Pas seulement, monsieur le président de la commission des lois.
Jacqueline Gourault, brillante sénatrice devenue brillante ministre, avait au Sénat comme au Gouvernement un brillant collègue, Jacques Mézard, qui est devenu un brillant membre du Conseil constitutionnel. Dans l’histoire, récente ou plus lointaine, plusieurs sénateurs sont d’ailleurs devenus des juges constitutionnels.
En tout cas, le Gouvernement a un devoir – vous avez vous-même été membre d’un gouvernement, monsieur Sueur – : s’assurer, grâce aux informations disponibles en provenance du secrétariat général du Gouvernement, de la direction générale des collectivités territoriales, du Conseil d’État ou d’autres services ou organismes compétents, que le texte que nous allons voter, quelles que soient nos convergences et divergences, est le plus sécurisé possible d’un point de vue constitutionnel. Nous devons aux élus locaux une loi – j’espère qu’elle pourra entrer en vigueur le 1er janvier prochain – qui ne souffre pas d’insécurité juridique, en particulier d’un point de vue constitutionnel.
Or les attendus de la décision du Conseil constitutionnel Commune de Salbris peuvent nous conduire à penser que la proposition formulée ici est inconstitutionnelle. Tous les sénateurs connaissent parfaitement cette décision, qui n’a pas été rendue par le Gouvernement – ce n’est fort heureusement pas son rôle. C’est pourquoi il me semble que la commission a adopté cette disposition comme une forme d’appel. Je le répète, elle ne me pose pas de problème d’opportunité, et je serais très heureux de passer quelques heures à travailler dessus, mais elle ne nous paraît tout simplement pas conforme à la Constitution.
Le président de la commission des lois lui-même, qui fut conseiller d’État, a émis, je crois, en commission – j’ai un peu regardé les débats – quelques questionnements sur le sujet, mais je ne veux pas parler à sa place. Ce que je sais, en revanche, c’est que vous avez déposé récemment, monsieur Bas, une proposition de loi constitutionnelle. J’imagine qu’elle a pour vocation de nourrir le débat que le Gouvernement entretient avec la Haute Assemblée sur la future réforme non seulement de la décentralisation, mais également de la Constitution, que je souhaite. Si vous-même avez mis ces dispositions dans une proposition de loi non pas simple ni organique, mais constitutionnelle, j’imagine que vous deviniez qu’elles pouvaient être de nature constitutionnelle.
Pardon de cette longue démonstration, qui n’a pas pour objectif d’éviter le débat, auquel je suis favorable. Si je me suis attardé hier soir sur cette affaire de scrutin de liste, c’est que cela fait vraiment partie de mes convictions profondes en tant qu’élu local. Cependant, je pense qu’il faut supprimer cet article pour des raisons non pas politiques, mais éminemment juridiques. À défaut, ce texte de loi sera fragilisé. Malheureusement, à mon avis, nous devrons passer par une révision constitutionnelle pour traiter durablement cette question.