Intervention de Didier Mandelli

Mission commune d'information sur le sauvetage en mer — Réunion du 22 octobre 2019 à 13h30
Examen et adoption du rapport de la mission d'information

Photo de Didier MandelliDidier Mandelli, rapporteur :

Mes chers collègues, je vous remercie d'avoir participé aux déplacements et auditions qui ont été organisés.

Nous avons apporté la dernière main à ce rapport d'information tôt ce matin. Quelles en sont les principales thématiques ? La première partie relate ce que nous avons entendu, vu et constaté. Nous avons pu mesurer à quel point l'organisation était complexe, notamment lors du déplacement à Brest. Pour autant, tout cela fonctionne assez bien, car il n'existe qu'un seul décideur, le préfet maritime, qui assume la responsabilité des opérations, les centres régionaux opérationnels de surveillance et de sauvetage (Cross) étant chargés de l'opérationnel.

Les utilisateurs de la mer sont de plus en plus nombreux, avec des niveaux de formation variables, et le nombre d'interventions est élevé : on compte plus de 30 000 interventions par an, avec des moyens qui restent maîtrisés. Par rapport à de nombreux autres pays, le coût du sauvetage en mer en France est exemplaire : dans le rapport d'information, on parle d'un « bon rapport qualité/prix » ! Au regard des moyens engagés, des résultats obtenus et de l'euro engagé, c'est assez exceptionnel.

Les dons et surtout les legs représentent une part importante des financements mais ils sont aléatoires. Or la Société nationale de sauvetage en mer (SNSM) a des besoins importants d'investissement et vient de signer un contrat sur cinq ans pour 35 bateaux, alors que le besoin global est de 140 bateaux en renouvellement. Pour les bateaux restants, le financement manque encore aujourd'hui.

Certains financements nouveaux ont été institués récemment pour la SNSM. Ainsi, la taxe sur les éoliennes maritimes devrait rapporter à terme 2,5 millions d'euros par an, mais cela ne représente que 5 % des ressources et n'interviendra pas avant 2023.

Le rapport d'information pointe également les difficultés des collectivités territoriales, notamment les départements et les régions, pour connaître le fléchage des subventions de fonctionnement.

Les propositions contenues dans le rapport d'information portent sur trois domaines : le statut des bénévoles et leur formation, le financement, la gouvernance ou le fonctionnement de la SNSM.

Première recommandation, conforter les bénévoles dans leurs missions, par une meilleure reconnaissance de leur action, tout en exprimant la volonté de ne pas surcharger les collectivités territoriales - il n'appartient pas à ces dernières d'assurer l'ensemble des financements et des charges liés au sauvetage en mer. De nombreuses mesures sont proposées sur la formation des bénévoles, qui est payante pour les stations et dont le seul centre se trouve à Saint-Nazaire. Nous ne souhaitons pas remettre en cause le statut du bénévolat ; nous voulons au contraire l'encourager.

Deuxième recommandation, garantir le financement des investissements sur le long terme. Nous préconisons une visibilité sur dix ou quinze ans, avec des programmes prévisionnels qui soient validés par les régions et les départements qui auront à les financer. Bien sûr, l'État doit prendre toute sa part. Parmi les mesures phares, nous souhaitons que les stations n'aient plus à financer une part de 25 % des investissements. Nous considérons que cela revient à l'État, pour libérer les bénévoles de ce temps de collecte - d'aucuns ont même parlé de « quête » - ; tous ceux que nous avons rencontrés se sont exprimés en ce sens. Il faut garantir les investissements et assurer l'entretien, la maintenance régulière et le renouvellement de la flotte.

L'ensemble des usagers de la mer devraient participer au financement du sauvetage, par l'affectation du produit de taxes existantes, notamment le droit annuel de francisation et de navigation (DAFN), ou par le développement du recours à l'assurance, notamment pour l'assistance et le remorquage.

La gouvernance est, à mon sens, au coeur des problèmes que rencontre la SNSM.

Étant reconnue d'utilité publique, la SNSM doit justifier d'un nombre minimum d'adhérents et d'un budget de 46 000 euros - largement atteint. Son fonctionnement interne doit également être démocratique, ce qui, à mes yeux, n'est pas le cas. La SNSM est une association qui fonctionne sans adhérents, avec des stations locales qui n'ont aucune existence juridique, des présidents de station, des trésoriers de station et un délégué départemental désignés par le siège. Nous proposons donc qu'elle adopte un fonctionnement similaire à celui de la protection civile.

De plus, les collectivités territoriales ne sont pas associées aux prises de décision concernant les stations locales. Des assemblées générales départementales se réunissent, mais elles n'ont aucune existence juridique et elles ne présentent ni rapport moral ni rapport financier. Nous souhaitons que les bénévoles deviennent adhérents, et qu'ils puissent ainsi participer aux assemblées générales. Nous souhaitons également que les présidents de station et les délégués départementaux soient élus.

Par ailleurs, le rôle de l'État doit être clarifié. Sept représentants des ministères siègent au conseil d'administration de la SNSM - ils y sont plus nombreux que les bénévoles. Cela pose la question du rôle de l'État : la SNSM est-elle réellement une association ? Si elle assume une mission de service public, l'État doit prendre ses responsabilités.

Ce rapport est très attendu par la SNSM et le Gouvernement, qui ne pensait pas qu'il serait rendu si rapidement. Nos propositions pourront ainsi alimenter les débats lors de la table ronde qu'il organise le 7 novembre prochain, puis le Premier ministre fera ses annonces début décembre lors du Cimer.

Une augmentation du budget de la SNSM de 4,5 millions d'euros a certes été votée hier par l'Assemblée nationale, mais cette enveloppe est prélevée sur le programme n° 205, au détriment des Cross et de l'action de sécurité en mer. Ce sont des vases communicants.

Nous pensons qu'il faut explorer d'autres pistes. Les taxes sur les assurances représentent 147 millions d'euros qui vont dans le budget de l'État, et le DAFN, 38 millions d'euros qui vont au conservatoire du littoral. Les fonds versés par les plaisanciers dans ce cadre devraient être réaffectés vers le sauvetage.

Nous n'avons pas souhaité préconiser la création d'une taxe supplémentaire, mais nous émettons l'idée d'une contribution volontaire dans le cadre de l'achat de matériel comme les planches à voile ou les paddles.

Dans ce rapport, nous nous sommes efforcés de traduire tout ce que nous avons entendu lors de nos déplacements.

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