Monsieur le Premier ministre, monsieur le ministre, mesdames les secrétaires d’État, l’immigration n’est pas un tabou, mais bien votre totem. À preuve, avec près de vingt réformes en trente ans, un an après que la loi Asile et immigration de M. Collomb a été promulguée, nous voici de nouveau à débattre de la politique migratoire de la France et de l’Europe : il n’y a pas besoin de trouver un justificatif pour ce débat.
Alors, on peut s’interroger. Que s’est-il passé depuis le vote de la dernière loi ? Pourquoi proposer un débat sous ce format précis ? Est-ce pour revenir sur les dispositifs les plus graves de la loi Collomb, tels que la suspicion généralisée à l’égard des demandeurs d’asile et la multiplication du recours à l’enfermement administratif, y compris d’enfants, ou encore les expulsions vers des pays en guerre ? Est-ce pour améliorer les conditions d’accueil dans les préfectures ?
Monsieur le Premier ministre, je vous ai écouté lundi à l’Assemblée nationale et cette après-midi au Sénat : visiblement, ce n’est pas le cap voulu. En résumé, la dernière loi adoptée en matière d’immigration était déjà très dure, et vous venez aujourd’hui nous expliquer comment être encore plus dur.
Je ne m’y attarderai pas longtemps, mais les visées politiciennes et électoralistes évidentes que recèle ce débat sont dangereuses : comme on l’a encore entendu il y a quelques secondes, elles ouvrent les vannes de logorrhées haineuses, violentes, vulgaires, mêlant sans vergogne religion et nationalités, de la part de négationnistes et de personnages condamnés pour propos racistes.
Mais revenons à notre sujet. La crise économique, sociale et environnementale que traverse notre pays est profonde. Elle provoque colère et angoisse, à l’origine en particulier du mouvement des « gilets jaunes ». Pourtant, le fameux grand débat national nous aura au moins enseigné ceci : les questions migratoires sont loin d’être parmi les premières préoccupations des Français