Je m’inscrirai dans la continuité du propos de mon collègue Jean-Pierre Leleux.
C’est avec un œil de juriste que j’ai décidé d’aborder le débat que nous avons aujourd’hui.
Le développement des intelligences artificielles fait partie des plus grandes avancées scientifiques de l’histoire de l’humanité. Cette révolution technologique a de plus en plus d’impact dans nos vies quotidiennes, on l’a vu. Imaginer les applications matérielles des intelligences artificielles peut susciter l’émerveillement, mais il nous faut aussi examiner des cas pratiques. Vous venez de l’aborder, monsieur le secrétaire d’État, étudier, par le prisme du droit, un accident de la route impliquant un véhicule autonome est tout aussi intéressant.
Il faut se poser des questions pragmatiques, simples, pour cerner les problèmes juridiques, par exemple en droit de la responsabilité. En tant que législateurs, nous devons nous interroger sur la place que prendront les intelligences artificielles dans notre droit. Qui devrait-on considérer comme pénalement responsable, lors d’un accident grave causé par une voiture autonome ? Le conducteur ? Le propriétaire ? Le constructeur ? L’informaticien ? Ou encore l’auteur des algorithmes ?
On considère aujourd’hui que le conducteur doit toujours être en mesure de prendre le contrôle de sa voiture. Il serait donc en théorie responsable en cas d’accident, mais qu’en serait-il si les véhicules devenaient totalement autonomes ?
La même question pourrait se poser pour les intelligences artificielles prédictives en matière militaire. Qui sera responsable en cas d’échec d’une mission ? Le décideur ou le robot ? J’ai entendu ces questionnements pour la première fois au forum international de la cybersécurité, organisé à Lille, chaque mois de janvier depuis vingt ans, par la gendarmerie nationale. Les militaires ne veulent pas dépendre de l’incontrôlable, ils veulent rester maîtres de toute leur stratégie.
La technologie évolue désormais si vite que nous nous devons de prendre les devants. Gouverner c’est prévoir, n’est-ce pas ?
Monsieur le secrétaire d’État, envisagez-vous cet aspect juridique, ce regard destiné à encadrer de la loi ?