, les lingettes pré-imbibées et les emballages non ménagers. Certaines des prescriptions sont impératives, comme l'interdiction de mise sur le marché de produits à base de plastique oxodégradable ou la mise en place de systèmes de reprise, de collecte et de valorisation des emballages et déchets d'emballage en vue de leur réemploi. Le projet de loi les transpose strictement en droit interne. La commission des affaires européennes a toutefois constaté que celui-ci anticipe la date d'application d'une obligation en matière de traitement des emballages de la restauration rapide.

En outre, le texte prévoit des mesures d'application pour la mise en oeuvre d'obligations européennes, notamment en matière de suivi et de contrôle des filières REP. Là encore, il va au-delà des textes européens dans plusieurs cas, notamment les garanties financières requises pour l'agrément des éco-organismes et la prise en compte des coûts de nettoyage et de certains coûts liés à la prévention des déchets dans le calcul de l'écocontribution. De même, le champ de l'obligation de reprise des produits usagés va au-delà de celui de la directive. Par ailleurs, les directives renvoient aux États membres le soin de prendre des mesures appropriées, qu'elles encadrent pour atteindre les objectifs qu'elles fixent. Elles formulent des préconisations ou des suggestions pour faciliter l'atteinte de ces objectifs, par exemple en matière de disponibilité des pièces détachées ou d'information des consommateurs ; le projet de loi en reprend plusieurs. Ces mesures ne sont pas imposées par le droit européen, mais elles s'inscrivent dans la logique d'atteindre des objectifs européens de réduction de la production de déchets et de lutte contre le gaspillage. Je citerai l'information des consommateurs sur les qualités environnementales des produits, leur réparabilité et la disponibilité des pièces détachées, l'interdiction de la destruction de certains invendus non alimentaires ou le renforcement des conditions d'établissement du diagnostic sur le caractère réutilisable des produits et déchets dans le secteur du BTP.

Pour favoriser le recyclage, le projet de loi introduit également un taux minimum d'incorporation de matières recyclées dans certains produits ; il prévoit la création de cinq nouvelles filières purement nationales et la possibilité de mettre en place des systèmes de consigne, notamment pour les bouteilles en plastique contenant des boissons.

La question centrale est celle de la justification de ces surtranspositions au regard notamment de leurs conséquences sur la compétitivité des opérateurs économiques. Ainsi que notre collègue Pierre Médevielle l'a rappelé à Mme Poirson mardi dernier, il est impératif que toutes ces conséquences soient évaluées au regard des objectifs européens et nationaux et qu'elles n'introduisent pas de distorsions de nature à pénaliser les opérateurs français par rapport à leurs concurrents européens. Il ne suffit pas de répondre que les filières REP visent tous les producteurs, qu'ils soient établis en France ou à l'étranger. Il convient de procéder à une analyse détaillée et de mesurer l'impact des mesures hors filières et les coûts non supportés par les producteurs ou les distributeurs étrangers pour ce qui concerne les produits qu'ils ne mettent pas sur le marché français. Au-delà, la commission des affaires européennes estime que le renvoi à des ordonnances, dont le contenu n'est pas précisé, n'est pas une réponse au risque de surtransposition.

En conclusion, le bien-fondé des objectifs n'est pas contestable. C'est sous l'angle de la mise en oeuvre de ces derniers que la commission des affaires européennes a souhaité attirer votre attention sur les transpositions identifiées dans les observations qui figurent en annexe du rapport d'information, qu'elle a approuvé.

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