Simon Sutour, Christophe-André Frassa et moi-même nous sommes récemment rendus à Monaco dans le cadre du suivi des négociations en cours pour la conclusion d'un accord d'association avec l'Union européenne. La perspective de la signature à court terme d'un tel accord semble s'éloigner mais nous souhaitons faire un bilan des efforts engagés. Il y a quelques semaines, nos collègues Laurence Harribey et Cyril Pellevat ont rendu compte du projet d'accord-cadre entre l'Union européenne et la Suisse. Dans les deux cas, l'Union européenne souhaite normaliser ses rapports avec ce qu'elle désigne comme « petits États ». En ce qui concerne Monaco, Il s'agissait pour nous d'appréhender plus précisément les différentes positions et attentes qui se sont exprimées et parfois cristallisées au sein de la Principauté. Nous avons souhaité vous faire part de la teneur de nos échanges sur place car, au-delà des prises de position politique, l'approfondissement des relations entre l'Union et Monaco est l'intérêt des deux parties, peut-être plus encore de Monaco que du reste de l'Union.
Il s'agit d'assurer la pérennité du succès d'un modèle monégasque fondé, certes, sur le respect de certaines spécificités locales, mais aussi sur son intégration dans le tissu économique européen. Il apparaît d'ailleurs à ce titre particulièrement opportun pour la Principauté d'aller au-delà des conventions existantes avec la France. Un accord global avec l'Union européenne permettrait une émancipation de la relation bilatérale et une véritable intégration au marché intérieur avec, à terme, une diversification et une dynamisation de l'économie monégasque.
L'enjeu est aussi le respect des quatre libertés et la préservation de l'intégrité du marché intérieur européen. C'est un débat précisément d'actualité de l'autre côté de la Manche. Les conditions d'accès octroyées à des États tiers sont particulièrement sensibles dans le contexte des négociations en cours avec la Suisse et le Royaume-Uni.
Dans quel contexte s'inscrit cette négociation ?
Bien que la Principauté de Monaco soit considérée comme un État tiers à l'Union européenne, elle n'en est pas moins un acteur continental estimé et reconnu par les États membres. Cette négociation s'inscrit ainsi dans le cadre de relations déjà solides entre la Principauté de Monaco et l'Union européenne. Cette dernière est un partenaire incontournable pour la Principauté de Monaco avec laquelle elle entretient des relations étroites mais fragmentées, notamment dans le domaine pharmaceutique, cosmétique ou encore policier. Ces échanges sont le plus souvent régis par des accords bilatéraux franco-monégasques. La France participe en effet activement à l'inscription de Monaco dans le contexte européen et consolide de fait ses liens avec la Principauté. Le cadre privilégié des relations bilatérales entre la France et Monaco, qu'il conviendra tout à la fois de préserver et de faire évoluer, repose notamment sur 132 conventions bilatérales de toute nature - c'est le même ordre de grandeur avec la Suisse. Ainsi, en vertu de 2 accords bilatéraux conclus avec la France, le territoire de la Principauté est englobé dans l'espace Schengen, bien que Monaco ne soit pas partie à la Convention. Pour l'heure, les Monégasques, étant des ressortissants d'État tiers, doivent solliciter une autorisation pour étudier ou travailler dans un État membre de l'Union. Toutefois, la libre circulation des ressortissants de l'Union et de Monaco est assurée sur l'ensemble du territoire Schengen et les autorités françaises se chargent des contrôles aux passages frontaliers autorisés. D'ores et déjà, 92 % de la population active monégasque est constituée de ressortissants européens. Depuis 1968, Monaco est aussi incluse dans le territoire douanier de l'Union européenne du fait d'une Convention douanière conclue avec la France. Les accords franco-monégasques signés en 1963 et en 2003 permettent, en outre, l'intégration de Monaco dans le système européen de TVA. La Principauté a été autorisée également à utiliser l'euro comme sa monnaie officielle.
C'est l'intérêt des deux parties de trouver un accord et les autorités monégasques devraient comprendre que c'est d'abord et avant tout l'intérêt de la pérennité du modèle économique monégasque. Je passe la parole à mon collègue Simon Sutour.