Intervention de Franck Menonville

Réunion du 30 octobre 2019 à 15h00
Donner des armes à l'acier français accompagner la mutation d'une filière stratégique — Débat organisé à la demande d'une mission d'information

Photo de Franck MenonvilleFranck Menonville :

Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, la France a un passé industriel et, surtout, un avenir industriel. C’est pour cette raison que le Sénat s’est attaché depuis plusieurs années à travailler sur le sujet de l’industrie. Il y a déjà près d’un an et demi, la mission d’information sur Alstom et la stratégie industrielle du pays rendait ses conclusions.

Alors que les temps sont aujourd’hui aux start-up et au numérique post-industriel, il n’en est pas moins nécessaire de conserver une industrie forte et modernisée, car la production métallurgique, notamment, constitue un enjeu essentiel pour notre économie et son autonomie.

L’acier se trouve au sommet de la chaîne de valeur de nombreuses industries. Sa production nécessite des investissements importants, avec des seuils de rentabilité élevés et des marges faibles.

L’acier est pourtant un enjeu de souveraineté. Il forge nos armes, au sens propre. Les vecteurs de notre force nucléaire – avions et sous-marins principalement – nécessitent des alliages spéciaux en acier de haute technicité.

L’acier est aussi un enjeu pour la transition énergétique. Le recyclage de l’acier représente une contribution importante dans le cadre de notre stratégie de réduction des émissions de gaz à effet de serre. Il ne faut pas oublier les évolutions technologiques qui permettent de limiter les émissions de CO2 dans la filière chaude au sein des hauts-fourneaux.

Or, douze ans après le Grenelle de l’environnement, la politique de l’éco-conception reste trop virtuelle et l’éco-recyclabilité des produits industriels à base d’acier est encore trop peu développée.

La France et l’Europe sont devenues des acteurs marginaux sur le marché mondial de l’acier, aujourd’hui dominé par la Chine, qui représente 50 % de la production mondiale.

Seuls les trois quarts à peine des capacités de production existantes sont utilisées. Nous sommes aujourd’hui en pleine crise de surcapacité, la création de nouvelles capacités se poursuivant dans un contexte de guerre commerciale exacerbée entre la Chine et les États-Unis.

Pourtant, malgré les efforts de structuration de la filière, il nous manque une politique publique claire, un ministre de l’industrie et des moyens humains et financiers dédiés.

Il nous manque également une véritable vision industrielle européenne. En effet, l’Europe est aujourd’hui trop focalisée sur la politique de concurrence, ce qui a pour conséquence première d’entraver notre capacité à construire des géants économiques capables d’affronter la concurrence mondiale. Le dossier Alstom-Siemens en est un exemple.

Enfin, l’Europe est trop lente à réagir face au dumping et elle manque d’ambition industrielle. Nous avons besoin d’une Europe stratège pour notre industrie.

Dans ce contexte, la mission d’information que j’ai eu le plaisir et l’honneur de présider a, pendant cinq mois, entendu 55 personnes et effectué plusieurs déplacements sur le terrain. J’en profite pour remercier mes collègues membres de la mission, en particulier Mme la rapporteure, chère Valérie Létard, ainsi que tous ceux qui ont travaillé à nos côtés.

Notre rapport, adopté à l’unanimité des groupes politiques du Sénat, contient 30 propositions, que la rapporteure va maintenant vous présenter dans leurs grandes lignes.

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