Intervention de Jocelyne Guidez

Réunion du 5 novembre 2019 à 14h30
Prestation de compensation du handicap — Adoption en procédure accélérée d'une proposition de loi dans le texte de la commission

Photo de Jocelyne GuidezJocelyne Guidez :

Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, permettez-moi de saluer l’initiative du président Milon, auteur de ce texte, ainsi que le travail de M. Philippe Mouiller, rapporteur de la commission des affaires sociales, qui a fait un rapport particulièrement objectif.

Avant de parler des avancées bienvenues figurant dans cette proposition de loi, je commencerai par développer deux points, qui, je l’espère, feront l’objet de modifications prochaines avec le soutien du Gouvernement.

Premièrement, la couverture des frais de transport par la prestation de compensation du handicap pose de réels soucis aux personnes handicapées, notamment lorsque les ressources médico-sociales ne sont pas immédiatement présentes dans leur département de résidence, limitant de fait leur accès aux soins ou leurs liens familiaux, par exemple. De plus, les déplacements sont parfois assurés par leur aidant, ce qui accroît la charge qui leur incombe. Or celle-ci pourrait facilement être allégée par une évolution de cette couverture.

Comme vous l’avez souligné, madame la secrétaire d’État, aujourd’hui, 284 000 personnes sont bénéficiaires de la PCH. Concernant la prise en charge au titre des transports, elle est plafonnée à 5 000 euros sur cinq ans et peut être majorée à 12 000 euros dans certains cas, notamment des déplacements aller-retour supérieurs à cinquante kilomètres. Très concrètement, et dans le meilleur des cas, cela revient à une aide mensuelle maximum de 200 euros pour couvrir ce type de frais. Ce montant apparaît inadapté aux besoins des personnes handicapées. Il conviendrait donc de réévaluer le montant de ces plafonds.

S’il nous paraît opportun que le département puisse, comme cela est déjà permis, apporter une aide s’ajoutant au plafond, nous ne souhaitons pas qu’il revienne aux départements de compenser l’absence de réévaluation de ce plafond pour atteindre un niveau acceptable.

Deuxièmement, sur l’accès aux aides techniques, il est aussi nécessaire de revoir ce point très rapidement. En effet, la liste des aides techniques qui entrent dans le champ de la PCH est précisée soit dans l’annexe du code de l’action sociale, soit dans l’arrêté du 28 décembre 2005. C’est la fameuse liste des produits et prestations remboursables, plus connue sous le sigle « LPPR ». Celle-ci demeure importante, car elle précise, de facto, le matériel pris en charge.

Certaines d’entre elles sont très connues : les barres d’appui, les sièges de bain, les accessoires fauteuils, etc. Ils favorisent notamment l’aide à l’habillage, à la mobilité, à la communication, à l’hygiène.

Toutefois, comme en témoigne le rapport de 2018 intitulé Repenser le financement du handicap pour accompagner la société inclusive, des évolutions sont attendues en la matière.

Nous sommes en 2019, et depuis près de quatorze ans, cette liste n’a pas été réévaluée, alors que notre environnement et nos comportements ont évolué. Depuis tout ce temps, les nouvelles technologies ont fait leur apparition et, avec elles, la mise sur le marché de smartphones, de tablettes, etc.

Désormais, nos maisons sont connectées, du nouveau matériel médical ou d’assistance médicale est disponible. Mes chers collègues, avions-nous tout cela à cette époque ? Certainement pas, mais, aujourd’hui, à l’heure où l’on parle d’intelligence artificielle, il existe des nouveautés, des moyens qui peuvent apporter une aide nécessaire pour ces personnes en situation de handicap. Tant de moyens pour améliorer le quotidien, mais qui ne sont pas pris en charge au titre de la PCH ou de la sécurité sociale ! Cela est d’ordre réglementaire et échappe malheureusement à la compétence du législateur.

Madame la secrétaire d’État, ce sont donc deux points d’alerte qu’il serait important d’examiner rapidement pour compléter les travaux de notre rapporteur.

Concernant cette proposition de loi, il figure à son dispositif de grandes avancées attendues par les personnes handicapées.

Tout d’abord, et il convient de le souligner, l’une d’entre elles répond à un principe de justice sociale en supprimant la limite d’âge dont la justification demeurait, il faut le dire, difficilement compréhensible pour les bénéficiaires.

Comme cela a été rappelé, la PCH n’est en effet accessible aujourd’hui qu’aux personnes de moins de 60 ans ou aux personnes de moins de 75 ans dont le handicap s’est déclaré avant 60 ans. Cette mesure était particulièrement attendue.

Je veux surtout souligner que plusieurs apports figurent dans cette proposition de loi, en particulier à l’article 3. Avec l’adoption de ce texte, les personnes concernées n’auront plus besoin de procéder à d’insoutenables démarches de demandes de renouvellement. Les durées d’attribution des différents éléments de la prestation, hors aide humaine, sont homogénéisées, ce qui est une bonne chose. En effet, combien de familles ont exprimé leur ras-le-bol de procéder trop souvent à ces démarches administratives ?

Lors de l’examen du texte en commission, il nous a été précisé que ce délai serait de dix ans. Nous nous en félicitons. C’est une étape majeure, car elle libérera l’esprit des familles, pour lesquelles ces démarches sont fastidieuses.

Il convient surtout de préciser que cette disposition permettra aussi aux agents des MDPH, qui auront moins de dossiers de demandes de renouvellement à traiter, de disposer, je l’espère du moins, de plus de temps de gestion. Encore dernièrement, un habitant de l’Essonne appelait mon attention sur la situation de sa femme au sujet de laquelle un agent lui avait indiqué qu’il n’aurait pas de réponse avant facilement six à neuf mois.

Veillons donc à une meilleure organisation. Ces structures assurent des missions d’accompagnement, dans des cadres d’urgence, de crise, sans oublier de souffrance.

Ce temps est précieux, notamment d’un point de vue financier. En plus de la question des transports évoquée précédemment, ce sujet doit être pris à bras-le-corps. Pour toutes ces raisons, je formule un vœu : j’espère que dans le prochain projet de loi relatif au grand âge et à l’autonomie, la question des délais de traitement sera au rendez-vous.

Par ailleurs, cet article crée un droit à vie à la PCH lorsque le handicap n’est pas susceptible d’évoluer favorablement. Cette disposition s’inscrit dans le prolongement de ce qui a été accordé pour la reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé ou l’allocation aux adultes handicapés pour ceux dont le taux d’incapacité permanente est de 80 %.

Je ne reviendrai pas en détail sur les modalités de contrôle du président du conseil départemental, car ce point a été décrit en détail par le rapporteur.

Au-delà de ce sujet, la correction apportée au niveau de la base légale des fonds départementaux de compensation du handicap était attendue. Nous saluons l’adoption en commission de l’article 2 qui entend apporter plus d’égalité au-delà d’un souci de clarté.

Surtout, je souhaite m’arrêter quelques instants sur la création, auprès du ministre chargé des personnes handicapées, du comité stratégique chargé d’élaborer et de proposer des évolutions des modes de transport.

Je le disais dans mon introduction, la question des transports est un sujet épineux. Cette disposition va dans le bon sens. Toutefois, madame la secrétaire d’État, il ne faudrait pas que le temps de la constitution du comité et le temps de la réflexion ne soient plus longs que celui de la réforme attendue. Cet article permet ainsi de poser le sujet sur la table.

Les problématiques sont connues de tous, et les élus locaux nous les font remonter régulièrement : des règles différentes en fonction de la finalité du transport utilisé ; des prises en charge diverses selon que la personne handicapée travaille ou non ; des périmètres différents en fonction des financeurs ; des règles de prise en charge assurées de manière diverse.

Ainsi, de ce comité stratégique doit découler une rationalisation des objectifs et des moyens autour d’une règle, d’un financeur, d’un interlocuteur. Le droit ne saurait s’inscrire dans une autre perspective que celle de la simplification des procédures.

À ce sujet, j’ai créé dans ma commune un accueil de jour Alzheimer. La maladie n’étant pas un handicap, bien qu’elle puisse être handicapante, les personnes touchées par ces symptômes relèvent de l’allocation personnalisée d’autonomie. Outre que sa thématique transport est souvent mal connue, voire méconnue des bénéficiaires, cette allocation ne serait pas assez importante.

Mes chers collègues, cet accueil de jour est sous-occupé, car les personnes qui pourraient l’intégrer n’ont pas les moyens financiers suffisants pour y venir. Or cette structure, construite par la municipalité et gérée par un Ehpad, constitue une véritable offre de répit pour les aidants. Tout cela démontre bien les besoins qui existent sur le plan de la rationalisation des transports.

Monsieur le rapporteur, ce texte apporte de belles innovations, attendues par les intéressés. Nous serons d’autant plus satisfaits lorsque le Gouvernement mettra en œuvre les réformes nécessaires tant pour les transports que pour les aides techniques. Je sais que vous y travaillez.

Pour l’heure, le groupe Union Centriste soutiendra ce texte, dont il espère, madame la secrétaire d’État, une adoption rapide à l’Assemblée nationale.

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