Ma première remarque porte sur l'utilité de la coordination au niveau européen. On voit que la force de frappe est bien supérieure lorsque l'ensemble des pays européens se fédère sur cette question, comme sur d'autres. J'ai eu à traiter des véhicules électriques, pour lesquels a été évoqué un « Airbus de la batterie », avec un plan conjoint franco-allemand. La coordination sur l'intelligence artificielle est-elle de même nature, portant à la fois sur la recherche et sur les applications ? Pour les applications militaires, c'est peut-être un peu différent. Pouvez-vous nous en dire plus, à l'heure où la concurrence internationale est très forte et pas toujours aux mains des États ? Je pense aux GAFAM (Google, Apple, Facebook, Amazon et Microsoft) et autres BATX (Baidu, Alibaba, Tencent et Xiaomi).
Par ailleurs, en introduction vous avez dit que désormais, l'intelligence artificielle repose sur l'utilisation de données en masse. Je m'interroge toujours, comme je l'ai dit dans le cadre de la commission d'enquête sur la souveraineté numérique qui s'achève cette semaine, dont le rapporteur est Gérard Longuet, sur l'acceptation par le grand public de la communication de données parfois personnelles. Particulièrement en France, il existe une forme de réticence assez aiguë. On la constate, par exemple, pour l'installation des compteurs Linky, alors que tout laisse à penser qu'au final les interprétations possibles des données d'usage sont assez mineures. Comment l'État peut-il incarner un véritable tiers de confiance ? Vous avez mentionné les données de santé, beaucoup plus sensibles. S'agissant de ce tiers de confiance, l'idée d'un cloud national, souverain, est quasiment abandonnée aujourd'hui, voire menacée par l'émergence de l'ordinateur quantique, capable de casser n'importe quel code de chiffrage des données. Quelles sont les perspectives pour l'usage en masse des données et les assurances susceptibles d'être données aux particuliers qui confient leurs données ?