Intervention de Albéric de Montgolfier

Commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation — Réunion du 9 octobre 2019 à 9h00
Évaluation de la transformation de l'impôt de solidarité sur la fortune isf en impôt sur la fortune immobilière ifi et de la création du prélèvement forfaitaire unique pfu — Communication

Photo de Albéric de MontgolfierAlbéric de Montgolfier, rapporteur général :

J'ajoute que l'assiette de l'ISF a été progressivement mitée par les exonérations, notamment sur l'outil de travail, et les abattements, si bien que seule la moitié du patrimoine taxable était effectivement taxée. Le plafonnement explique aussi le faible rendement de l'impôt. La « veuve de l'Île de Ré » était sans doute taxée, mais les plus hauts patrimoines échappaient à cet impôt. C'est évidemment le contraire de ce qui est en général prôné, à savoir un impôt avec une assiette large et des taux bas. L'ISF était un impôt avec une base de plus en plus étroite et des taux élevés.

Quand l'impôt sur les grandes fortunes (IGF) a été créé en 1982, le taux marginal d'imposition était de 1,5 %, mais l'État empruntait à des taux de 15 % ou 16 % ! Le taux marginal d'imposition correspondait alors à 10 % du rendement d'un emprunt d'État. Un détenteur de patrimoine pouvait à l'époque payer l'IGF sans amputer son capital. Aujourd'hui, le taux marginal est très largement au-dessus des taux d'intérêt sans risque. L'inconvénient est que les taux des placements sont très élevés et qu'ils n'ont pas été revalorisés, tout comme les barèmes. De plus en plus de propriétaires de leur résidence principale à Paris sont assujettis à l'IFI, compte tenu de l'évolution des prix de l'immobilier, alors même que le barème n'a pas été revalorisé. La non-revalorisation du barème et la non-prise en compte du taux réel des placements conduisent à des situations problématiques.

Les trois pays qui ont conservé un ISF ont une imposition sur les successions et les donations beaucoup plus faible que la France. La France combinait en 2017 à la fois un impôt sur la fortune et des droits de mutation à titre gratuit élevés. Ces droits s'élevaient à 0,6 % en 2017, contre 0,2 % en Espagne. La France est championne de l'imposition sur le stock de patrimoine.

Le risque est de provoquer des expatriations fiscales, en particulier à l'occasion de la perte d'un régime d'exonération, par exemple le pacte Dutreil ou l'exonération au titre des biens professionnels. L'expatriation était sans doute au coeur de la réforme ayant conduit à la suppression de l'ISF. À titre personnel, je considère que, davantage que le départ de redevables âgés et retraités, c'est la perte d'entrepreneurs jeunes qui est grave, car elle constitue la perte de potentiels créateurs d'entreprises et de base taxable au titre de multiples impositions.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion