Intervention de Brune Poirson

Réunion du 24 septembre 2019 à 15h00
Lutte contre le gaspillage et économie circulaire — Discussion en procédure accélérée d'un projet de loi dans le texte de la commission

Brune Poirson :

Il faut faire attention : nous devons veiller à fournir des garde-fous également dans la consigne pour recyclage. En l’état, nous n’apportons pas suffisamment de garanties attendues par les collectivités locales pour répondre aux interrogations parfois légitimes que soulève ce nouveau système.

La version adoptée en commission conduit in fine à laisser le champ totalement libre aux acteurs industriels de la boisson et de la grande distribution. Ils pourraient organiser à leur main, sans concertation, un système de consigne dans lequel les collectivités seraient hors-jeu et n’auraient pas leur mot à dire. Cela est d’autant plus grave que, dans le même temps, de nombreux acteurs industriels se sont déjà organisés pour mettre en place, sans contrainte, ce que le projet initial visait à encadrer.

C’est pourquoi nous avons déposé des amendements qui illustrent plusieurs de nos principes.

Premier principe : un dispositif de consigne pour recyclage, s’il devait être mis en place, devrait permettre de soutenir et de renforcer les initiatives de consigne pour réemploi. Il n’y a pas d’opposition entre les deux systèmes ; bien au contraire, de nombreuses synergies existent. Aucun système de consigne pour recyclage ne pourra être mis en œuvre sans qu’il soit adossé, en parallèle, à un objectif de réemploi pour la filière emballage.

Deuxième principe : ce dispositif doit avoir un impact financier positif pour les collectivités, et ce au travers de deux leviers.

Le premier de ces leviers est la réaffirmation de ce que prévoit la loi Grenelle I sur la prise en charge par l’éco-organisme de 80 % des coûts nets optimisés du bac jaune – la collecte et le tri –, et ce qu’il y ait disparition ou non des bouteilles en polytéréphtalate d’éthylène, ou PET, et des canettes, en admettant que ce soit le scénario retenu, ce que j’ignore. Cette mesure législative est sanctuarisée par une directive européenne de 2018, nous la réaffirmons dans le présent texte et nous pourrons le faire encore par voie d’amendement.

En outre, les bouteilles pourront être déconsignées en sortie de centre de tri. Cela représente des montants financiers très importants, environ cinq fois supérieurs aux sommes versées aujourd’hui par Citeo pour la collecte et le tri de ces mêmes bouteilles. On estime même que cela pourrait représenter un gain financier pour les collectivités compris entre 50 et 124 millions d’euros par an selon les hypothèses retenues. Il s’agit là des bouteilles captées par le bac jaune.

Troisième principe : les collectivités territoriales doivent être associées à la gouvernance du système de consigne qui sera mis en place. Rien ne pourra être fait sans les collectivités locales. Elles doivent avoir leur mot à dire sur les conditions et les modalités du déploiement de ces consignes et, notamment, sur l’emplacement des machines à déconsignation, de manière à accompagner les politiques de redynamisation territoriale et, en particulier, pour éviter que ces machines, si elles devaient voir le jour de façon massive, se retrouvent sur les parkings des supermarchés, modèle contre lequel nous nous élevons tous. Soyons cohérents ! Les collectivités doivent également pouvoir, si elles le souhaitent, acquérir des machines et être rémunérées par l’éco-organisme pour le service rendu.

Nous poursuivrons dans les prochaines semaines, avant l’examen de ce texte par l’Assemblée nationale, la consultation commencée cette année avec les collectivités pour définir ensemble la gouvernance du dispositif, son financement et son organisation à la lumière des questionnements et des recommandations qui seront apparus lors de l’examen parlementaire du projet de loi.

Je défendrai nos amendements sur ce sujet au cours de ces débats, parce que je crois que nous avons le même objectif : définir le cadre le plus sécurisé et le plus sécurisant possible pour les collectivités. Notre volonté est bien d’agir en garant de l’intérêt général, comme vous, de manière à nous assurer que les conditions de mise en œuvre d’une consigne généralisée, si elle devait voir le jour sur les territoires, répondent bien à une ambition environnementale et à un intérêt économique ; il faut aussi que cette consigne soit développée de manière complémentaire à notre outil de collecte de tri organisé depuis des années et qui fonctionne très bien, géré qu’il est par les collectivités territoriales.

Mesdames, messieurs les sénateurs, j’en arrive au terme de cette longue présentation…

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