Monsieur le Premier ministre, vingt ans de développement à l’abri de toute régulation ont permis aux géants de l’internet d’être les maîtres du jeu et, peut-être bientôt, du monde. Google détient 90 % du marché des moteurs de recherche. Facebook absorbe les deux tiers des publicités sur internet. Amazon concentre la moitié des ventes en ligne aux États-Unis.
En commençant à fixer un cadre et des règles à ces nouveaux empires, la France s’est attiré la fronde des firmes concernées et l’hostilité du président des États-Unis qui nous menace de rétorsion sur les vins français.
Hier, Amazon a mis en œuvre sa menace de reporter sur les vendeurs de sa plateforme la taxe GAFA adoptée le 11 juillet dernier ; 10 000 PME se retrouvent pieds et poings liés, et certaines devront fermer leurs portes.
Le 24 octobre prochain, Google entamera un bras de fer contre la nouvelle loi française relative aux droits voisins, qui prévoit une redistribution des revenus du numérique au profit des éditeurs de presse. L’objectif de Google est de forcer les éditeurs à céder tous leurs droits et de faire pression sur les autres gouvernements européens pour une transposition plus favorable de la directive européenne.
Monsieur le Premier ministre, le Sherman Act américain de 1890 et les règles européennes contre les abus de position dominante ne sont plus adaptés aux pratiques des Gafam – Google, Apple, Facebook, Amazon et Microsoft. Confisquer les données de la vie privée, racheter les start-up concurrentes, exclure ses rivaux de la publicité en ligne, piller la production des entreprises de presse, ce n’est plus du tout la même chose que capter 90 % du marché du dentifrice.
Aujourd’hui, les monopoles des Gafam sont sans doute beaucoup plus préoccupants que ne l’étaient celui de la Standard Oil en 1911 et celui de AT&T en 1982.
Des deux côtés de l’Atlantique, de nouvelles lois antitrust sont nécessaires et de plus en plus évoquées. Il est urgent que l’Europe se saisisse de ce dossier. Quelle est la position du gouvernement français à ce sujet ?