Rémy Pointereau, je ne reviens pas sur les décisions prises dans la loi ELAN. Il y a actuellement 57 villes Action Coeur de ville, qui ont signé les premières Opérations de revitalisation des territoires (ORT). Plusieurs dizaines de signatures sont programmées cet automne. Plus globalement, 500 projets de conventions ORT sont engagés. Certaines sont des actions Coeur de ville (212), d'autres non. En Corse, par exemple, j'ai signé à Propriano une ORT qui n'est pas Action Coeur de ville. On sent que c'est un outil puissant pour la revitalisation des territoires urbains comme ruraux. C'est l'intérêt pour ceux qui souhaitent se doter d'un projet global partagé. La présentation des avantages de ces dispositifs dans les régions et les départements a été effectuée par les services de l'État, notamment par la Direction de l'habitat, de l'urbanisme et des paysages (DHUP).
Au 15 septembre 2019, les engagements financiers consolidés cumulés de l'Etat et des partenaires financiers s'élèvent à 674 M€ ainsi répartis : 200 M€ de l'État, 142 M€ de l'Agence nationale pour l'amélioration de l'habitat (ANAH), 190 M€ de la Caisse des dépôts, et 142 M€ d'Action Logement. Plus de 4 000 actions sont en cours de déploiement.
Rémy Pointereau souhaite que soient faites des circulaires pour que le préfet développe la promotion de ces outils. Je vais regarder ce point de plus près.
Les moratoires ne sont pas encore très utilisés. Nous avons eu récemment un retour de la Commission européenne sur la compatibilité avec le droit communautaire de la concurrence. Nous venons de sortir les textes réglementaires et je pense que la mise en place va pouvoir se faire plus facilement. Un décret en date du 26 juillet porte sur le moratoire.
Sur l'évolution de la Commission nationale d'aménagement commercial (CNAC), nous définissons actuellement les indicateurs d'évaluation qualitative de ce dispositif. Une véritable démarche s'installe dans les services de l'État pour évaluer les conséquences des décisions prises. De manière générale, on relève une prise de conscience des dérives passées. Il y a aussi un changement de mentalité du consommateur : il est moins passionné par les grandes surfaces, plus attaché à la qualité de son alimentation, etc. La mort des petits commerces dans les petites villes et les villes moyennes a été causée par le développement excessif de grandes zones commerciales. C'est le cas dans le centre-ville de Blois.
Une question portait précisément sur l'exonération du passage en Commission départementale d'aménagement commercial (CDAC). Je ne dispose pas de données suffisamment précises sur ce point, je vais me renseigner.
Françoise Gatel, le suivi de l'expérimentation dans votre département relève de la compétence du préfet. Celui-ci peut librement instaurer une commission composée de parlementaires. J'en profite pour faire une parenthèse. Le Président de la République et le Premier ministre s'inscrivent dans une nouvelle démarche. Alors que nous nous dirigions précédemment vers une régionalisation de l'administration préfectorale, nous avons redonné la main aux préfets de départements pour l'élaboration de nombreuses politiques. Lors de la préparation du texte relatif à l'ANCT, plusieurs ont plaidé pour que le préfet de région soit désigné comme représentant de l'ANCT. Nous avons tenu à ce que ce soit le préfet de département. Compte tenu de la mission de l'ANCT, les préfets confient d'ailleurs parfois la mission à des sous-préfets puisqu'il faut être au plus près du terrain.
Concernant les accords locaux régissant l'ouverture des magasins, une loi encadre le sujet. J'ai toutefois compris qu'il y a des difficultés. Il arrive que des accords soient attaqués en raison du fait qu'ils contreviennent au droit du travail. Le sujet mérite d'être approfondi.
Antoine Lefèvre, je vous remercie pour votre appui sur la révision des ZRR. Je réponds simultanément à Charles sur les systèmes qui sont compilés sur les zones rurales. Je suis favorable à une remise à plat des dispositifs. Il faut avoir le courage de revoir la situation existante et élaborer une politique efficace en direction des territoires en besoin.
De nombreuses questions ont porté sur les maisons France Service. J'ai omis de rappeler que cette initiative ne pourra se faire sans une étroite collaboration avec les collectivités territoriales. Les cas de réussite s'expliquent par l'engagement de la mairie, de l'intercommunalité, du département. Je précise que Jean-Léonce Dupont m'a proposé que les nouvelles maisons de services au public à développer se fassent avec « Point Info 14 ». Comme il existe des services déconcentrés du conseil départemental dans le Calvados, il est intelligent de les baser dans les maisons France Service.
M. Vial, je ne conteste pas votre remarque, mais fait frappant, les plus belles maisons que j'ai visitées étaient situées dans des ruralités. Les élus sentent le besoin de développer les maisons de services au public compte tenu du recul des services publics sur le territoire français. Il y a aujourd'hui un besoin de remettre du service public au coeur de nos territoires. Vous avez parlé des distributeurs automatiques de billets. Une banque m'a justement proposé d'entrer dans les maisons France Service parce qu'elle a compris l'intérêt de mutualiser des services dans un lieu unique.
Vous avez insisté sur la formation des agents France Service, et c'est fondamental. Les agents en front-office doivent particulièrement être formés. Ceux-ci ont souvent été formés dans les collectivités territoriales. Avec le Centre national de la fonction publique territoriale, nous avons conçu un programme de formation pour les personnels basés dans les MSAP et pour les nouvelles MSAP. Il existe un programme de formation sur six journées. Dans les maisons de services au public, la réponse apportée au public doit l'être soit physiquement, soit par voie informatique ou par visioconférence. Du personnel de Pôle Emploi doit être présent sur des plages horaires identifiées ou alors autrement. En Haute-Saône, une mairie rurale était par exemple dotée d'un système de type Skype avec un interlocuteur qui répondait aux appels.
Le personnel de l'État doit être présent dans les maisons France Service. Le Président de la République a même demandé l'installation de maisons France Service dans les locaux de certaines sous-préfectures. Le ministère de la Justice peut y installer ses points d`accès au droit qui sont généralement situés dans un coin de la ville ou du tribunal. Il existe un accord entre le ministère de la Justice et les maisons France Service. Tous les ministères sont les bienvenus.
En Dordogne, j'ai visité une maison France Service accolée à une maison de santé. Cet exemple démontre que l'intelligence des territoires permet de développer des projets concrets.
Les financements de France Service sont actuellement alimentés par du Fonds national d'aménagement et de développement du territoire (FNADT) : 25 K€ aujourd'hui, 30 K€ demain. S'y ajoute le financement des opérateurs.
Je réponds à Pascal Savoldelli que des maisons France Service sont développées dans les villes, notamment dans les Quartiers prioritaires de la ville (QPV).
Charles Guené a avancé une proposition originale concernant les finances. Je crois qu'il n'a pas tort. Il existe un grand débat sur l'autonomie fiscale. La suppression de la taxe d'habitation et des compensations est en cours. On prend le foncier bâti des départements pour les descendre sur les communes. Les départements en sont mécontents. Il faut une compensation. Il a été proposé de leur donner de la TVA. Je suis frappée par le fait que ceux qui sont les plus satisfaits sont les départements les plus ruraux parce que la TVA assure une répartition de l'égalité de la richesse sur les territoires plus forte. Le président du conseil départemental de l'Aisne m'explique, par exemple, qu'il ne peut plus utiliser le levier fiscal car sa population se trouve en difficulté. Philippe Dallier a évoqué le cas des Hauts-de-Seine et des Yvelines. Ces départements peuvent lever des impôts et augmenter les droits de mutation car ils disposent du substrat de richesse. La Creuse n'a pas cette possibilité. Allouer une fraction d'impôt national représente donc la solution la plus égalitaire. On cite souvent l'exemple allemand mais les Länder ne jouissent pas d'un pouvoir de taux.
Pascal Savoldelli demande si nous avons effectué le bilan de la décentralisation. Je crois que c'est souhaitable si l'on veut un État efficace. Dans des domaines, la décentralisation a peut-être été une erreur. Je précise immédiatement que la mode est néanmoins davantage à la décentralisation et à la proximité, la recentralisation de certaines compétences n'est pas dans l'air du temps. La nécessité de faire le point sur nos décisions passées demeure une réalité.
Vous avez fait remarquer qu'un département peut construire un lycée. Certes, mais l'inscrire dans la Constitution pourrait faciliter la situation. Plusieurs d'entre vous ont parlé d'assouplissement nécessaire et je souscris à ce point.
Vous avez abordé le cas de l'assainissement de Choisy-le-Roi. La ville conteste être dans les 322 collectivités soumises au contrat, mais les données budgétaires la placent dans celles dont le budget dépasse 60 M€. Il y a un transfert d'un service public industriel et commercial sur l'imputation des dépenses de fonctionnement au budget principal. La commune a signé une convention de gestion pour assurer la compétence de manière transitoire donc, dans la réglementation, cela n'a pas d'incidence sur le traitement comptable. Je vais examiner le point de plus près.
Concernant le Grand Paris, je partage le constat selon lequel une évolution est souhaitable. En tant que sénateur depuis 2001, nous avons vu ensemble défiler de nombreuses lois sur l'intercommunalité Je m'étais exprimée à plusieurs reprises sur le fait que je ne comprenais pas qu'on mette toujours Paris à part lors de lois sur l'intercommunalité. Selon moi, si nous avions mis Paris dans le droit commun, nous n'en serions pas là aujourd'hui. Le statu quo est impossible et un consensus doit être trouvé. Ce n'est pas si évident, même si je vois des lignes nouvelles se dessiner. Le Président de la République souhaite repartir du projet et des besoins de la capitale (transports, logement, activité économique, etc.) en rééquilibrage. L'idée qui a prévalu au début - celle d'entrer par les structures -, nous a collectivement amenés à une solution insatisafaisante. Partir des projets implique une solidarité financière effective. Je ne reviens pas sur la prétendue fusion des Hauts-de-Seine et des Yvelines, sinon pour dire que le journaliste était mal informé. Aucune décision n'a été prise. Il faut inclure ce projet des deux départements dans la réflexion globale sur la Métropole du Grand Paris (MGP). Il n'y aura pas d'évolution sensible d'ici les élections municipales. Je suis néanmoins persuadée du besoin d'expression publique de la part du Gouvernement sur la mise en oeuvre d'orientations pour la MGP. La situation est identique à Marseille. Le chef du Gouvernement et le Président de la République vont s'exprimer sur ces deux projets.
Philippe Dallier m'a interrogé sur le calendrier. Il a toujours été prévu que la loi 3D ne vienne qu'après les élections municipales. Le début de la discussion parlementaire aura lieu entre les élections municipales et l'été. Ce texte fera l'objet de nombreuses concertations, auprès d'associations d'élus et d'institutions comme la vôtre. Je ne sais pas si cette loi sera consacrée aux métropoles.
Vous appelez à un préfet plus accompagnateur et simplificateur. Un droit à la dérogation a été accordé à une dizaine de préfets en 2017. Cette disposition a permis de prendre 124 arrêtés préfectoraux qui adaptent les décisions aux territoires dans lesquels le décret s'applique. Cela a créé un réflexe simplificateur dans les services déconcentrés. Une évaluation sera réalisée afin de savoir si l'on prolonge ou si l'on généralise cette démarche. J'y suis personnellement favorable. La déconcentration donne en effet plus de pouvoir aux représentants de l'État sur les territoires et permet de renforcer la présence de l'État sur les territoires et de contractualiser avec les territoires.
Les préfets connaissent bien leur territoire et je vous citerai une anecdote pour illustrer ce point. Je viens d'une commune concernée par l'article 55 de la loi SRU et qui n'atteint pas le quota de logements sociaux. J'avais élaboré un programme de construction devant être bâti sur trois années. En raison de l'engagement de ce programme, nous n'avions pas de pénalité. Or ce programme a été réalisé plus vite que prévu, en deux ans au lieu de trois. Le service de l'habitat de la région voulait me faire payer des pénalités pour la troisième année, quand bien même j'avais rempli mon contrat sur deux ans. Heureusement, le préfet de département a réglé la situation. Le rôle des préfets de département est important.
François Bonhomme m'a interpellée au sujet de la délivrance des cartes d'identité. Je connais cette demande, mais un problème de sécurité persiste. Lorsqu'un citoyen vient chercher sa carte d'identité, il redonne ses empreintes sur l'appareil. Quand j'étais maire, j'ai connu l'époque où les démarches pour la carte d'identité et le passeport se faisaient en préfecture ou en sous-préfecture. De plus, il s'agit d'un sujet moins prégnant qu'il ne l'a été depuis la multiplication des appareils sur le territoire.