Intervention de Pascale Bories

Réunion du 22 octobre 2019 à 14h30
Renforcement de l'encadrement des rave-parties — Adoption d'une proposition de loi dans le texte de la commission modifié

Photo de Pascale BoriesPascale Bories :

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, j’ai souhaité présenter cette proposition de loi visant à renforcer l’encadrement des rave-parties, car ces dernières se multiplient dans mon département et en France depuis plusieurs années maintenant, suscitant un sentiment impuissance chez les maires des communes concernées, qui m’ont sollicitée.

Je voudrais entamer ce propos introductif en évoquant un exemple emblématique : en mars de cette année, une rave-party illégale a rassemblé près de 700 personnes à Lédenon, dans le Gard. Ce sont les habitants des villages des alentours, dérangés par les nuisances sonores à 2 heures du matin, qui ont alerté les gendarmes. La rave-party s’est tenue sur un terrain privé, sans autorisation préalable du propriétaire. Les gendarmes sont donc intervenus pour y mettre fin. Les participants avaient emprunté des voies de défense des forêts contre l’incendie, exclusivement réservées aux sapeurs-pompiers, ce qui a engendré la détérioration de ces voies : 160 conducteurs participant à cette fête y ont été verbalisés par les gendarmes. Sept infractions liées aux stupéfiants ont été relevées et trois pour des alcoolémies élevées. Surtout, la dégradation des lieux constatée le lendemain était éloquente : un terrain dévasté, des déchets partout et des résidus de drogues jonchant le sol.

Devant la recrudescence de ces rave-parties, l’encadrement de leur pratique avait déjà été remanié en 2001, puis en 2002, par des textes venant modifier la loi du 21 janvier 1995 d’orientation et de programmation relative à la sécurité. L’objectif était déjà d’optimiser la sécurité de ces rassemblements, dont je rappelle la définition : festifs, à caractère musical, organisés par des personnes privées dans des lieux qui ne sont pas au préalable aménagés à cette fin, et répondant à certaines caractéristiques fixées par décret.

Les modifications prévoyaient notamment une déclaration officielle en préfecture pour les manifestations dont l’effectif prévisible dépasse 500 personnes, devant être faite un mois avant la date prévue et assortie d’engagements pour garantir la sécurité, la salubrité, l’hygiène et la tranquillité publique. Des démarches sont à effectuer auprès des services de sécurité et de santé, des garanties devant être apportées sur le lieu choisi.

Ces déclarations nécessaires et préalables ne sont pas effectuées la plupart du temps. Les maires des communes concernées m’alertent régulièrement sur l’existence d’une réelle problématique liée aux dégâts engendrés, selon la nature du site et l’importance de la manifestation.

À l’heure où nous évoquons systématiquement et à juste titre les sujets environnementaux, dont celui des décharges sauvages, lors de la discussion de tous les projets de loi et de nos travaux spécifiques en commission de l’aménagement du territoire et du développement durable, j’attire votre attention sur le fait que ces rassemblements produisent des déchets, parfois sur des sites remarquables et protégés, menacent la biodiversité et entraînent des risques d’incendie, dans un contexte de sécheresse extrême.

Rappelons que mon département, le Gard, figure parmi les départements les plus concernés à la fois par ces free-parties et par le risque de sécheresse. À l’heure où je vous parle, des mesures de restriction renforcées sont toujours en vigueur pour les usages de l’eau, malgré les premières précipitations importantes de l’automne. Même si les rave-parties ont généralement plutôt lieu au printemps et sont soumises aux interdictions au même titre que toutes les autres manifestations en période estivale, la problématique de la sécheresse s’étend bien en amont et bien au-delà des mois d’été ces dernières années. Je vous renvoie à ce qui est survenu le 2 septembre dernier à Saint-Pargoire, dans l’Hérault.

Au-delà de ces nuisances environnementales, n’oublions pas la problématique des nuisances sonores pour les riverains. La question du bien-vivre ensemble, à laquelle je suis particulièrement attachée, doit également être évoquée, car, on le sait, la liberté des uns s’arrête où commence celle des autres.

Je le rappelle, l’objectif de cette proposition de loi n’est pas d’interdire une quelconque free-party ou de désigner des coupables, mais, au contraire, de susciter un débat apaisé et de mettre toutes les parties prenantes autour d’une table : les préfets, les maires, les organisateurs de rave-parties, les gendarmes, les associations de protection de l’environnement, les syndicats et les riverains concernés.

Je souhaite que nous trouvions des solutions concertées pour mieux encadrer ces manifestations quand elles sont illégales et donner enfin les moyens aux communes, dont les maires apparaissent de plus en plus démunis face aux conséquences, d’exercer un pouvoir légitime sur le territoire dont ils ont la responsabilité et de préserver un environnement et une biodiversité de plus en plus menacés, comme l’actualité et les projets de loi que nous étudions nous le montrent chaque jour.

Même si l’objectif premier de cette proposition de loi n’est pas de sanctionner de façon dogmatique et automatique, il apparaît que certains organisateurs, devant la légèreté des sanctions encourues, font fi des obligations qui s’imposent à eux.

J’ai donc souhaité introduire le débat en proposant un durcissement des sanctions frappant les organisateurs, dans la foulée des préconisations de la proposition de loi n° 864 déposée le 11 avril 2018 à l’Assemblée nationale par M. Thibault Bazin, député de Meurthe-et-Moselle. Comment renforcer ces pénalités ou sanctions pour dissuader l’organisation illégale et non déclarée de ces événements et comment ajuster la peine à la hauteur de l’infraction ?

La question du mode de sanction, terme sans doute non approprié et à préciser lors des futurs débats, reste ouverte. Je me félicite des échanges constructifs que nous avons déjà eus avec le rapporteur à ce sujet à l’issue des différentes auditions.

Les peines actuelles n’étant pas assez dissuasives, les rave-parties illégales continuent à perturber certaines régions avec leurs lots de conséquences néfastes : pour la santé des participants, avec la déconnexion des responsabilités pour l’organisateur, pour les riverains, pour les élus enfin, chargés de la sécurité et de la protection de l’environnement et qui doivent assumer un coût considérable.

Mes chers collègues, il est nécessaire d’amorcer sur ce sujet un dialogue dépassionné et d’engager des mesures strictes pour encadrer l’organisation de ces événements quand ils sont illégaux. Il est également nécessaire de prévenir au mieux les nuisances et les conséquences sur l’environnement que les maires et leurs administrés doivent supporter.

J’ai approuvé les propositions d’amendements adoptées par la commission des lois qui sont venues enrichir le texte initial.

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